Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/218

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foudroyée d’accablement & d’insensibilité.

J’étais resté sur le bord de la couche, secoué moi-même par les déchirements de la mourante. Je n’avais pas osé bouger, cloué de pitié & d’effroi. Ce que j’avais devant moi était si profond d’horreur & de tendresse, si lamentable & si répugnant, que je ne sais comment exprimer la sainte peur qui me tenait là, navré, plein de dégoût & de miséricorde. J’étais tenté de battre Pâquerette, de la chasser ; j’aurais voulu embrasser Marie comme un frère, lui donner mon sang pour rendre la vie & la fraîcheur à sa chair moribonde.

Ainsi, j’en étais arrivé à ce point : une femme perdue de vieillesse & de débauche m’offrait d’échanger mon cœur contre un autre cœur, de céder ma maîtresse à un de mes amis & de lui acheter ainsi la sienne ; elle me faisait voir tout l’avantage de ce marché, elle riait de l’excellente histoire. Et l’amante qu’elle voulait me don-