Page:Zola - Travail.djvu/128

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au sortir du parc, son regard s’étendait sur la plaine immense, cette Roumagne si célèbre autrefois par sa fécondité, qu’on accusait aujourd’hui de se refroidir et de ne plus nourrir son peuple. À gauche, il voyait se dérouler le vaste domaine de la Ferme, tandis qu’il apercevait, à droite, les pauvres toits des Combettes, autour desquels se groupaient des champs extrêmement divisés, des lopins émiettés encore par les héritages, pareils à une étoffe faite de pièces et de morceaux. Et que décider pour que la bonne entente revînt, pour que, de ces efforts contradictoires et douloureux, naquît le grand élan de solidarité, au nom du bonheur de tous !

Justement, comme on approchait de la Ferme, une habitation large et assez bien tenue, on y entendit des jurons, des coups de poing sur les tables, tout le bruit violent d’une querelle. Puis, on vit en sortir deux paysans, l’un gros et lourd, l’autre maigre et rageur, qui, après s’être menacés une dernière fois, s’éloignèrent, se dirigèrent à travers champs vers les Combettes, chacun par un chemin différent.

« Qu’y a-t-il donc, Feuillat ? demanda Boisgelin au fermier, debout sur le seuil.

— Oh ! ce n’est rien, monsieur… C’en est encore deux des Combettes, qui ont une discussion à propos d’une borne et qui m’avaient prié de leur servir d’arbitre. Voilà des ans et des ans que, de père en fils, les Lenfant et les Yvonnot sont toujours à se chamailler, si bien que ça les rend fous, rien que de se voir… J’ai eu beau leur parler raison, vous les avez entendus, ils se mangent. Et sont-ils bêtes, mon Dieu ! eux qui seraient si forts, s’ils voulaient seulement réfléchir et s’entendre un tout petit peu ! »

Puis, fâché sans doute d’avoir laissé échapper cette réflexion, qui n’était pas bonne à dire devant le maître, il voilà