Aller au contenu

Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/87

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ainsi la suite des nombres, autrement dit l’arithmétique, s’applique à la géométrie. À vrai dire il ne convient pas de lui appliquer l’arithmétique elle-même, mais une arithmétique redoublée qui est à la deuxième espèce de série, dont il a été dit qu’elle convient à la connaissance du monde, ce qu’est l’arithmétique simple à la première espèce, qui définit mon action. Cette autre arithmétique, qui a nom algèbre, se constitue en remplaçant, comme principe générateur de la série, l’addition par la multiplication.

Tel est l’édifice des idées que je dois préparer avant de tourner mon esprit vers le monde. J’ai ainsi de quoi remplacer les idées que l’imagination trompeuse me fait lire dans les sensations. Cette maison qui me semble un être secret et perfide, je supposerai qu’elle n’est qu’objet de mon action, résistance à mon action. Je ne puis concevoir une telle résistance que comme étant de même espèce que mon action elle-même qui s’y applique, c’est-à-dire non pas comme pensée, volonté, passion, mais comme mouvement. Et pour représenter ce que je suis à l’égard du monde, je supposerai qu’à l’unique mouvement dont je dispose il oppose un mouvement innombrable, un mouvement qui soit à l’impulsion droite ce qu’est le nombre que les mathématiciens nomment infini à l’unité, les mouvements qui correspondent à l’oblique, au cercle, à l’ellipse étant comme deux, trois, quatre. Mais pour concevoir clairement ce mouvement infiniment composé, il n’est pas d’autre moyen pour moi que de concevoir une quantité indéfinie d’impulsions droites qui se combinent, et de les concevoir chacune séparément, sur le modèle du mouvement dont je dispose. Je supposerai dans le monde une quantité indéfinie d’impulsions simples, et je défi-