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LES ROUGON-MACQUART

tites mains, elle lui renversa la tête, puis, se penchant, colla sa bouche sur sa bouche, dans un long baiser. Un frisson le secoua, il tressaillait sous elle, éperdu, les yeux clos. Et elle le mit debout.

— Va, dit-elle, simplement.

Il marcha, il se dirigea vers la porte. Mais, comme il sortait, elle le reprit dans ses bras, en se faisant humble et câline, la face levée, frottant son menton de chatte sur son gilet.

— Où est l’hôtel ? demanda-t-elle très bas, de l’air confus et rieur d’une enfant qui revient à de bonnes choses dont elle n’a pas voulu.

— Avenue de Villiers.

— Et il y a des voitures ?

— Oui.

— Des dentelles ? des diamants ?

— Oui.

— Oh ! que tu es bon, mon chat ! Tu sais, tout à l’heure, c’était par jalousie… Et cette fois, je te jure, ce ne sera pas comme la première, puisque maintenant tu comprends ce qu’il faut à une femme. Tu donnes tout, n’est-ce pas ? alors je n’ai besoin de personne… Tiens ! il n’y en a plus que pour toi ! Ça, et ça, et encore ça !

Quand elle l’eut poussé dehors, après l’avoir chauffé d’une pluie de baisers sur les mains et sur la figure, elle souffla un moment. Mon Dieu ! qu’il y avait donc une mauvaise odeur, dans la loge de cette sans soin de Mathilde ! Il y faisait bon, une de ces tranquilles chaleurs des chambres de Provence, au soleil d’hiver ; mais, vraiment, ça sentait trop l’eau de lavande gâtée, avec d’autres choses pas propres. Elle ouvrit la fenêtre, elle s’y accouda de nouveau, examinant les vitrages du passage pour tromper son attente.

Dans l’escalier, Muffat descendait en chancelant,