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Revue littéraire - La Poésie de Lamartine

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Revue littéraire - La Poésie de Lamartine
Revue des Deux Mondes3e période, tome 76 (p. 931-944).
REVUE LITTÉRAIRE

LA POÉSIE DE LAMARTINE.

On dit que la mort est égale pour tous, et on le croit sans doute, puisqu’on le dit. Comment donc se fait-il qu’après avoir donné pour tant d’autres le signal de leur apothéose, elle n’ait en quelque sorte été, pour Lamartine, que la consécration suprême de l’oubli ? s’il est en effet vrai que, de 1820 à 1850, Lamartine ait régné sur les imaginations, et, selon l’expression de Sainte-Beuve, « s’il a bu, pendant un quart de siècle, le succès par tous les pores; » il a eu le temps, depuis lors, pendant les années de l’empire, entre 1850 et 1870, de sentir se dissiper l’ivresse, et la mort même n’a pas été pour lui le commencement de la justice, mais plutôt le contraire. Quelques vieillards ou quelques jeunes femmes, grâce à la musique de Niedermeyer, savent-ils peut-être encore les stances du Lac ou de l’Automne? Quelques collégiens et quelques professeurs de littérature, dans le fond d’une province, lisent-ils encore, de loin en loin, Jocelyn, ou la Chute d’un ange? Mais ce qui n’est pas douteux, c’est que les jeunes, comme ils s’appellent, — des jeunes de tantôt cinquante ans, soixante ou davantage, — ne nomment plus guère aujourd’hui Lamartine que pour lui préférer hautement Alfred de Vigny, par exemple, ou ce mystificateur de Charles Baudelaire, avec ses Fleurs du mal, sa Charogne, et ses Femmes damnées. Ce qui n’est pas moins sûr, c’est que la critique, dans un temps où ni les Laprade, ni même Edouard Turquety n’ont manqué de consciencieux biographes, n’a pas trouvé seulement, depuis dix ans, l’occasion de jeter un coup d’œil sur la Correspondance de Lamartine. Et ce qui est encore plus certain, c’est que la foule, — qui suit, comme toujours, — la foule indifférente, allant de l’un à l’autre, d’Hernani au Chandelier, ou des Caprices de Marianne à Ruy Blas, laisse lentement, autour du nom de Lamartine, l’oubli, l’ombre et l’obscurité s’épaissir.

Entre beaucoup de raisons que l’on pourrait donner de cette indifférence, ou, pour mieux dire, de cette ingratitude, il me sera permis ici de ne toucher aujourd’hui que les littéraires. Si peut-être quelques hommes politiques en veulent toujours à Lamartine de la révolution de 1848 et font payer à la gloire du poète la faute ou les erreurs du tribun populaire, ils ne sont pas nombreux, et le temps approche, d’ailleurs, où leurs antiques rancunes auront péri avec eux. J’en connais d’autres qui, s’ils l’osaient, lui feraient presque un crime de n’être pas mort plusieurs fois millionnaire, d’avoir traîné sa vieillesse en de pénibles et vulgaires labeurs, d’avoir dégradé à d’humiliantes sollicitations le poétique amant d’Elvire et de Graziella. Dirai-je que je crains que ce ne soient les mêmes qui reprochent à Hugo d’avoir trop bien entendu les affaires? Car nous rendons la vie difficile au poète. Et d’autres enfin insinuent que Lamartine a mal choisi son moment pour mourir, que les rares amis qu’il laissait derrière lui n’ont pas su mettre sa mort en scène, ni convenablement ordonner ses funérailles. Ce n’était pas, comme l’on dit, des « hommes de théâtre ; » non plus que lui, d’ailleurs; et en France, à Paris surtout, c’est une grande infériorité que ne pas être un homme de théâtre, — ou de n’en avoir pas un au moins dans sa famille. Mais, après cela, s’il n’y avait que de semblables raisons, on peut croire que depuis vingt ans bientôt elles auraient cessé d’en être. Aussi doit-il y en avoir de plus profondes; et, effectivement, il y en a; et elles sont curieuses à étudier, parce qu’elles ne tiennent guère moins, si je ne me trompe, à la nature de l’esprit français qu’à la nature même de la poésie de Lamartine.

