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Redressement des courants alternatifs

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M. Hildburgh
Congrès international d’électricité de 1900 (Partie 2) (p. 1-5).

REDRESSEMENT DES COURANTS ALTERNATIFS ;

Par M. Hildburgh.

Le redressement des courants alternatifs peut se faire de trois manières différentes :

1o Par des moyens mécaniques : transformateurs rotatifs, convertisseurs, collecteurs tournants ;

2o Par des moyens physiques : lampes à arc utilisant des électrodes hétérogènes, emploi de courants dissymétriques dans l’arc, action d’un aimant sur l’arc, étincelle jaillissant entre une pointe et un plan, tubes à vide avec électrodes hétérogènes (joint en cuivre, palladium-aluminium), propriétés électromagnétiques du bismuth, pseudo-conduction asymétrique ;

3o Par des moyens chimiques (dus à l’apparition d’une forte résistance pour les courants se dirigeant dans un certain sens, ou à l’effet de la force contre-électromotrice de polarisation) ; on utilise dans ce but des électrodes hétérogènes plongeant dans l’acide sulfurique concentré, grande électrode ou petite électrode employées avec la haute tension. Un exemple frappant se rencontre avec les voies d’eau dans l’isolant des câbles sous-marins, voltamètre à lames d’aluminium, voltamètre à lames de magnésium et de fer chromé, électrode recuite et électrode platinée plongeant dans l’acide sulfurique dilué, électrode en or et électrode de platine dans l’acide sulfurique.

L’effet asymétrique de ces moyens chimiques donne un résultat qui dépend beaucoup des conditions de l’expérience, tant de la température des solutions que de la pression atmosphérique et de la différence de potentiel aux bornes.

Les conducteurs asymétriques peuvent être disposés : pour donner des pulsations positives dans un circuit ou négatives dans un autre ; pour transformer des courants polyphasés en courant de même sens.

Les qualités que doit remplir un conducteur asymétrique sont : l’irréversibilité, l’automaticité ; il ne doit pas être générateur ; il doit s’opposer instantanément au passage d’un courant dans la mauvaise direction, il ne doit pas être un organe mécanique, il doit être bon marché et d’un entretien peu élevé ; il doit fonctionner avec toute l’échelle habituelle des fréquences et des tensions.

Un élément constitué par une petite électrode en aluminium plongeant avec une électrode de platine dans l’acide sulfurique dilué formera un conducteur asymétrique fonctionnant à une tension relativement élevée par suite de la formation d’une couche résistante d’alumine à la surface de l’aluminium.

L’auteur a trouvé que si l’électrode de platine est petite et celle en aluminium beaucoup plus grande, et si la force électromotrice est maintenue assez basse, généralement au-dessous de 2 volts, on remarque qu’il y a asymétrie dans l’autre sens, causée par la dissolution de l’aluminium engendrant un couple platine-aluminium. En effet, l’élément peut fournir du courant dans cette direction en usant son électrolyde et son électrode d’aluminium. Cet effet ne tarde pas à cesser au bout de quelques instants, la surface de l’aluminium se recouvrant peu à peu d’une légère couche d’hydrate.

L’auteur a également remarqué un autre cas de réversibilité de la conduction asymétrique. Un élément étant constitué par une petite électrode de platine et une large électrode constituée par du gaz hydrogène, comme dans un voltamètre, laisse passer les courants de basse tension assez facilement ; mais, si l’on élève la tension aux bornes assez haut pour produire une étincelle explosive, l’asymétrie est renversée.

Applications des conducteurs asymétriques. — Les applications de ces conducteurs paraissent être restreintes, car on ne doit pas oublier qu’ils ne peuvent être appliqués qu’à des courants peu intenses et que, de plus, le courant est simplement redressé, sa force électromotrice variant constamment entre zéro et le maximum.

Un tel courant est applicable aux lampes à arc ou aux opérations électrolytiques dans lesquelles une force contre-électromotrice se présente (cas de l’affinage du cuivre), mais pour la commande des électro-aimants ou la charge des accumulateurs, d’autres transformateurs sont nécessaires.

Un électro-aimant excité avec du courant redressé produit une attraction constamment variable ; ces appareils doivent avoir des noyaux et des armatures en fer lamellé. Les batteries d’accumulateurs que l’on désirerait charger avec ces courants devraient être munies d’appareils évitant la décharge de la batterie quand la tension d’alimentation est plus faible que celle des accumulateurs.

On peut admettre, d’une façon générale, que le rendement des appareils redresseurs électrolytiques est en raison inverse de leur résistance intérieure ; de plus, pour chaque redresseur, il existe un régime pour lequel le rendement passe par un maximum.

L’auteur a remarqué cependant que le bon fonctionnement d’un redresseur électrolytique dépend essentiellement de la présence d’une forte densité de courant au moins sur l’une des électrodes, condition avec laquelle souvent une faible résistance intérieure est incompatible ; il en résulte qu’il est désormais nécessaire de n’employer les conducteurs asymétriques que lorsque le prix de l’énergie est un facteur négligeable.

La télégraphie emploie avantageusement les conducteurs asymétriques pour certains cas particuliers ; M. Ducretet, en 1874, proposa un système de télégraphie duplex dans lequel des clapets électrolytiques constitués par des lames d’aluminium étaient utilisés.

De nombreux systèmes, dans lesquels les demi-périodes positives et négatives d’un courant alternatif sont séparées au départ et à l’arrivée, utilisent des conducteurs asymétriques ; l’auteur a pu ainsi organiser des postes marchant en duplex, diplex ou en multiplex.

Four les applications industrielles dans lesquelles des courants intenses sont employés, on a généralement recours aux appareils redresseurs mécaniques.

Tesla, en 1899, proposa cependant l’emploi de conducteurs asymétriques pour la charge des accumulateurs ou pour des circuits de lampes à arc. M. Pollak songea à employer des clapets électrolytiques en aluminium pour empêcher la décharge des accumulateurs vers la dynamo de charge lorsque la force électromotrice vient à diminuer.

Le laboratoire paraît être plutôt le domaine des applications des clapets électriques ; c’est ainsi que pour l’étalonnage des appareils à courant alternatif, on peut les placer en circuit avec des appareils à courant continu. M. Bastian, par exemple, installa un appareil de mesure à courant continu sur du courant alternatif en interposant un élément à électrodes en aluminium dans le circuit.

Pupin a utilisé les conducteurs asymétriques à force contre-électromotrice pour déceler la présence des ondes hertziennes. Ryan et Scattergood ont publié une méthode pour tracer les courbes du courant alternatif dans laquelle toutes les demi-périodes sont supprimées, grâce à l’interposition d’un élément à lames d’aluminium. Kalischer a eu l’idée d’employer les clapets électrolytiques pour adapter le courant alternatif aux bobines de Ruhmkorff en en faisant du courant interrompu ; enfin Zenneck a imaginé une méthode pour doubler la fréquence d’un courant alternatif en le faisant passer dans un redresseur et en envoyant le courant ainsi redressé dans le primaire d’un transformateur, la période du courant secondaire devenant moitié moindre de celle du courant primaire.

Il n’est pas jusqu’à certaines méthodes employées par l’auteur pour mesurer la conductivité des électrolytes qui n’utilise les conducteurs asymétriques ; des indicateurs de terre pour les lignes à courant alternatif peuvent être également construits, et une foule d’autres petites applications pourront trouver dans les redresseurs électrolytiques le principe de leur fonctionnement.