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Page:Weil - La Source grecque, 1953.djvu/58

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Ah, ah !
Que c’est terrible !
Malheur à moi.
Envoyé par quels chemins, malheureux, comme tu m’as perdue !
Tu m’as vraiment perdue, ô toi, tête de mon frère.
Ainsi donc, toi, reçois-moi là dans ta demeure,
celle qui n’est pas dans le néant, pour qu’avec toi en bas
j’habite désormais. Car quand tu étais ici
avec toi j’ai partagé le même sort. Et maintenant j’aspire
avec toi, morte, à avoir part à ton tombeau.
Car ceux qui sont morts, je ne vois pas qu’ils souffrent.

CHŒUR

Un mortel fut ton père, Électre, sois modérée.
Il était mortel, Oreste. Il ne faut pas trop te plaindre.
Car pour nous tous cette dette est à payer.

ORESTE

Hélas ! hélas ! que vais-je dire ! Quels mots impossibles
me viennent ! Contraindre ma parole, je ne peux plus.

ÉLECTRE

Quelle douleur te tient ? À quoi tend ce langage ?

ORESTE

Est-ce toi l’illustre personne d’Électre, devant moi ?

ÉLECTRE

C’est elle-même, et dans un affreux état.

ORESTE

Ah, malheureuse ! Ah, quelle infortune est-ce là !

ÉLECTRE

Ce n’est certainement pas, étranger, sur moi que tu gémis ainsi ?

ORESTE

Ce corps, comme on l’a fait honteusement, criminellement dépérir !