Dictionnaire de théologie catholique/ASSOMPTION DE LA VIERGE MARIE

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.2 : APOLINAIRE - AZZONIp. 318-325).

ASSOMPTION DE LA SAINTE VIERGE
I. Préliminaires.
II. Histoire de la doctrine.
III. Ses preuves.
IV. Pourrait-elle être l’objet d’une définition dogmatique ?

I. Préliminaires.

Le mot assomption désigne d’ordinaire, dans le langage chrétien, deux faits distincts en réalité, mais logiquement inséparables, à savoir la résurrectionEn cours de la sainte Vierge, quelque temps âpresa i, t, etsa translation en corps et en’une au séjour des bienheureux. Quelquefois même <>n emploie cette expi ion pour désigner l’ensemble des phénomènes qui constituent, en quelque sorte, l’eschatologie mariai alors "n | compn nd aussi la pi rtiedu mtotal, c’est-à-dire la mort de la sainte Vierge, appel cause di son caractère transitoire., / sommeil, ou encore pautatio, i epos, 1 1 l du temps à I éternité. La fête de l’Assomption étail souvent désignée par ces différents nomdans l’antiquité chrétienne ; mais peu a peu, et de bonne heure, le mot nption I emporta sur b - autres, el fat réservé pour marquer I entrée au ciel, en corps et en âme, de la’de Dieu. Comme l’indique le sens passil du mot lastumi, astumptui. il signifie que la sainte Vierj levée au ciel par la toute-puissance divine, tandis que. ! Christ, au jouide l’ascension, j est monté par sa propre puissai

L’assomption proprement dite de Marie étant indépendante, en soi, de sa mort, puisque l’une aurait pu avoir lieu sans l’autre, nous n’avons pasà établir expressément ce dernier fait. Il nous suffira de dire qu’il est consigné, en général, dans les mêmes textes que l’assomption, comme on le verra plus bas. On ne saurait donc le révoquer en doute, malgré les hésitations ou même les négations de quelques rares théologiens. Saint Épip ! au IVe siècle, n osait se prononcer, ni pour, ni conti-. // ; /’/-., i.xxviii. /’. G., t. xi. il. col. 7Pi : mais cette i tation isolée ne tire pas à conséquence, et elle s’explique du reste par les préoccupations polémiques du saint docteur. Voir Baronius, Hist. eccl., an. 48, n. 11. M ii’ot XIV. Commentarius de D. S. Jes « Christi Matrisque ejus festis, part. II. n. xcviu sq.. De assumpt. Au xviie siècle, quelques auteurs, cités par le franciscain Macedo, De clavibus Pétri. Rome. 1600. t. i. 1. IV, De peccat. orig., sect. ni. affirmèrent nettement que la sainte Vierge n’était pas morte, sous prétexte qu’elle n’avait pas contracte le péché originel. Voir l’exposé et la réfutation de cette erreur dans Cotti, Veritas religionis christianse, Home. 1737, Lrv, c. w..De morte Deiparse, p. 328. Cette opinion, reprise et longuement développée au XIXe siècle par un théologien de Gênes, Dominique Amaldi, dans -on ouvrage Super transitu B. M. V. Deiparse expertis omni lobe culpse originalis dubia proposita, Gênes, b s 7’.<.. -t mani ment contraire a la tradition patristique, à I ment commun des théologiens et a la liturgie catholique. Voir les textes cités plus bas pour établir le fait de l’assomption. Les mêmes raisons providentielles qui demandaient la mort du Christ réclamaient aussi, proportion gardée, celle de sa Mère, bien qu’elle lût exempte du péché originel. Devanl ressembler à son divin Fils, il ne convenait pas qu’elle reçût le don de l’immortalité comme Adam et Eve. Mais, pas plus que celle de Jésus-Christ, la mort de Marie n’a. té le salaire du péché, car l’une et l’autre ont été préservées de la corruption.

