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Tableau de Paris/691

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(tome IXp. 75-79).

CHAPITRE DCXCI.

Cérémonial.


Un prince du sang, à la cour, ôte le service à tous les grands officiers, tant pour la chemise que pour la serviette.

Quand le roi donne des audiences sur son trône, les princes du sang sont sur la plate-forme, suivant leur rang ; & quand le roi donne des audiences des balustres, ils sont à côté de sa majesté en dedans du balustre.

Ils ont l’honneur de manger avec le roi dans les banquets.

Quand le roi communie, ils tiennent la nappe, lorsqu’ils sont deux ; & quand il n’y en a qu’un, il la tient seul : aucun seigneur ne peut partager avec lui cet honneur.

Quand le roi touche, il lui donne la serviette.

Un aumônier du roi leur apporte tous les ans une semaine-sainte, & un aumônier de là reine une autre.

Les princesses ont chez la reine le même service que les princes chez le roi.

Les princes servent aussi la reine, à l’exception de la chemise.

On les traite d’altesse sérénissime en leur parlant & en leur écrivant ; les ducs comme les autres.

Ils passent devant les grands & les ducs, en les reconduisant.

Dans les actes, ils prennent la qualité de très-haut, très-puissant & très-excellent prince, pourvu que le roi ou M. le dauphin n’y stipulent point : dans ce cas, ils ne sont plus excellens : ils ne prennent que la qualité de très-haut & puissant prince.

Ils épousent par procuration une princesse étrangère, destinée à être reine ou dauphine.

Ils ont le cordon-bleu à l’âge de quinze ans.

Leurs fiançailles se font dans le cabinet du roi.

On les annonce chez la reine. Les honneurs particuliers qu’on rend aux princes du sang, sont : qu’au sermon le prédicateur leur adresse la parole ; qu’ils ont un tapis de pied & un prie-Dieu où personne ne se met avec eux ; qu’on leur porte la patène & l’évangile à baiser.

Au parlement, ils ont entrée & voix délibérative à l’âge de quinze ans.

Ils passent au travers du parquet.

Le premier-président, dans ce qu’on appelle les séances de conseil, en prenant les avis, leur fait une profonde inclination, le bonnet à la main, sans les nommer.

La préséance des princes du sang sur tous autres pairs, tant au parlement qu’à la cour, est annexée au droit du sang.

Que d’observations à faire sur le cérémonial ! la gravité du sujet m’a gagné malgré moi ; & je n’ai pu rassembler que quelques traits épars, laissant aux amateurs le soin de s’enfoncer dans ces curieux détails.

Ce protocole imité & répandu chez les gens de qualité, leur a servi de barrière pour éloigner une multitude d’importuns ; & un triste conseiller d’état, a autant de formules dans son sallon, qu’il en règne à la cour.

L’étiquette, dira un prince, est une chose puérile, & dont je ris tout le premier ; mais c’est le seul rempart qui me sépare des autres hommes. Ôtez-la, je ne suis plus qu’un gentilhomme. L’opinion fait tout ; les hommes vivent de formes, sont plongés dans les formes ; chaque état a les siennes ; mais la base de l’opinion repose sur les fondemens les plus légers, & il faut traiter avec les hommes comme avec des enfans que l’extérieur frappe.

C’est outrer le raisonnement, comme on a outré l’étiquette. Sans doute il faut connoître le lever & le coucher du soleil. Les rois ont leurs occupations ; ils ne peuvent être visibles à toutes les heures. Il est bon qu’on soit instruit de celles où il est permis de les approcher, & de la manière de parvenir au pied du trône. Mais devoit-on en abuser au point de charger d’étiquette toutes les minutes de l’année, quand on pouvoit n’asservir à ce ridicule esclavage qu’une certaine quantité de jours de l’année ?

Henri III est l’auteur du cérémonial tel à peu près qu’il s’exécute aujourd’hui. Il fit un réglement pour ceux qui devoient entrer dans sa chambre & dans son cabinet, & à quelles heures. Il prescrivit un ordre pour le service de sa bouche. Quant aux cuisiniers, marmitons, ils datent du siècle de Louis-le-Grand.