Page:Zola - Travail.djvu/625

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Au moment où Ragu s’approchait, un dernier rayon du soleil couchant embrasait la table d’une gloire, et les bouquets de roses les plats d’argent, les soies légères et les chevelures endiamantées des femmes, étincelaient, au milieu de cette splendeur. Mais surtout, dans cet au revoir de l’astre, l’allégresse adorable était la hâte des oiseaux du voisinage à s’abattre une fois encore, autour des convives, avant d’aller dormir sur les branches. Il en vint un tel vol, parmi un tel battement d’ailes, que la table en fut couverte une neige vivante de petites plumes tièdes. Des mains amies les prenaient, les caressaient, les relâchaient. Et cette confiance des rouges-gorges et des pinsons était infiniment douce, célébrait dans l’air calme du soir l’alliance faite désormais entre tous les êtres, l’universelle paix qui régnait entre les hommes, les bêtes et les choses.

«  Oh  ! grand-père Luc, cria le gamin Richard, vois donc, grand-mère Josine a une fauvette qui boit de l’eau dans son verre  !   »

C’était vrai, et Luc, le fondateur de ville, en fut amusé, ému. L’eau était un peu de cette eau si fraîche, si pure, qu’il avait captée parmi les roches des monts Bleuses, et dont sa ville entière, avec les jardins, les avenues, les fontaines jaillissantes, semblait être née. Il prit le verre, il le leva dans le soleil de pourpre, en disant  :

«  Josine, il faut boire, il faut boire à la santé de notre Cité heureuse  !   »

Et, lorsque Josine, restée l’amoureuse et la tendre sous ses cheveux blancs, eut trempé en riant ses lèvres, il but à son tour, il reprit  : «  À la santé de notre Cité dont c’est aujourd’hui la fête  ! … Et qu’elle s’élargisse toujours, et qu’elle pousse en liberté, en prospérité, en beauté, et qu’elle conquière toute la terre à l’œuvre d’universelle harmonie  !   »

Dans le soleil qui le nimbait d’une auréole, il était