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Page:Zevaco - Le boute-charge, 1888.djvu/226

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LE BOUTE-CHARGE

pour me reposer de quarante ans de service. J’emporte avec moi le souvenir de vous tous ; et ce n’est pas sans un serrement de cœur que je vous parle pour la dernière fois…

La parole à présent, tremble. Le ton a brusquement baissé sur le dernier mot. Les dragons baissent la tête, oublieux de la bonne tenue du rang. Les officiers, raides, considèrent le sable du manège. Des yeux du colonel, quelque chose comme une grosse goutte de rosée sort et roule sans qu’il songe à faire un mouvement pour se cacher. Mais cela ne dure pas… C’est fini, toute cette émotion… On est homme, que diable !

Il continue :

— Je ne veux vous dire qu’un mot. Plus heureux que moi, vous prendrez sans doute votre part de la prochaine lutte. Alors, soldats, je ne crains pas de vous dire, songez à votre ancien colonel ; et vous tous, les jeunes, faites votre devoir comme nous, les vieux nous avons fait le nôtre…

Sa voix grandit, superbe, sa taille se redresse.