C’est ainsi que les jeunes reprochent d’abord à Lamartine de n’être pas pour eux assez artiste, ils ont toujours sur le cœur une lettre célèbre: à M. Léon Bruys d’Ouilly, qui servit jadis, qui sert encore de préface, on se le rappellera peut-être, aux Recueillemens poétiques : « Le bon public, y disait Lamartine, s’imagine que j’ai passé trente ans à aligner des rimes,.. je n’y ai pas employé trente mois; » et les jeunes lui reprochent, avec un tranquille dédain, qu’on s’en aperçoit bien, sans qu’il eût besoin de le dire. Ils le trouvent incorrect, et ses vers quelquefois mal faits, mais ses rimes surtout faibles et communes : bonheur et malheur, adieu et dieu, onde et monde, piés et multipliés, ciel même, je crois, et soleil. Et ils n’ont pas tout à fait tort, et il n’y a rien de plus français, si je puis ainsi dire, que ce genre de chicanes, et, pour vous en convaincre, ce sont celles que nous faisons tous les jours à Molière. Décadens ou romantiques, parnassiens ou classiques, nous descendons tous en effet de Malherbe, par Condillac ou par Noël et Chapsal ; nous évaluons le talent au nombre des défauts qu’il n’a pas, bien plus qu’à la nature des qualités qu’il possède ; et nous posons de tels principes enfin que, si nous les suivions, ils n’iraient à rien moins qu’à mettre l’auteur des Odes funambulesques au-dessus d’Hugo même, et M. Catulle Mendès ou M. Armand Silvestre au-dessus du poète de Jocelyn, des Harmonies et des Méditations. Mais si l’on se débarrassait une fois des préjugés d’école, si surtout on voulait être juste, on attacherait moins d’importance à la forme, dont la perfection matérielle n’a d’objet, assez souvent, que de faire illusion sur la valeur du fond. On ajouterait que, fussent-elles plus nombreuses et plus graves encore qu’on ne ledit, les négligences de Lamartine, emportées au courant de sa large et facile abondance, ne laisseraient pas toujours, — ou presque toujours, — de s’y perdre. Et l’on conclurait à bon droit que si la poésie, avant d’être une « peinture, » peut et doit même être une « musique, » c’est quelque chose, à ce seul point de vue de la forme, que d’avoir trouvé, comme Lamartine, les vers assurément les plus harmonieux qu’il y ait dans la langue.

Aussi bien n’est-ce pas seulement ni surtout ces négligences que l’on reproche à Lamartine, et quand on ne le trouve pas assez artiste, c’est plutôt qu’il est trop naturel. Non-seulement on ne voit pas comment son vers est fait, de quels artifices ni par quels procédés, mais on le comprend trop aisément quand il parle, et ses sentimens ne sont pas assez rares, assez subtils, assez quintessenciés. Vainement a-t-il écrit cette Chute d’un ange, poème bizarre, grandiose, dont l’auteur de la Légende des siècles, et depuis, celui des Poèmes barbares, sans en rien dire, se sont tant inspirés. Il reste vrai, d’une manière générale, que dans les Méditations, dans les Harmonies, dans Jocelyn, dans les Recueillemens même, il n’a fait que prêter sa voix et son génie de poète à ce que nous avons tous éprouvé comme lui sans savoir ni pouvoir le dire, et on le trouve banal parce qu’il est humain. Et, en effet, ce n’est pas le genre de Charles Baudelaire, ni même celui d’Alfred de Vigny, qui se sont attachés presque uniquement à traduire ce qu’ils croyaient trouver en eux de plus différent de leurs semblables. Nos jeunes poètes, à leur suite, ont cru devoir affecter la même ambition. Si le ciel, en naissant, ne les a pas affligés d’une maladie morale, ils s’en procurent une, la plus rare qu’ils puissent, et la poésie désormais ne consiste plus pour eux que dans l’analyse de leur cas pathologique ou le savant étalage de leur infirmité. Mais alors, qu’ils aient donc jusqu’au bout le courage de leur paradoxe, et qu’ils ne reprochent pas à Lamartine de n’être pas assez artiste, mais bien, comme nous disions, d’être trop naturel et trop sain. Car voilà son vrai crime : pour comprendre, pour sentir les Méditations ou les Harmonies, il n’est besoin que d’être homme et d’avoir vécu. Le Lac ou le Vallon, le Crucifix ou Ischia, le Premier Regret ou Novissima Verba, c’est le cri même de la nature, auquel vibrent tous les cœurs, à l’exception, puisqu’ils le croient, de celui des seuls initiés. Et c’est comme si l’on disait qu’ils reprochent à Lamartine ce qui fait justement de lui, non pas peut-être le plus varié, ni surtout le plus étrange, mais le plus sincère et le plus universellement vrai des grands poètes de ce siècle. Car il y a de la rhétorique dans la Tristesse d’Olympio ; il y a de la «littérature » jusque dans le Souvenir de Musset, — deux vers de Dante, quatre lignes de Diderot, une invocation à Shakspeare; — mais il n’y a pas trace de littérature dans le Lac, pas ombre seulement de rhétorique, et c’est ce qui en fait la suprême beauté.

