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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/258

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— Après cela, repris-je, Ischomachus, nous nettoyons ce blé en le vannant. — Oui ; mais dis-moi, Socrate, sais-tu que, si tu te mets à vanner contre le vent, toute l’aire se couvrira de balles ? — Cela doit être. — Et tout naturellement la balle reviendra sur le grain. — Il serait, en effet, fort singulier qu’elle passât par-dessus le tas de blé pour se rendre dans la partie vide de l’aire. — Mais si l’on se met à vanner sous le vent ? — Il est clair qu’alors les pailles seront chassées dans le pailler. — Quand tu auras nettoyé le grain jusqu’au milieu de l’aire, continueras-tu de vanner le reste, en le laissant ainsi épars, ou bien réuniras-tu le grain nettoyé à l’extrémité de l’aire, pour qu’il occupe le moins de place possible ? — Je réunirais, par Jupiter ! lui dis-je, tout le grain nettoyé, de sorte que la paille soit emportée par-dessus le blé, dans la partie vide de l’aire[1], et que je n’aie pas à vanner deux fois la même paille. — Tu pourrais bien, Socrate, enseigner à un autre la manière de vanner promptement. — Je ne me connaissais pas ce talent : et peut-être, j’y songe, y a-t-il longtemps que je suis, sans m’en douter, orfévre, joueur de flûte, peintre. Personne ne m’en a donné des leçons, pas plus que d’agriculture. Or je vois que l’agriculture est un métier comme les autres. — Il y a longtemps, reprit Ischomachus, que je te l’ai dit ; l’agriculture est le plus noble des arts, parce qu’il est le plus facile à apprendre. — Je le sais bien, Ischomachus, puisque, sachant tout ce qui a trait aux semailles, je ne me connaissais pas ce talent. »

  1. Weiske consacre une longue note a ce mot qui fait, selon lui, le désespoir des traducteurs ; nous avons essayé d’en donner l’idée la plus nette et la mieux appropriée au reste du passage.