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Page:Weil - Intuitions pré-chrétiennes, 1951.djvu/103

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La terre est ébranlée.
Souterrainement l’écho gronde pour répondre
Au tonnerre, et les lignes étincellent
de l’éclair en feu ; dans les tourbillons la poussière
tournoie ; elles bondissent, les brises,
les vents, tous, les uns contre les autres ;
une guerre des vents est déclarée.
Il y a mélange du ciel et de la mer.(V. 1088.)
C’est là contre moi une tempête de Zeus.
Portant la terreur elle s’avance visible.
Ô ma mère et sa sainteté, ô pour tous
ciel par qui la commune lumière tourne,
voyez-vous quelles injustices je souffre ?


Ces mots sont les derniers de la tragédie. Elle finit par le mot πάσχω si proche de passion.

Il a eu pitié et n’a pas obtenu de pitié. Antigone aussi dit, dans Sophocle, qu’ayant exercé la piété elle subit un traitement impie. Les grecs ont été poursuivis par la pensée qui faisait pleurer un saint du Moyen-Âge, la pensée que l’Amour n’est pas aimé.

Le vocabulaire de cette tragédie présente beaucoup d’étrangetés, de mots rares, qui sont sans doute des mots à double entente dont nous n’avons pas la clef. La clef devait être dans la liturgie des Mystères. Sur les mots πόροϛ et μηχανή qui reviennent sans cesse et doivent, ici et dans les autres œuvres où ils apparaissent, faire allusion à cette liturgie, voir plus haut.

Des allusions probables à la tragédie d’Eschyle, ou à une source commune, dans le Banquet de Platon, ont été signalées plus haut. Prométhée est sans abri, exposé aux injures de l’air, l’Amour aussi. Prométhée a pris à la chasse la source du feu. L’Amour est redoutable chasseur. Prométhée est un médecin qui ne peut trouver de remède pour lui. L’Amour est un médecin qui guérit le mal qui