On l’a dit bien souvent : nul, comme Lamartine, en ce siècle et dans notre langue, n’a aimé, n’a senti, n’a rendu la nature avec cette profondeur et cette sincérité. Certes, les descriptions ne manquent pas dans les Orientales, dans la Légende des siècles, dans les Contemplations, et généralement dans l’œuvre de Victor Hugo. Mais l’énumérateur, mais le rhéteur, mais l’artisan de phrases et de mots, mais le prodigieux assembleur de rimes y reparaissent toujours, et, en la fatiguant, découragent notre admiration, la changent en étonnement plutôt qu’en reconnaissance. Les vers d’Hugo sont beaux, ils sont pleins; les sonorités nous en assourdissent et l’éclat nous en aveugle; il nous en reste presque toujours dans les yeux et dans les oreilles un souvenir inoubliable; mais on y voudrait quelque chose d’autre, un peu d’âme et d’accent, je ne sais quoi de moins beau peut-être, mais de plus sincère et de plus ému. Lisez-le, relisez-le; rien n’est plus rare, dans l’œuvre de ce grand poète ou plutôt de cet incomparable artiste, que des inspirations comme celle de cette Tristesse d’Olympio que je rappelais tout à l’heure, ou comme celle de la Prière pour tous. Jusque dans les belles pièces des Contemplations qu’il a consacrées à la mémoire de sa fille, on sent l’arrangement et l’apprêt :


Maintenant que je puis, assis au bord des ondes,
Ému par ce tranquille et profond horizon.
Examiner en moi les vérités profondes,
Et regarder les fleurs qui sont dans le gazon !


Et, s’il faut être franc, comme il n’y a rien de plus artificiel, de plus composite et de plus arbitraire que certaines descriptions des Orientales, — et notamment celles de tant de contrées que le peintre n’avait jamais vues, — même quand Hugo décrit ce qu’il devrait avoir senti, je ne connais rien de plus poncif dans les œuvres d’Écouchard Le Brun ou de Jean-Baptiste Rousseau que certaines pièces des Feuilles d’automne ou des Contemplations. Ouvrez maintenant les Harmonies ou les Méditations, qui conservent, pour le dire en passant, sur les Contemplations et sur les Feuilles d’automne l’avantage, étant les premières, de les avoir vraisemblablement inspirées, ou relisez encore, de préférence, le plus beau poème, le seul « poème, » à vrai dire, que nous ayons dans notre langue : c’est de Jocelyn que je veux parler. Les vers en sont-ils peut-être quelquefois moins beaux? ou les rimes moins riches et moins retentissantes? ou les descriptions plus vagues? Je n’oserais le dire. Mais comme l’accent en est toujours juste ! Comme le poète s’y émeut lui-même au souvenir de tout ce que ses vers éveillent ou renouvellent en lui ! Comme on sent qu’il n’a pas vu seulement, mais vraiment vécu ses impressions, et, je ne veux pas dire qu’il improvise, mais qu’il laisse égarer son chant au hasard de ses rêveries !


O vallons paternels! doux champs! humble chaumière
Aux bords penchans des bois suspendue aux coteaux,
Dont l’humble toit, caché sous des touffes de lierre,
Ressemble au nid sous les rameaux!

Gazons entrecoupés de ruisseaux et d’ombrages ;
Seuil antique où mon père, adoré comme un roi,
Comptait ses gras troupeaux rentrant des pâturages,
Ouvrez-vous ! ouvrez-vous ! c’est moi.
…………………



Je ne sais si quelqu’un en a déjà fait la remarque, mais des circonstances particulières me semblent expliquer ce caractère de la poésie de Lamartine. Si Musset, comme le croyait son frère, eût été « nécessairement de la cour» dans le siècle de Louis XIV, il n’était pas moins né dans un vulgaire appartement parisien de la triste rue des Noyers; et ses souvenirs d’enfance lui rappelaient si peu de chose qu’on n’en trouve seulement pas trace dans ses Poésies. Victor Hugo, fils d’un soldat.


Jeté comme la graine au gré de l’air qui vole,


traîné de ville en ville dans les bagages de son père, a pu chanter indifféremment ses « Espagnes, » ou plus tard la maison de la rue des Feuillantines : il n’a pas eu, lui non plus, de patrie locale, et à peine un foyer domestique. Seul, au contraire, de tous nos grands poètes, mille liens subtils et forts, ces liens que tissent les premières habitudes et que rien ne réussit à rompre, ont rattaché Lamartine à une terre natale, à une maison paternelle, à des lieux familiers :


Montagnes que voilait le brouillard de l’automne,
Vallons que tapissait le givre du matin,
Saules dont l’émondeur effeuillait la couronne,
Vieilles tours que le soir dorait dans le lointain,

Murs noircis par les ans, coteaux, sentiers rapides,
Fontaine où les pasteurs, accroupis tour à tour,
Attendaient goutte à goutte une eau rare et limpide,
Et, leur urne à la main, s’entretenaient du jour,

Chaumière où du foyer étincelait la flamme,
Toit que le pèlerin aimait à voir fumer,
Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer?


