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LES ROUGON-MACQUART.

raides, la carcasse démolie, la face terreuse ; et, comme un violent accès de toux le prenait, il préféra sortir pour cracher dehors, dans l’idée que son crachat noir allait gêner le monde.

Alzire eut tout le succès. Quelle jolie petite ménagère, avec son torchon ! On complimenta la mère d’avoir une petite fille déjà si entendue pour son âge. Et personne ne parlait de la bosse, des regards d’une compassion pleine de malaise revenaient toujours vers le pauvre être infirme.

— Maintenant, conclut madame Hennebeau, si l’on vous interroge sur nos corons, à Paris, vous pourrez répondre… Jamais plus de bruit que ça, mœurs patriarcales, tous heureux et bien portants comme vous voyez, un endroit où vous devriez venir vous refaire un peu, à cause du bon air et de la tranquillité.

— C’est merveilleux, merveilleux ! cria le monsieur, dans un élan final d’enthousiasme.

Ils sortirent de l’air enchanté dont on sort d’une baraque de phénomènes, et la Maheude qui les accompagnait, demeura sur le seuil, pendant qu’ils repartaient doucement, en causant très haut. Les rues s’étaient peuplées, ils devaient traverser des groupes de femmes, attirées par le bruit de leur visite, qu’elles colportaient de maison en maison.

Justement, devant sa porte, la Levaque avait arrêté la Pierronne, accourue en curieuse. Toutes deux affectaient une surprise mauvaise. Eh bien ! quoi donc, ces gens voulaient y coucher, chez les Maheu ? Ce n’était pourtant pas si drôle.

— Toujours sans le sou, avec ce qu’ils gagnent ! Dame ! quand on a des vices !

— Je viens d’apprendre qu’elle est allée ce matin mendier chez les bourgeois de la Piolaine, et Maigrat qui leur avait refusé du pain, lui en a donné… On sait comment il se paie, Maigrat.