Si la mort et l’assomption de la sainte Vierge méritent, comme nous le prouverons, la croance des fidèles, en ne saurait en dire autant des circonstances qui les ont accompagnées. Il est impossible de préciser le lieu et la date de la mort de la sainte Vierge et de son assomptûa au ciel. Ce serait a Kphese. d’après une opinion ; à Jérusalem, suivant une autre. La première s’appuie surtout sur la lettre synodale du concile d’Éphi dans laquelle les Pires désignent ainsi la ville qui les réunit : l.vja 6 OsoÀôyo ; ’Iwivvi, ;. /.as r, Œotoxo ; HapOtvo ; T) Mapi’ct, i où le théologien Jean et la sainte Vii Marie, mère de Dieu. I I.abbe. Concil., t. III, col. 573. Le concile, dit-on, n’a pu faire allusion qu’au lieu de leur sépulture. Mais cette explication est rejetée par la plupart decritiques, qui l’ont remarquer combien la pi est vague et obscure, probablement même incomplète. Il faut lui ajouter un verbe, pour obtenir un s nr.ii--onnahle. et il est plus naturel de suppléer un mol qui désigne une église dédire à Marie et a saint Jean. I u tout cas, ce n’est pas ce texte obscur et isolé qui peut créer non seulement une certitude, mais même une probabilité solide. Voir dans Le Camus, Les sept églises de l’Apocalypse, Paris, 1896, p. 131 sq., une discussion serrée qui conclut, d’après l’inspection du texte et des lieux, au rejet de la prétendue tradition éphésienne. — L’opinion actuellement la plus commune veut que la sainte Vierge soit morte et montée au ciel à Jérusalem. Elle s’appuie principalement sur des témoignages des VIe, VIIe, viiie siècles. Voir plus bas. Cf. Nirschl, Das Grab lier heiligenJungfrau Maria, Mayence, 1896. Pour être un peu tardifs, ces témoignages ne sont pas dépourvus de valeur. Ils en auraient encore davantage, s’ils émanaient d’écrivains dont le sens critique n’aurait eu aucune défaillance dans la question. Malheureusement, plusieurs d’entre eux ont puisé à des sources suspectes des détails visiblement légendaires sur la mort et l’assomption de Marie. Ce n’est d’ailleurs pas le lieu d’exposer ces légendes. On en trouvera un bon résumé dans Le llir, Éludes bibliques, Paris, 1869, t. il, p. 148-185, avec une étude sur leur origine, leur valeur et leur développement littéraire. Voiraussi Th. Zahn, Die Dormitio sanctse Virginis, dans la Neue kirchl. Zeitschrift, t. x, fasc. 5. Cf. Revue biblique, 1899, t. viii, p. 141-144, 593-600. Trois de ces textes ont été publiés par Tiscbendorf, Apocalypses apocryplise, Leipzig, 1866, p. 94-136. Voir Migne, Dictionnaire des apocryphes, Paris, 1858, t. il, col. 503542. D’autres apocryphes, relatifs au trépas et à l’assomption de Marie, ont été édités depuis. Sur leur groupement voir Bonnet, Bemerkungen i’tber die àllesten Schriflen von der Himmelfahrt Maria, dans la Zeitschrift fur wisscnschaftliche Théologie, 1880, p. 222247.

La date de l’assomption est encore moins certaine que le lieu où elle s’est accomplie. Baronius lui assigne l’année 18, mais il a soin de nous dire « qu’il n’attache à cette date aucune importance et qu’elle est à ses yeux purement hypothétique. Dans cette hypothèse, la sainte Vierge était âgée de soixante-neuf ans environ, lorsqu’elle monta au ciel. D’autres Pères pensent qu’elle avait de soixante-douze à soixante-quinze ans. Mais, nous le répétons, il est impossible d’appuyer un calcul quelconque sur un fondement certain » . Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, t. i, col. 1136.

Hâtons-nous d’ajouter que cette incertitude relative où nous sommes sur les circonstances de l’assomption, n’atteint en aucune manière le fait lui-même, malgré l’extrême pénurie des documents pour les premiers siècles et les quelques hésitations postérieures dont nous allons parler.

