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Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/165

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LA DISTANCE
ENTRE LE NÉCESSAIRE ET LE BIEN[1]

La nécessité est le voile de Dieu.

Dieu a confié tous les phénomènes sans exception au mécanisme du monde[2].

Comme il y a en Dieu l’analogue de toutes les vertus humaines, aussi de l’obéissance. C’est le jeu qu’il laisse en ce monde à la nécessité.

La nécessité, image saisissable pour l’intelligence de l’indifférence, de l’impartialité de Dieu.

  1. Cf. Platon, République, liv. VI. (Note de l’Éditeur.)
  2. Il est significatif de constater que Simone Weil étend le déterminisme cartésien et spinoziste à fous les phénomènes naturels, y compris les faits psychologiques. La pesanteur, pour elle, n’est mise en échec que par la grâce. Elle méconnaît par là la marge d’indétermination et de « gratuité » que Dieu a laissée dans la nature, et qui permet l’insertion de la liberté et du miracle dans le monde. Il n’en reste pas moins qu’en fait la pesanteur est pratiquement toute-puissante : saint Thomas reconnaît que la plupart des actions humaines sont dictées par l’aveugle appétit des sens et soumises au déterminisme des astres (Note de l’Éditeur).