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Page:Zevaco - Le boute-charge, 1888.djvu/217

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LE BOUTE-CHARGE

mes pouvoirs entre les mains de mon brigadier, et ma vie se concentra dans le cadre de la croisée. Je regardais ma nouvelle amie, de toute mon âme ; et toujours, bien qu’elle résistât à mes sollicitations, je voyais ses yeux se reposer sur les miens, craintifs, admirables de douceur. Je passai des heures inoubliables à contempler cette tête adorablement jeune, le front un peu bas sous les chatoiements sombres des cheveux bruns, la ligne hardie des sourcils ombrageant des yeux d’une franchise idéale, les joues fermes où je voyais se jouer, dans la pâleur mate, des rougeurs passagères, tendres comme les roses des aubes printanières, le sourire tout plein d’une fierté timide, à la fois serein et trouble, empreint de cette ineffable honte qui est le reflet des belles âmes.

Quel charme dans cette conversation muette ! Nous ignorions tout l’un de l’autre, jusqu’à nos noms. Je n’eus pas un instant l’idée de me lever, d’aller lui parler.

À quoi bon ?

Un mouvement l’eût sans doute effarouchée