Oui, sans doute, ils en ont une; et c’est à un grand poète une grande infériorité que de ne l’avoir pas connue; et c’est celle d’Hugo en comparaison de Lamartine. Tandis qu’Hugo n’a vu la nature qu’avec les yeux du corps, en touriste ou en passant, que l’on peut même douter s’il l’a comprise ou aimée autrement qu’en artiste, qu’il l’a presque profanée dans ses Chansons des rues et des bois, Lamartine l’a vue avec les yeux de l’âme, l’a aimée jusqu’à s’y confondre, quelquefois même jusqu’à s’y perdre, et l’a aimée tout entière, — « sol sans ombre » et « cieux sans couleurs » et « vallons sans ondes, » — sous ses plus humbles aspects comme sous les plus brillans ou les plus majestueux. Il est donc chez nous le poète de la nature, le seul peut-être que nous ayons, en tous cas le plus grand, et il l’est pour n’avoir pas appris à décrire la nature, mais pour avoir commencé par la sentir. C’est la sincérité de ses impressions qui en fait non-seulement la profondeur ou l’intimité, mais encore, dans notre poésie, la presque unique originalité. Et la sincérité de ses impressions, à son tour, il la doit pour une large part à son éducation ; cette éducation que l’on reçoit involontairement des choses, et qui fait, en chacun de nous, le fond durable et persistant de tout ce que nous sommes.


J’aimais les voix du soir dans les airs répandues,
Le bruit lointain des chars gémissant sous leurs poids,
Et le sourd tintement des cloches suspendues
Au cou des chevreaux, dans les bois.
………………….


C’est grâce encore à cette éducation qu’il a pu mettre jusque dans la poésie la plus familière un accent également unique de noblesse et d’intimité. Rien n’est plus rare en français que d’être éloquent sans s’égarer dans la déclamation, si ce n’est d’être familier sans tomber dans la platitude; et je ne vois guère que Lamartine qui y ait réussi. A cet égard, et puisqu’il n’y a pas de mot aujourd’hui qui loue davantage, nos jeunes devraient bien savoir que Jocelyn est ce qu’ils appelleraient un véritable tour de force. En restant poète, et grand poète, avec les mots de la langue ordinaire, — quoique non pas toujours sans quelques périphrases ou quelques métaphores dont son éducation même et sa facilité ne le défendent pas assez, — il n’est guère de détails de la vie simple, humble ou même commune, que n’ait su exprimer Lamartine. Son art consiste, non pas précisément comme celui des Lakists anglais, — auxquels on l’a si souvent comparé, sans doute à titre d’auteur du Lac, — à extraire, si l’on peut ainsi dire, des objets les plus vulgaires ce qu’ils renferment effectivement de poésie latente, mais plutôt à répandre sur ces objets eux-mêmes, quand il les rencontre sans les avoir cherchés, toute la richesse et toute la noblesse de son imagination de poète. C’est une grande différence. Il n’abaisse point la poésie jusqu’aux vulgarités de la prose, comme quelques-uns que l’on connaît, mais il élève la prose jusqu’à la hauteur de la poésie; et les rencontres n’ont pas lieu tout à fait au même point. Rappelez-vous seulement les lettres de Jocelyn à sa sœur, ou, dans Jocelyn encore, le récit de la mort de sa mère :


Pressentimens secrets, malheur senti d’avance,
Ombre des mauvais jours qui souvent les devance ;


et tant d’autres passages que je me garderai de citer, — de peur que le lecteur s’en contente et perde une occasion de relire de poème. Je l’ai bien relu quatre fois avant d’en parler, et j’ose dire que si des yeux prévenus y découvraient, en cherchant bien, plus de prosaïsmes peut-être que je n’y en ai trouvé, du moins ne sauraient-ils y méconnaître la distinction d’âme, l’élévation naturelle, et la noblesse enfin du poète.

Cette noblesse éclate surtout dans sa conception de l’amour. Nous croyons rêver aujourd’hui quand nous apprenons par sa Correspondance que la critique de 1823 accusa l’auteur des Nouvelles Méditations d’être à lui tout seul plus « obscène » que Catulle, Horace et l’Arioste ensemble. S’agissait-il peut-être de ce Chant d’amour qui, comme il n’avait pas de modèle, n’a pas eu d’égal non plus dans notre langue?


Ton cou, penché sur l’épaule,
Tombe sous son doux fardeau,
Comme les branches du saule,
Sous le poids d’un passereau ;
Ton sein que l’œil voit à peine,
Soulevant à chaque haleine
Le poids léger de ton cœur,
Est comme deux tourterelles,
Qui font palpiter leurs ailes
Dans la main de l’oiseleur.