II. Histoire de la doctrine. C’est seulement dans la seconde moitié du VIe siècle qu’on trouve les premiers documents historiques attestant la croyance à l’assomption corporelle (le la sainte Vierge. Il y a bien, dans les siècles antérieurs, un certain nombre d’apocryphes qui la mentionnent, ou plutôt la racontent avec de longs détails. Mai- ; il est difficile de discerner les éléments historiques que ces écrits légendaires peuvent contenir ; et ce n’est pas sans raison que la tradition ecclésiastique, prise dans son ensemble, les a tenus à l’écart, et que l’un d’entre eui spécialement, le plus célèbre de ton-. Liber traruitus [assumplionis] sanctw. Mariw, P. G., t.v, col. 1233 sq., tut condamné par le décret dit de saint (élise. Voir Gela.se. Non seulement ces apocryphes ne sont pas le fondement sur lequel s’appuie la doctrine Catholique de l’Assomption, mais ils inspiraient en général une telle défiance, que certains auteurs ecclésiastiques, craignant de paraître l< ur emprunter la substance même authentique des faits qui > sont contenus, tombèrent dans un autre excès regrettable, en préférant se taire, , Il confesser leur ignorance sur la réalité même du mystère. Heureuse fut l’exception, et une exception tardive, (pu n’apparaît qu’à la fin du vin* se plus de cent ans après l’épanouissement du culte de l’assomption et de la croyance traditionnelle.

En effet, dès le VIIe siècle au moins, l’Eglise presque tout entière, en Orient et en Occident, célébrait la fêle de l’Assomption. A Rome, le pape Sergius (687-707) ordonnait une procession solennelle le jour de la fête : Constituit ut diebus Adnuntiationis Domini, Dormi noms et Nativitatis sanct.r. Dei genetricis semperque Virginis Mariæ. .. letania exeat a sancto Hadriano et ad sanctam Mariant popidus occurat. Liber pontificalis, P. L., t. cxxviii, col. 898 ; édit. Duchesne, t. i, p. 376. Et remarquons que cette fête n’est pas présentée dans le Liber comme d’institution récente, ce qui permet de croire qu’elle existait depuis quelque temps, peut-être même dès le pontificat de saint Grégoire le Grand. En Gaule, nous savons qu’on célébrait une fête solennelle, précédée d’une vigile, en l’honneur de la Vierge, vers le milieu du mois de janvier ; et Grégoire de Tours, qui nous fournit ce renseignement, dit assez clairement qu’il s’agissait de l’Assomption : Maria vero gloriosa genilrix Christi…angelicis choris canentibus, in paradisum, Domino prœcedente, translata est… Ifajvs festivitas sacra mediante mense undecimo celebratur… Adveniente auteni hac festivitate, ego ad celebrandas vigilias accessi. De gloria martyr., Mirac., . I, c. ix, P. L., t.LXXi, col. 713. L’ensemble du passage ne peut convenir qu’à l’assomption corporelle de la sainte Vierge. En Orient, l’historien Nicéphore Calliste nous apprend que l’empereur Maurice (582-602), contemporain et ami de saint Grégoire le Grand, ordonna de célébrer solennellement cette fête le 15 août, H. E., 1. XVII, c. xxviii, P. G., t. cxlvii, col. 292 ; « ce qui n’empêche pas, dit avec raison Tillemont, qu’on en fit dès auparavant quelque solennité. » Mémoires, etc., Paris, 1693, t. i, Notes sur la sainte Vierge, n. 18, p. 476. Cf. Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2e édit., Paris, 1877, p. 318. On a signalé récemment l’existence à Antioche d’une fête de la sainte Vierge qu’on célébrait, paraît-il, dès la lin du IVe siècle, plus de cinquante ans avant le concile d’Ephèse. Voir Ant. Baumslark, dans la Rômische Quartalschrifl, 1897, p. 55-56. Cette fête était intitulée Mvi, |j.Y| tïjç àyi’a ; Œoxdxou y.a’i à£ntap0£vou Mapia ;, « mémoire de la sainte et toujours vierge Marie, Mère de Dieu. » Tout porte à croire que cette fête rappelait le souvenir de la mort de Marie. S’il était démontré qu’elle avait également pour objet l’assomption corporelle, nous aurions là une attestation précieuse, et d’une très haute antiquité, en faveur de cette doctrine. Malheureusement, il paraît difficile de faire celle démonstration. Autre chose, en effet, est l’existence d’un simple anniversaire, analogue, en soi, à celui des martyrs et des saints en général, et autre chose, l’existence d’une fête comme la Dormilio, dont le sens traditionnel, parfaitement établi, implique la croyance à l’assomption proprement dite.

