Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/190

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disposant en bouquet. Le soleil montait, les ombres étaient plus noires ; autour de nous régnait un grand silence. Couché sur le dos, je regardais le ciel, je regardais les feuilles, je regardais Laurence. Le ciel était d’un bleu mat ; les feuilles, déjà languissantes, s’endormaient au soleil ; Laurence, la tête penchée, calmée & souriante, se hâtait avec des mouvements vifs & souples. Je ne pouvais détacher mes regards de cette femme couchée à demi, perdue au milieu de ses jupes, le front dans une ombre dorée, qui m’apparaissait innocente & active, pleine de ses quinze ans. J’éprouvais une telle paix, une si profonde joie, que je n’osais ni remuer ni parler ; je vivais de cette pensée que le printemps se trouvait en moi, autour de moi, & que Laurence était vierge ; je me perdais dans ce songe de la pureté de mon amante & de la hauteur de mon amour. Enfin j’aimais une femme ; cette femme riait, cette femme existait, elle avait les bonnes couleurs, la