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Vers l’amour/Les pauvres Chiens

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Les pauvres Chiens




J’admire les pauvres bons chiens,
Privés de toutes les caresses,
Pour lesquels il n’est pas de biens,
Pas de repos, pas de tendresses.
Ils sont souvent crottés, bien laids,
Mais leur âme peut être belle.
Ils souffrent d’être si mal faits,
Enviant la riche dentelle

Des lits moelleux et parfumés,
À l’abri du froid, de la bise,
Eux qui s’endorment affamés :
On comprendra leur convoitise.
L’intelligent et vif barbet,
Avec ses drôles de grimaces,
Tâche de faire son effet
Devant les sottes populaces.
— Ayons pitié des animaux,
Nos frères accablés de maux. —
Il contemple d’un regard triste
Son maître farouche et cruel
Qui se prend pour un grand artiste,
Sans avoir nul talent réel.
Ce saltimbanque misérable,
Avec sa cravache à la main,
Se réjouit lorsqu’il accable
Ce martyr du pouvoir humain.
De l’aveugle, le chien docile,
Recueille, pour son maître âgé,
Des sous dans sa pauvre sébile
Et soutient le morne affligé.
Le chien est l’ami véritable
Du malheureux dans le chagrin ;

Sa patience est admirable :
Sous les coups, il reste câlin.
Il nous donne souvent l'exemple
De la douceur, de la bonté,
Il est touchant quand il contemple
Son maître avec anxiété.