L’influence de la littérature apocryphe se fit sentir, par voie de réaction, en Occident, vers la fin du vin 8 siècle, ou au commencement du ix". On vit circuler, sous le nom de saint Jérôme, un écrit intitulé Epistolaad Paulam et Eustochium, dont l’auteur met le public en garde contre les assertions de l’ouvrage apocryphe Dr transitu Virginis : niforte si venerit in m anus rentras illud apocryphum, dubia pro certis recipiatis. Et il ajoute : Il ; rr iddrco dùcerim, quia multi nostrorum dubitant utrum assumpta fuerit simul cum corpore, an abierit relicto corpore. Quomodo autrui, vel quo tempo re, mu a quibus personis sanctissimum corpus ejus indeablatum fuerii ici ubi transpositum, utrumne resurrexerit, ui’sitiin-. /’./.., t. xxx, col. 122, 123. La lettre du pseuilo-.lei oiue, désignée aussi sous le nom, 1e Lettre du pseudo-Sophrone, parce que le i" le dictin Martianav l’attribua-n ne Sophrone, ami de saint Jérôme, Upera sancti llicronymi, édit. Marlianay, t. v, p. 33, exerça one influi Uable rar quelques auteun ecclésiastiques postérieurs, entre mires Adon et i snard dam leurs martyroloi comment s’exprime le premier d’entre ux ven 858 Cujus [Virginl lioneni m kal. sept, on célébrai I ijut et sacrum corput non invenitur sn/ii r terram… Vbi autem venerabile Spiritut Sat templum illud, id est caro ipritu beatieeimee Virg Mariée, divino nutu et eonsilio occullatum fit, mugis elegit sobrietas Eccleeies cum pietate neecire quant aliquid frivolum et apocryphum unie tenendo doi /’. /.., t. cxxiii, col. - ! -. Usuard, quelques années après, tenait le même langage. P. /-., t. cxxiv, col. 365. Voir aussi le pseudo-Augustin, P. /-., t. xxix, col. 2129 ; le pseudo-Ildefonse, P. /.., t. xcvi, col. 260 ; les Capitulaires de Charlemagne, /’. /.., t. xcvii, col. 326 ; et quelques autres. Mais ce n’étail là, en Bomme, qui dissonances accidentelles dans le conn-rt général d’affirmations qui traduisaient la croyance du reste de l’Église à l’assomption corporelle de la sainte Vierge. La fête du 15 août était rangée parmi les plus solennelles, comme le prouvent le concile de Salzbourg en 799, llefele, Histoire des conciles, trad. Delarc, t. v, p. 157 ; la règle de saint Chrodegang, évéque de Metz, P. L., t. lxxxix, col. 1089 ; le concile de Mayence en 813, Labbe, t. VII, col. 1250 ; les ordonnances de Hérard, arclievêque de Tours, P. L., t. cx.xi, col. 768. Le pape Léon IV en instituait l’octave vers 847 ; et quelques années après (858), Nicolas I, r, dans sa réponse à une consultation des Bulgares, affirmait que le jeune de la vigile de l’Assomption se pratiquait à Rome depuis une époque très reculée : antiquilus tend Ecclesia, Labbe, t. viii, col. 518.

De leur coté, les auteurs ecclésiastiques du moyen âge — à part les exceptions dont nous avons parlé-, et qui se produisirent surtout dans l’église de Gaule du IXe au XIe siècle — spécialement tous les docteurs scolastiques enseignèrent dans leurs ouvrages que la sainte Vierge était montée au ciel en corps et en âme. Les universités les plus célèbres, comme celle de Paris, se faisaient gloire de professer cette doctrine ; et il faut descendre jusqu’au XVIIe siècle pour trouver de nouvelles objections contre la croyance traditionnelle. Voici à quelle occasion.

