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Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/86

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l’avenir — nous sommes innoncents. Nous ne pouvons être à cet instant que ce que nous sommes : tout progrès implique une durée. Il est dans l’ordre du monde, à cet instant, que nous soyons tels.

Isoler ainsi un instant implique le pardon. Mais cet isolement est détachement.

Il n’y a que deux instants de nudité et de pureté parfaites dans la vie humaine : la naissance et la mort. On ne peut adorer Dieu sous la forme humaine sans souiller la divinité que comme nouveau-né et comme agonisant.

Mort. État instantané, sans passé ni avenir. Indispensable pour l’accès à l’éternité.

Si on trouve la plénitude de la joie dans la pensée que Dieu est, il faut trouver la même plénitude dans la connaissance que soi-même on n’est pas, car c’est la même pensée. Et cette connaissance n’est étendue à la sensibilité que par la souffrance et la mort.

Joie en Dieu. Il y a réellement joie parfaite et infinie en Dieu. Ma participation ne peut rien ajouter, ma non-participation rien ôter à la réalité de cette joie parfaite et infinie. Dès lors, quelle importance que je doive y avoir part ou non ? Une importance nulle.