Page:Zola - Travail.djvu/53

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enfin secouru. Si beau, si bon, il lui apparaissait comme un dieu, après les brutalités de Ragu. Elle aurait baisé la trace de ses pas, elle restait devant lui les mains jointes, sa main gauche serrant la droite, la mutilée, au linge taché de sang. Et quelque chose de très doux et de très fort se nouait entre eux, un lien d’infinie tendresse, d’amour infini.

« Nanet va vous conduire à l’usine, monsieur. Il en connaît tous les recoins.

— Non, non, je sais mon chemin… Ne le réveillez pas, il vous tient chaud. Attendez-moi là tranquillement tous les deux. »

Il la laissa sur le banc, avec l’enfant endormi, dans la nuit noire. Et, comme il la quittait, une grande lueur illumina le promontoire des monts Bleuses, à droite, au-dessus du parc de la Crêcherie, où se trouvait l’habitation de Jordan. On aperçut le profil sombre du haut fourneau, au flanc de la montagne. C’était une coulée, et toutes les roches voisines, toutes les toitures de Beauclair elles-mêmes s’en trouvèrent éclairées, comme d’une rouge aurore.