Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/305

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ne pus empêcher Jacques de sauter dans l’eau. Marguerite l’avait bercé, il éprouvait pour la pauvre vieille une tendresse de fils. Au bruit des deux chutes, Babet s’était levée, épouvantée, les mains jointes. Elle resta là, debout, la bouche ouverte, les yeux agrandis, regardant la fenêtre.

Je m’étais assis sur l’appui de bois, les oreilles pleines du grondement des eaux. Je ne sais depuis combien de temps nous étions, Babet et moi, dans cette stupeur douloureuse, lorsqu’une voix m’appela. C’était Jacques qui se tenait au mur, sous la fenêtre. Je lui tendis la main, et il remonta.

Babet le prit avec force dans ses bras. Elle pouvait sangloter, maintenant ; elle se soulageait.

Il ne fut pas question de Marguerite. Jacques n’osait dire qu’il n’avait pu la retrouver, et nous n’osions le questionner sur ses recherches.

Il me prit à part, il me ramena à la fenêtre.

— Père, me dit-il à demi-voix, il y a déjà plus de deux mètres d’eau dans la cour, et la rivière monte toujours. Nous ne pouvons rester ici davantage.

Jacques avait raison. La maison s’émiettait, les planches des hangars s’en allaient une à une. Puis, cette mort de Marguerite pesait sur nous. Babet, affolée, nous suppliait. Sur le grand lit,