L’église cathédrale de Paris avait lu pendant longtemps, pour la fête du 15 août, le passage du martyrologe d’Usuard, qui affecte d’ignorer la doctrine de l’assomption. Pourtant, vers 1510, on avait cru devoir substituer à ce passage la lecture d’une homélie beaucoup plus affirmative sur le mystère du jour, l’n siècle environ plus tard, en 1668, l’exemplaire du vieux martyrologe en usage étant détérioré, il fallut le remplacer par un neui ; et à cette occasion, on se demanda s’il fallait conserver le passage d’Usuard relatif à l’assomption. L’n chanoine, nommé Claude.loly, soutint vivement l’affirmative et eut gain de cause, grâce à sa dissertation De verbie Usuardi rélalie in martyrologio parùtiensi de assumptione bcatx Mariée Virginie, in-12, Sens, 1669, et iiràceà une lettre qu’il écrivit aux deux cardinaux de Itt-t z et de Bouillon, Epistola apologelica, in- 12, Rouen, 1670. Mais il fut combattu sérieusement par deux autres chanoines, tous deux aussi docteurs de Sorbonnc. Jacques Gaudin et Nicolas Billiard (Ladvocat), le premier, dans son ouvrage Aesumptio eorporea beatets Mariée Virginie vindicata, in-12, Paris. 1670, et le second, dans ses Vindiciee parthenicte de vera ateumptinne eorporea béates MarinVirginie, ln-12, Paris, 1670. Claude.loly leur répliqua par son nouvel écrit Traditioantiqua eccleeiarum Franciee de uerbie Ueuardi ml feetwrn aeeumptionie béates Maries Virginie vindicata, in-12, Sens, 1672. Il fut chaleureusement appuyé par Launoy, qui publia à cette occasion Bon Judicium de t mtrovereia super execribendo parieieneie eecleeim piartyrologio exorta, in-8 1. Laon, 1671. Quelques années pin-, tard, Tillemonl penchait visiblement vers la ii opinion, tout en -.- défendant de juger I opinion >j ui emble ! < n<- par le commun consentement des ffdi li Ménwiree, etc., t. i. Note* sur la sainte Vierge, a. xv, tte controverse, au fond, de la croyance traditionnelle, en donnant lieu a un li nécessaire parmi les arguments plus ou moins rigoureux qu’on invoquait jusque-là en faveur de l’Assomption. Depuis lors, cette doctrine n’a fait que s affermir daanlage dans l’Église tout entière. Pendant longtem] fi t. du 15 août a occupé dans la liturgie catholique un rang supérieur à toutes les autres la sainte

Vierge ; et actuellement encore, du moins en France, elle est accompagnée d’une procession solennelle. Les théologiens, de leur cété. sont unanimes depuis ; temps ;, proclamer la certitude de l’assomption : ^i bien qu’au concile du Vatican beaucoup de Pères croyaient doctrine nuirepour une définition dogmatique. Plusieurs poetulata, qui étaient i recueillirent près de deux cents signatures. Cf. Acta et décréta sac. cecum. conciUi Vaticani, dans la Collectio Lacencie, Pribourg-en-Brisgau, 1892, t. vii, eu

III. Preuves de la doctrine.

Bien que les chefs ordinaires de preuves théologiques ne - t..us également applicables à la thèse de l’assomption, nous allons cependant les énumérer dans l’ordre habituel, en ayant soin de marquer h-s différences qui les séparent comme valeur démonstrative.

I. ÉCRITURE SAINTE. —

Disons tout de suite qu’elle ne fournit aucune preuve décisive et explicite de l’assomption. Les Pères et les docteurs du moyen âge ont cru cependant pouvoir citer quelqi ;. a bibliques en parlant de ce mystère. Ainsi, par exemple, le texte suivant : Jngredere in requiem tuani tu et area sanctificationie tusc, Ps. cxxxi, 8. qu’on appliquait à Jésus-Christ introduisant au ciel le corps virginal où il avait naissance. Ainsi encore le texte : j4s/i(i( regina a de.rtris tuis in vestilu deaurato, circurndala carietaté, Ps. xi.iv, 10. qui symbolise, disait-on. la gloire éclatante dont la sainte Vierge est revêtue corps et âme. Hais il est clair que ces passages et autres semblables, entendus au sens littéral, signifient tout autre chose que l’assomption. Les Pères et les théologiens qui les ont cités. à propos de cette croyance, n’ont pas pu se faire illusion sur leur valeur démonstrative. Ce n’est pas pour établir la doctrine qu’ils en ont fait u> [ seulement pour l’éclairer et lui donner une couleur biblique. A plus forte raison, cette remarque doit-elle s’appliquer aux comparaisons et symboles qu’on emploie à ce sujet, sons prétexte qu’ils expriment l’idée d’incorruptibilité : tels que le paradis terrestre, le buisson ardent, l’arche et alliance, etc. Ce sont là des accommodations oratoires, mais non des preuves dogmatiques.

