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NANA

— Oh ! cet amour ! reprit Nana, au dernier étalage, revenant de quelques pas pour s’attendrir sur une levrette en biscuit, une patte levée devant un nid caché dans des roses.

Ils quittèrent enfin le passage, et elle ne voulut pas de voiture. Il faisait très bon, disait-elle ; d’ailleurs, rien ne les pressait, ce serait charmant de rentrer à pied. Puis, arrivée devant le Café anglais, elle eut une envie, elle parla de manger des huîtres, racontant qu’elle n’avait rien pris depuis le matin, à cause de la maladie de Louiset. Muffat n’osa la contrarier. Il ne s’affichait pas encore avec elle, il demanda un cabinet, filant vite le long des corridors. Elle le suivait en femme qui connaissait la maison, et ils allaient entrer dans un cabinet dont un garçon tenait la porte ouverte, lorsque, d’un salon voisin, où s’élevait une tempête de rires et de cris, un homme sortit brusquement. C’était Daguenet.

— Tiens ! Nana ! cria-t-il.

Vivement, le comte avait disparu dans le cabinet, dont la porte resta entrebâillée. Mais, comme son dos rond fuyait, Daguenet cligna les yeux, en ajoutant d’un ton de blague :

— Fichtre ! tu vas bien, tu les prends aux Tuileries, maintenant !

Nana sourit, un doigt sur les lèvres, pour le prier de se taire. Elle le voyait très lancé, heureuse pourtant de le rencontrer là, lui gardant un coin de tendresse, malgré sa saleté de ne pas la reconnaître, lorsqu’il se trouvait avec des femmes comme il faut.

— Que deviens-tu ? demanda-t-elle amicalement.

— Je me range. Vrai, je songe à me marier.

Elle haussa les épaules d’un air de pitié. Mais lui, en plaisantant, continuait, disait que ce n’était pas