Page:Zola - Le Vœu d’une morte, 1890.djvu/43

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ne faisait plus pour elle, elle le faisait pour sa fille. Jamais elle n’avait pensé que la mort pouvait venir et les séparer. Et la mort allait la prendre, et Jeanne allait rester seule. Ses rêves avaient menti : elle ne pourrait lui donner son expérience, elle ne guiderait ni ne développerait son intelligence et son cœur. Demain, Jeanne passerait aux mains de son père, aux mains d’un inconnu insouciant qui s’inquiéterait peu du précieux legs de la morte. C’était alors qu’elle s’était tranquillisée en dictant à Daniel le testament de sa tendresse.

Tandis que Mme de Rionne se mourait, son mari était chez mademoiselle Julia, une ravissante créature, pas ennuyeuse du tout, mais chère en diable. Il n’ignorait pas que sa femme fût malade. Seulement, pour ne point avoir à trop s’attrister, il traitait de légère indisposition le mal terrible qui devait l’emporter, et il avait réussi à se persuader qu’il pouvait vivre sa vie ordinaire, sans s’inquiéter aucunement.

Tel était cet homme parfait, dont la bourse