Au dire de certains théologiens, il y aurait pourtant deux textes scripturaires qui contiendraient l’affirmation au moins implicite du privilège de l’assomption. L’un de ces textes est tiré de la salutation angélique, Luc, et l’autre, de la Genèse, ni. 15. Voici comment r.i nent à ce sujet quelques auteurs, entre autres le P. 1 r » rien. S..1.. dont je résume brièvement l’argumentation. Le principe qui dominela question et qui a été signalé coi ! tel par les Pères, est la plénitude de grâce, gratin plana, et l’excellence des bénédictions dont fut f.i. : la sainte Vierge, benedicta tu in mulieribue pas le droit d’en conclure que la grâce d i la mort sans en ressentir les outrages, entrait aussi comnM élément partiel dans la plénitude où les autres privilèt. dent déjà contenus’1 C’est la conséquence que signalait le pape Alexandre III, quand il écrivait un- 1 .m sultan d’Icône, pour lui exposer les principaux dogmes catholiques : Maria concepit sine pudoiv, peperil sine dolore, m aixe mjghayit h.e corheptiose, juste. verbum angeli, imo Dei per angehtm, UT PLENA, NON SEMIPLEXA GRATIM PRODARETUR. Epist., XXII, Labbe, t. xxi, col. 898. Et cette conclusion paraît encore plus légitime, si l’on considère cette autre parole de la salutation angélique, benedicta tu in mulieribus. Une bénédiction si sublime semble exiger que la sainte Vierge ait échappé à la corruption du tombeau ; car on ne peut nier qu’il y ait là une malédiction spéciale qui répugne à l’excellence d’une créature aussi bénie que la Mère de Dieu. C’est le raisonnement de saint Thomas : Tertia maledictio fuit communis viris et mulieribus, ut scilicet in pulverem reverterentur ; et ab haï immuxis fuit beata VIRGO, QUIA CUM CORPORE EST ASSUMPTA IX C.ELUM. Opusc. in salut, ang.

Le second texte est celui-ci : hiimicitias ponam inter le et mulierem, inter semen luum et senien illius, et ipsa conteret caput luum. Gen., iii, 15. On démontrera dans un autre article, Genèse, iii, 15, qu’il y a là une prophétie messianique, où il est question, sinon à la lettre, du moins au sens spirituel, du démon symbolisé par le serpent, et, d’autre part, du rédempteur et de sa mère qui doivent remporter un triomphe écrasant sur l’ennemi du genre humain. Or, l’Écriture nous apprend que le Christ a vaincu le démon sous un triple rapport, en triomphant du péché qui est son œuvre principale, Joa., i, 29 ; puis de la concupiscence et de la mort qui sont deux fruits du péché. Rom., vii, 23, 25 ; I Cor., XV, 26, 55 sq. Cf. Hebr., ii, 14-15. N’est-il pas juste que la sainte Vierge, qui est merveilleusement associée au Christ par l’oracle messianique comme l’ennemie perpétuelle du démon, ait une large part dans son multiple triomphe ? Il est certain que ni le péché, ni la concupiscence n’ont eu d’empire sur elle. Donc, au même titre, semble-t-il, elle doit triompher de la mort, considérée du moins comme salaire du péché et œuvre du démon. Elle mourra sans doute, à l’exemple de son Fils, mais non de cette mort complète et hideuse qui est la corruption du tombeau. L’assomption sera le couronnement de son triomphe sur le serpent séducteur. Voir J.-B. Terrien, La Mire de Dieu, 1. VIII, c. ii, Paris, 1900, t. il, p. 343 sq.

Ce raisonnement, il faut bien le dire, n’est pas d’une rigueur absolue. Et il ne suffirait certainement pas pour constituer, à lui seul, une preuve scripturaire complète de l’assomption. Mais cette doctrine étant admise et prouve d’autre part, il semble qu’on puisse en retrouver au moins quelques indices dans ces deux textes de l’Ecriture.

II. TRADITION.

Elle nous fournit la seule preuve rigoureuse dans l’espèce. Il convient donc de lui donner un certain développement et de marquer avec soin les principales phases de cette tradition qui légitime pleinement la croyance actuelle de l’Église.

Premiers témoignages historiques, VIe-VIIe siècles.