Il faudrait dire alors qu’en 1823 la critique avait peu lu l’Arioste, et encore moins Catulle. Car, si les vers d’amour de Lamartine respirent la volupté, c’est une volupté diffuse en quelque sorte, une volupté qui n’émeut qu’à peine les sens, bien loin de les irriter; et, s’ils persuadent le plaisir, je ne crois pas que jamais on en ait plus discrètement présenté l’image, ni plus chastement voilé la nudité. Les erreurs de goût, et j’en sais de bien fâcheuses, ne manquent malheureusement ni dans les Recueillemens ni surtout dans la Chute d’un ange, mais ce ne sont vraiment et uniquement que des erreurs de goût. D’une manière générale, dans ses peintures de l’amour, Lamartine a toujours mêlé au délire des sens non-seulement ce qui l’épure, mais encore le spiritualise. N’ayant jamais, comme tant d’autres, mené sa muse aux mauvais lieux, elle a toujours ignoré le langage de ces sortes d’endroits. Et si l’on dit que c’est pour cela qu’elle a bien pu connaître et parcourir toute l’étendue des passions de l’amour, mais non pas en mesurer toute la profondeur, ni surtout en sonder les derniers abîmes, je n’en disconviendrai point; — et je l’en louerai davantage.

Comparez ici Lamartine avec Musset, le Musset des Nuits, mais aussi le Musset des Premières Poésies. Musset, le plus jeune des deux, et même des trois, est cependant de beaucoup à tous égards le plus voisin du XVIIIe siècle : il y a en lui du Crébillon fils, du Laclos, du Casanova, si l’on veut. Aimez-vous ces vers de Namouna, si souvent et tant vantés :


Deux sortes de roués existent sur la terre...


et n’en jugiez-vous pas autrement à vingt ans qu’à cinquante? Pour ma part, j’en préfère d’autres. Mais, en tous cas, semblable à son don Juan, Musset, jusqu’au jour d’une rencontre célèbre, me paraît bien avoir été le plus impertinent des amans en même temps que le plus sensuel. Lorsque d’ailleurs il eut éprouvé l’amour avec toutes ses fureurs, le poète des Nuits, s’il perdit quelque chose de sa fatuité juvénile, ne réussit cependant jamais à dépouiller sa passion de ce qu’elle avait encore de fougueux et de personnel. Les Nuits sont le cri d’un amant à qui l’on vient d’enlever sa maîtresse, le plus éloquent, le plus retentissant que peut-être on eût encore poussé, mais un cri, c’est-à-dire l’expression de ce qu’il y a dans l’amour de plus instinctif, de plus égoïste, et de moins généreux.


Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,


a-t-il dit lui-même, et précisément dans une de ses Nuits. Il se trompe ; ce ne sont que les plus émouvans; et ce n’est pas peu de chose, mais au-dessus de ces émotions où les sens ont encore trop de part, il y en a de plus pures, et c’est l’honneur de Lamartine que d’y avoir plusieurs fois atteint.

C’est que l’amour n’a pas été pour Lamartine comme il le fut pour Musset, l’occupation de sa vie tout entière, et cela seul a suffi pour qu’il y ait dans sa poésie plus de dignité, plus de pureté, plus de noblesse que dans celle de Musset. Car, on aura beau dire, on ne fera pas, avec les plus beaux vers du monde, qu’il n’y ait dans tout don Juan ou dans tout Lovelace un fond de grossièreté ou de férocité même. Chez Musset, il faut bien le savoir, l’amour se termine toujours à la satisfaction de l’orgueil ou de la volupté. Mais Lamartine y met quelque chose de plus.


Elle paraît et tout soupire,
Tout se trouble sous son regard;
Sa beauté répand un délire
Qui donne une ivresse au vieillard.
Et, comme on voit l’humble poussière
Tourbillonner à la lumière
Qui la fascine à son insu,
Partout où ce beau front rayonne,
Un souffle d’amour environne
Celle par qui l’homme est conçu.


Quand ce dernier vers ne donnerait pas à ceux qui le précèdent un accent presque religieux, il suffirait sans doute, pour entendre le poète, que l’Humanité, dont j’ai détaché cette strophe, fût placée, comme elle l’est dans les Harmonies, entre Jéhovah et l’idée de Dieu. De même qu’au début du poème de Lucrèce,


Æneadum genitrix, hominum divumque voluptas,
Alma Venus,...............


nous sortons ici de l’ordre vulgaire, où l’amour n’était que «l’échange de deux fantaisies; » nous sommes introduits dans un ordre supérieur; nous atteignons à la cause et à la raison de l’amour. On comprendra que ce n’est pas le lieu, pour divers motifs, d’insister sur ce thème, toujours difficile et surtout délicat à traiter. Mais il paraîtra naturel d’en prendre occasion pour dire quelques mots du caractère philosophique de la poésie de Lamartine.

