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Satyres (1789)/Chanson d’un batelier de Saint Cloud, à l’encontre de la dame du lieu

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CHANSON
D’UN BATELIER DE SAINT CLOUD,
À L’ENCONTRE
DE LA DAME DU LIEU.

AIR : Je suis né natif de Ferrare.


Voyez don s’te fiere Autréchienne,
Qui croit not’ France moins qu’son Vienne,
S’tourner et derrière et devant,
La tête en l’air et le nez au vent : (bis.)
Sous son jupon, l’diable m’emporte,
Sans l’respect de ce qu’à le porte,
Et parquoi tout homme est vaincu,
J’l'y fich’rois mon pied par le cu. (bis.)


Dans l’trésor royal, ça vous puise,
Tant et tant que ça nous épuise ;
Pour tous ces dépenses de chien,
Toinon nous prend l’plus beau d’not bien. (bis.)
Gueux d’ministres, fripons à torde,
Si le bon guieu n’y met ordre,
Je n’aurons, j’en sus convaincu,
Pas de quoi nous couvrir le cu. (bis.)

Gom’ des sots, j’alons à l’avance :
Méfions-nous, morgué, d’l’aparence ;
J’y sommes tous les jours trompés.
Toinon nous a ben attrappés : (bis.)
Dauphine, ale’ étoit fort honnête ;
C’étoit à qui l’y feroit fête ;
Com’ un p’tit ange al’a vécu,
Et reine ale’ montre le cu. (bis.)

Quand on se jette dans le vice,
Tôt ou tard l’ciel en fait justice ;
Catin finit par sauter l’pas,
Si ce n’est là-haut, c’est ici bas : (bis.)
À son visage qui s’bourgeonne,
On voit q’Toinon par trop s’en donne ;
J’sachifierions un bon écu
Pour qu’al’ eût qu’euq’chose à son cu. (bis.)


Dans not’bachot, fumant la pipe,
J’ons fait s’te chanson qui m’dissipe ;
P’tet ben que l’vers march’ à cloche pié,
Jamais j’n’avons étuguié : (bis.)
N’ous échauffant d’un coup d’eau d’vie,
L’peu que j’composons c’est d’genie,
Et si vous sembl’ trop biscornu,
Tout l’premier j’m’en torche le cu. (bis.)

Par J. M. de Chenier.