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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/356

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qui a du moelleux est capable de s’enlever ; il n’en va point ainsi. Ce sera plutôt celui dont le rein est court, souple et fort ; et je veux désigner ici non les parties qui avoisinent la queue, mais celles qui s’étendent entre les côtes et les cuisses vers les flancs : un cheval ainsi fait pourra engager franchement les jambes de derrière sous son avant-main.

Si, après l’avoir placé dans cette position, vous marquez un temps d’arrêt, il s’assiéra sur les jarrets, relèvera l’avant-main de manière à montrer à ceux qui lui font face son ventre et ses testicules. Quand il fait ce mouvement, rendez-lui la main, et alors on verra qu’il prend lui-même la plus belle pose du cheval[1]. Quelques personnes ont aussi pour méthode, afin d’apprendre ce mouvement au cheval, les unes de toucher le dessous des genoux avec une baguette ; les autres, de faire courir à côté du cheval un homme qui lui frappe avec un bâton le dessous des bras[2]. Mais le meilleur moyen de l’instruire, selon nous et d’après notre recommandation incessante, c’est que, quand le cheval a accompli quelque chose au gré du cavalier, on lui accorde un instant de relâche. En effet, comme le dit Simon, dans ce qu’il fait malgré lui le cheval ne met pas plus d’intelligence ni de grâce qu’un danseur qu’on fouetterait ou piquerait de l’aiguillon. Attendez-vous à trouver disgracieux plutôt qu’élégants l’homme et le cheval traités de cette sorte. C’est uniquement par les signes que le cheval doit être amené à exécuter de plein gré les mouvements les plus beaux et les plus brillants.

Aussi, lorsque le cheval ira aux allures ordinaires, poussez-le jusqu’à le mettre en sueur ; lorsqu’il s’enlèvera bien, mettez aussitôt pied à terre, débridez-le, et soyez sûr qu’il sera tout disposé de lui-même à s’enlever[3]. C’est sur des chevaux prenant cette belle attitude qu’on nous représente les dieux et les héros, et les hommes qui manient bien les chevaux ont je ne sais quel air de grandeur. En effet, un cheval qui se dresse est quelque chose de si beau, de si frappant, de si magnifique, qu’il fixe les regards de tous ceux qui le voient, jeunes ou

  1. Xénophon donne ici le moyen de faire faire une courbette au cheval. Cette recommandation est remarquable pour l’époque à laquelle elle a été faite, et indique assez comment il faut s’y prendre pour asseoir son cheval. L. B.
  2. Et non pas cuisse, comme l’ont écrit quelques traducteurs.
  3. Cette remarque est juste. Un cheval qui est monté méthodiquement et qui a un travail tracé à l’avance, sachant qu’après tel mouvement il a telle récompense, exécute son travail avec plus de plaisir. L B.