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Page:Wagner - Dix Écrits, 1898.djvu/248

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DIX ÉCRITS DE RICHARD WAGNER

quand on met en ligne de compte l’immense influence qu’il a exercée sur son époque. Mais on ferait mieux de garder le silence, et de ne pas exalter outre mesure la grandeur de cet homme de génie. Il y a le bon et le mauvais génie : tous les deux proviennent de la source de ce qui est divin et répand la vie, mais leur mission n’est pas la même...

Revenons maintenant au public des deux scènes lyriques françaises de la capitale. Je crois pouvoir prétendre à bon droit que c’est le public le plus éclairé, le plus impartial du monde, n’ayant de préférence que pour les bonnes choses. Il peut montrer de l’indulgence pour les aberrations où se sont fourvoyés nos jeunes compositeurs, mais rien ne constate qu’il les ait jamais encouragées sérieusement ou imposées. L’impuissance et la faiblesse de ces messieurs n’en seraient que plus inexplicables, et l’avenir de la musique en France se montrerait à nous sous des couleurs encore plus sombres, s’il était vrai que les affiches nous fissent connaître les noms des seuls artistes auxquels le ciel eût confié la mission de soutenir l’honneur de l’école française. Mais nous avons toute raison de croire que les affiches ne nous font connaître que la triste élite de compositeurs-aspirants qu’un concours fortuit de circonstances bizarres a mis en évidence, et que l’élite véritable, dans la capitale et en France, lutte obscurément contre la misère et la faim, et se consume