En même temps, en effet, que celle de l’amour, une autre préoccupation, celle de la mort, a hanté Lamartine; et, de tous nos grands poètes, nul plus que lui n’a médité sur la chute insensible du temps, sur la fragilité de la vie, sur la misère de l’homme, ni trouvé de plus beaux accens pour chanter :


…………. et ce vide immense,
Et cet inexorable ennui,
Et ce néant de l’existence,
Cercle étroit qui tourne sur lui.


Ce ne doit pas être là l’une des moindres raisons qui l’ont dépossédé lentement de sa première popularité. Les Français, en général, sont de l’école de leur Béranger. L’idée de la mort les importune, ou plutôt, car ils y songent trop rarement pour que l’on puisse dire qu’elle les importune, ils n’aiment pas qu’on la leur présente. Et si la vie est courte, puisque les pessimistes eux-mêmes ne laissent pas de convenir qu’il s’y rencontre de « bons momens, » sa brièveté ne leur est qu’un motif plus cher et plus pressant d’en user et d’en jouir. Vivons, buvons, aimons, et moquons-nous du reste :


Tant qu’on le pourra, Iarirette,
On se damnera, larira,


c’est la devise ou le refrain de nos chansonniers, et c’est bien le fond de la race. Mais, quand l’idée de la mort, pour tout homme qui pense, ne serait pas l’objet de ses plus graves méditations, et quand elle ne serait pas, dans la vérité de l’histoire, l’inspiratrice de toutes les grandes actions, il faudrait faire encore observer, au seul point de vue de l’art, tout ce qu’elle communique à la poésie, non pas même en l’absorbant, mais en s’y mêlant seulement, de profondeur et de sens. Elle met une ombre au plaisir, elle donne du prix à la vie ; l’amour, la volupté même ne sont sans elle que la satisfaction brutale d’un instinct ou d’un appétit; la nature n’est plus qu’un décor de théâtre, une toile de fond, immobile et muette; et c’est pourquoi nous voyons que, dans tous les temps comme dans toutes les langues, sans cette pensée de la mort, invisible et présente, il n’y a pas, ni ne peut y avoir de grande poésie, mais seulement de la prose rimée. Ce Béranger que je nommais n’en serait-il pas lui-même un exemple, au besoin? lui qui n’a peut-être été vraiment poète en sa vie qu’un seul jour et dans la seule chanson :


Lorsque les yeux chercheront sous vos rides.
Les traits charmans qui m’auront inspiré...


Mais la poésie de Lamartine est imprégnée tout entière de la pensée de la mort. Il en a senti l’épouvante, il en a éprouvé la vertu consolatrice, il en a goûté tout le charme.


Cueillez-moi ce pavot sauvage
Qui croît à l’ombre de ces blés ;
On dit qu’il en coule un breuvage
Qui ferme les yeux accablés.
J’ai trop veillé, mon âme est lasse
De ces rêves qu’un rêve chasse.
Que me veux-tu, printemps vermeil?
Loin de moi ces lis et ces roses !
Que faut-il aux paupières closes?
La fleur qui garde le sommeil.

Enfin et surtout il en a connu la nécessité supérieure, et que, si nous ne mourions pas, peut-être réussirions-nous tout de même à nous accommoder de la vie, quoique cela paraisse bien difficile; mais sans doute nous n’aurions aucune des idées qui font la grandeur de l’esprit humain.

Car on ne saurait méditer sur la mort sans méditer également sur le problème de la destinée, et Lamartine, en raison de son éducation comme de sa nature pouvait moins que tout autre se soustraire à cette nécessité. Il est d’ailleurs, pour en faire en passant la remarque, une preuve assez illustre que le pessimisme, quoi que l’on en ait dit, n’est nullement obligé de conclure au néant. Si la poésie de Lamartine doit à la pensée constante ou habituelle de la mort son accent de mélancolie et de solennité, c’est à la méditation du problème de la destinée qu’elle doit son caractère tragique et philosophique à la fois. Byron ou Shelley lui sont-ils peut-être supérieurs à cet égard parmi les poètes contemporains ? Je ne le sais ni ne veux le rechercher aujourd’hui ; mais ce que l’on doit dire, — et ce que l’on n’a pas assez dit, — c’est que, s’il y a dans notre langue une poésie philosophique vraiment digne de ce nom, c’est assurément celle de Lamartine. Voltaire, avant lui, dans ses Discours en vers, avait essayé de rimer la philosophie de Locke et de Newton, et d’autres, depuis lui, la critique de Kant, ou l’Origine des espèces, ou le pessimisme de Schopenhauer. Vaines tentatives, inutiles efforts, ambitions généreuses, mais avortées en naissant; quand la clarté de la pensée ne s’évanouissait pas dans la splendeur des images, c’était le vers qui se changeait en prose; et Lamartine, après avoir été le premier, demeure encore et toujours le seul.


