Page:Zola - La Confession de Claude (Charpentier 1893).djvu/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

peuple étranger à l’homme, ombres vaines dont les yeux ne me voient pas, dont les lèvres ne sauraient me parler. L’enfant peut se plaire à ces amis froids & muets ; ayant peur de la vie, il se réfugie dans ce qui ne vit pas. Mais nous, hommes, nous ne devons point nous contenter de cet éternel néant. Nos bras sont faits pour étreindre.

Hier, comme j’étais sorti avec Laurence, nous avons rencontré une troupe de gens masqués, entassés dans une voiture & se rendant au bal, ivres, échevelés, à grand tapage. Voici janvier, le mois terrible. La pauvre fille s’est émue aux cris de ses frères. Elle leur a souri & s’est tournée pour les voir plus longtemps. C’était sa gaieté de la veille qui passait, ses insouciances, sa vie folle & si âcre qu’on ne peut en oublier les cuisantes joies. Elle est rentrée plus triste & s’est couchée, malade de silence & de solitude.

Ce matin, j’ai vendu quelques hardes, je