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Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/104

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Ainsi le détachement parfait permet seul de voir les choses nues, hors de ce brouillard de valeurs mensongères. C’est pourquoi il a fallu les ulcères et le fumier pour que fût révélée à Job la beauté du monde. Car il n’y a pas de détachement sans douleur. Et il n’y a pas de douleur supportée sans haine et sans mensonge sans qu’il y ait aussi détachement.

L’âme qui a passé la tête hors du ciel mange l’être.

Celle qui est à l’intérieur mange l’opinion.

La nécessité est essentiellement étrangère à l’imaginaire.

Ce qui est réel dans la perception et la distingue du rêve, ce n’est pas les sensations, c’est la nécessité enveloppée dans ces sensations.

« Pourquoi ces choses et non pas d’autres ? »

« C’est ainsi. »

Dans la vie spirituelle l’illusion et la vérité se distinguent de la même manière.

Ce qui est réel dans la perception et la distingue du rêve, ce n’est pas les sensations, c’est la nécessité.

Distinction entre ceux qui restent dans la caverne, ferment les yeux et imaginent le voyage et ceux qui le font. Réel et imaginaire aussi dans le spirituel, et là aussi la nécessité fait la différence. Non la souffrance simplement, car il y a des souffrances imaginaires. Quant au sentiment intérieur, rien de plus trompeur.