Pourtant chaque atome est un être,
Chaque globule d’air est un monde habité;
Chaque monde y régit d’autres mondes, peut-être,
Pour qui l’éclair qui passe est une éternité !
Dans leur lueur de temps, dans leur goutte d’espace,
Ils ont leurs jours, leurs nuits, leur destin et leur place,
La vie et la pensée y circulent à flot,
Et pendant que notre œil se perd dans ces extases.
Des milliers d’univers ont accompli leurs phases
Entre la pensée et le mot.


Lui seul a trouvé de ces vers, comme lui seul était capable de concevoir aussi cette Chute d’un ange, qu’il n’a négligé que d’écrire, et qui serait autant au-dessus des Harmonies et de Jocelyn que la grande épopée philosophique est au-dessus de l’idylle ou de l’ode, — si seulement l’exécution en répondait à la conception. Que d’ailleurs, dans cette Chute d’un ange, et surtout dans les Recueillemens, Lamartine, pour vouloir monter encore plus haut, n’ait réussi qu’à développer quelques-uns de ses défauts, je le sais, et, pour tout dire, il n’est que juste de le rappeler. Ni les grandes idées, comme je viens de le montrer, ni les belles pages, ni les beaux vers n’y manquent, mais il semble que le poète, plus abondant que jamais en périodes sonores, n’ait plus en lui de quoi suffire à leur ampleur, ou encore, et plutôt, que son inspiration, débordant sa langue et son vers, s’évapore en nuages dont les contours changeans ne retiennent plus aucune forme. Il a beau prodiguer les images, on sent qu’il les « invente, » mais qu’il ne les « voit » plus, qu’il les cherche plutôt qu’il ne les trouve; et il a beau enfler la voix pour faire croire à l’importance de ce qu’il va dire, nous l’entendons bien, mais nous ne jugeons pas qu’il valût la peine de tant l’enfler. J’ajoute seulement qu’il n’importe guère, et, quand on a lu la Chute d’un ange ou les Recueillemens, si l’on ne s’y est pas plu, que l’on en est quitte pour ne plus les relire. Mais ce que l’on doit observer, jusque dans les erreurs littéraires de Lamartine, — et on en pourrait dire autant, je crois, de ses erreurs politiques, — c’est que la noblesse des intentions y persiste, si même il ne se trompe justement pour viser trop haut. Lamartine, avec ses imperfections, n’en demeure pas moins ce que l’on appelle une âme essentiellement noble, et quand on veut essayer de le caractériser d’un mot, — ce qui n’est jamais facile d’un tel homme, — si ce n’est pas celui de dignité, c’est celui de noblesse au moins qui vient sous la plume.

De toutes les raisons qui, sans avoir encore tout à fait précipité dans l’oubli le nom de Lamartine, l’ont du moins, depuis une vingtaine d’années ou davantage, comme enveloppé d’ombre et d’indifférence, si celle-ci peut-être était la principale, il ne faudrait pas beaucoup s’en étonner, mais, au contraire, le trouver naturel. Les artistes, en général, — car l’observation est sans doute aussi vraie des peintres que des poètes, — n’aiment pas beaucoup les sujets où la matière importe plus que l’art, où l’idée emporte la forme, où la nécessité de l’inspiration ne laisse pas de lieu au tour de force, les grands sujets enfin, et je veux dire par là ceux qu’on ne peut traiter qu’autant que l’on s’y trouve naturellement égal. Mais ils préfèrent les petits, comme étant, pour ainsi parler, à la taille de tout le monde, les sujets qui peuvent faire honneur à leur habileté, dont on ne relève l’insignifiance qu’à force de recherche et d’art. Et, après tout, c’est toujours quelque chose que de savoir à fond son métier, d’en connaître toutes les ressources, de le perfectionner, comme j’avoue que l’ont su faire quelques-uns de nos contemporains; c’est quelque chose et même beaucoup, — quand d’ailleurs on manque de génie. Nos artistes préparent, ils trempent, ils assouplissent, pour le grand poète que l’avenir ne nous refusera pas, l’instrument de la poésie, comme les Lebrun, les Delille, les Fontanes, les Chênedollé, les Lemercier l’ont fait pour Hugo et pour Lamartine, et leur gloire, lorsqu’il paraîtra, sera d’être éclipsés dans le rayonnement de ce grand poète. Ils ont tort seulement de s’ériger en critiques, et de vouloir juger Lamartine sur des règles trop étroites pour lui, — sans compter que Lamartine avait presque cessé d’écrire quand ils les ont posées.

Mais, pour la foule, c’est encore plus grave. Avec Laprade et quelques autres encore, je voudrais pouvoir dire que Lamartine a écrit pour un « monde » qui ne serait plus aujourd’hui le nôtre, si ce n’était nous mettre nous-mêmes trop bas, si ce n’était oublier que le « monde » de Lamartine fut aussi celui de Béranger, et si ce n’était mêler enfin, pour le plaisir de faire une médiocre épigramme, la satire sociale à la critique littéraire. En réalité, ce n’est pas pour les lecteurs de la troisième république, ni ce n’était pour ceux du second empire, c’est pour l’esprit français lui-même que la poésie de Lamartine a quelque chose de trop noble et de trop élevé. Lamartine, au surplus, ne l’a-t-il pas comme déclaré lui-même jusque dans ses antipathies? Il y a deux écrivains, deux très grands écrivains qu’il n’a jamais aimés, qu’il n’a jamais pu supporter, auxquels même il n’a pu seulement rendre justice, et ces deux écrivains, si ce ne sont pas les deux plus populaires, il ne s’en faut de guère, puisque ce sont La Fontaine et Rabelais. On a reproché plus d’une fois à l’auteur des Méditations, des Harmonies et de Jocelyn d’avoir si mal parlé de l’auteur des Fables ou des Contes, et de celui de Pantagruel, et on a eu raison ; on s’est moins souvent demandé s’il n’y avait pas autre chose là qu’une erreur de goût, et vraiment une antipathie, une opposition, une contradiction de nature? Il y a dans l’esprit français un fonds naturel, je ne veux pas dire de grossièreté, — je le pourrais, je ne le dis pas, — mais au moins de vulgarité, de médiocrité, comme on disait jadis, et dont n’a jamais pu complètement triompher un Voltaire même ou un Molière. Nous n’aimons pas quitter terre, nous n’aimons pas étendre nos regards au-delà d’un certain horizon, et beaucoup de questions que d’autres races aiment à agiter d’une façon tragique, nous n’aimons pas à les aborder, ni même qu’on les traité pour nous. « Être ou ne pas être, » c’est assurément le moindre souci du peuple de Rabelais, de La Fontaine et de Béranger; nous sommes comme nous sommes, et nous nous trouvons bien ; nous avons jadis défrayé l’Europe de fabliaux, nous défrayons aujourd’hui le monde de vaudevilles, d’opérettes et de chansons de cafés-concerts. Et lorsque par hasard nous nous haussons jusqu’à l’idéal, ce n’est guère qu’à l’idéal héroïque sans doute et chevaleresque, mais souvent aussi emphatique et déclamatoire, l’idéal du Cid et d’Hernani, de Corneille et d’Hugo, rarement et difficilement jusqu’à celui de Bérénice ou de Jocelyn, de Racine et de Lamartine. Voilà la vraie cause de notre indifférence pour la poésie de Lamartine; et la forme en fût-elle toujours plus achevée, l’exécution répondît-elle toujours à la conception, Lamartine, pour la foule, sera toujours moins populaire que Musset ou qu’Hugo.

Heureusement que la foule ne fait pas les jugemens de l’histoire, et que la popularité d’un écrivain ne mesure pas sa valeur. En ce moment, pour diverses raisons, dont quelques-unes au moins ne laissent pas d’être tout à fait étrangères à son génie, c’est Victor Hugo qui, de nos grands poètes, est celui dont le nom semble le plus populaire : je dis le nom plutôt que l’œuvre, qu’il m’a toujours semblé que l’on louait bien plus que l’on ne la lisait. Je me souviens aussi qu’il y a tantôt vingt ans, aux environs de l’année 1867, grâce à la conspiration de je ne sais quelles circonstances particulières, il s’en est fallu de bien peu que ce ne fût Alfred de Musset, pour ses Nuits elles seules, que l’on mît au-dessus de ses deux grands rivaux. Mais les circonstances changent, et les œuvres demeurent ; et c’est pourquoi j’ai la confiance que l’heure viendra, tôt ou tard, pour Lamartine, d’être mis à son rang; et je le répète, sans me dissimuler les défauts de Lamartine, ce rang, lorsque je me rappelle que les Méditations, en 1820, ont donné le signal de la rénovation de notre poésie; que les Odes et Ballades, qui parurent en 1822, semblent être plutôt antérieures et procéder encore de Le Brun, de Lefranc de Pompignan, de Jean-Baptiste Rousseau; ce rang, quand je considère que les Méditations, plus tard, ont été suivies de Jocelyn, qui n’est pas seulement le plus beau, mais l’unique poème de la langue française, aucun autre n’en ayant la simplicité, le charme et la grandeur, sans compter l’émotion ; ce rang, si je fais attention enfin que personne avant lui ni depuis n’a possédé, au même degré que Lamartine, quelques-unes des plus rares qualités du poète: l’abondance et l’ampleur, l’éclat et la facilité, la profondeur et l’aisance, le nombre et l’harmonie, le charme et la noblesse, combien d’autres encore ! ce rang, — il se pourrait que ce fût le premier.


F. BRUNETIÈRE.