— Ils nous sont fournis par les écrits des Pères et les documents liturgiques. Le plus ancien écrivain qui mentionne clairiîment l’assomption est Grégoire de Tours. JJominiu susceptum corpus [ Virginis] sanctum in nube de/- ; i ( jussit i" paradisum ubi, nunc, resumpta anima, cum electis ejus cxultans, œtcrnilalis bonis nullo occaturis fine perfruitur, lie gloria martyr., Mirac, 1. I, c. iv, /’. L., t. i.xxi, col. 708. Il semble bien que, dés cette époque, la fête de l’Assomption était célébrée en Gaule, comme l’indique un autre texte de Grégoire, que nous avons cité plus haut. Voir pourtant, en sens contraire, L. Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1889, j). 262. Ou la célébrait certainement au vile siècle, comme le prouvent le Missale gothicum et le Missale gallica1IIHII velu » , qui remontent à la fin de ce siècle, et qui comprennent tous deux de magnifiques prières pour la messe de l’Assomption, celles-ci entre autres : Fusis precibua Dominum implnremus, ut ejus indulgentia Mue defunctt Uberentur a tartaro quo beatm Virginie translatiim corpus est de sepulcro… Quæ nec ii<- corruptione )>i contagium, nec resolutionem pertulil m cro, pollulione libéra, germine gloriosa, assumptione secura… Parum fartasse fueral, si te Chris tus solo sanctificasset introitu, nisi etiam talem malrem adornassel egressu. Rccte ab ipso suscepla es in assumptione féliciter, quem pie suscepisti conceptura per fidem, ut quse terras, non eras conscia, non tenerel rupes inclusa. P. L., t. lxxii, col. 245-246. — A Rome, nous avons dit plus haut que la fête de l’Assomption se célébrait certainement au VIIe siècle. Plusieurs théologiens et liturgistes prétendent même qu’elle existait avant saint Grégoire le Grand († 604), et ils citent à l’appui de leur opinion la collecte suivante d’une messe que contient le sacramentaire appelé grégorien : Veneranda nobis, Domine, hujus diei festivitas opem conférât saiutare >n, in qua sancta Dei genitrix morlem subiit temporalem, XEC TAMEX MORTIS XEXIDUS DEPRIMI POTDIT, quse filium tuum de se gentil incarnation. P. L., t.LXXvm, col. 133. Les mots soulignés désignent certainement la corruption de la mort proprement dite, qui n’a pu atteindre la sainte Vierge, et non la délivrance de péché ou de la peine du péché, comme l’a prétendu Launoy. N’ayant jamais subi l’empire du péché pendant sa vie tout entière, Marie pouvait encore moins en redouter les atteintes après sa mort ; et c’eût été un non sens que de voir là une prérogative spéciale en sa faveur. L’impuissance de la mort à garder la sainte Vierge comme prisonnière ne peut signifier qu’une résurrection proprement dite, c’est-à-dire un privilège dont l’assomption est le couronnement logique. Ce témoignage liturgique, comme on le voit, ne manquerait pas d’importance, s’il remontait surtout à l’époque de saint Grégoire le Grand. Mais il paraît démontré aujourd’hui qu’une partie du sacramentaire qui porte son nom est postérieure à ce pape, et entre autres, la messe de l’Assomption d’où est tirée la collecte Veneranda. Voir Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1889, p. 117. — En Orient, la plus ancienne attestation de la croyance traditionnelle paraît être celle de saint Modeste, patriarche de Jérusalem († 634), dans son Encomium in dormitionem Deiparsc, P. G., t. lxxxvi, col. 3288 sq. La façon dont il s’exprime au début de son homélie montre bien que la fête de l’Assomption n’était pas d’institution récente à Jérusalem. Sobre de détails sur les circonstances où s’est accompli le mystère, il mentionne pourtant la présence des apôtres amenés de loin auprès de la sainte Vierge par une voie connue de Dieu seul, ô>ç u.6vo ; ininTtxïtxi Weô ;  ; l’apparition du Christ qui vient lui-même au-devant de sa mère, l’ardeur avec laquelle l’âme de Marie séparée de son corps s’élance vers son divin Fils ; puis son prompt retour à la vie, « afin de partager corporellement l’incorruption perpétuelle de Celui qui l’a fait sortir du tombeau et qui l’a attirée à lui, de la maniére que lui seul connaît. » Cette dernière expression, répétée à dessein, vise clairement les apocryphes qui racontent les détails les plus hasardes sur la mort et la résurrection de Marie. Il lient à montrer qu’il ne s’appuie pas sur eux, mais qu’il a puisé à des sources authentiques, et avant tout à la tradition orale. Viennent ensuite les homélies de saint André, qui fut moine à Jérusalem et archevêque de Crète († 720), In dormitionem Deiparm, P. G., t. xcvii, col. 1053 sq., 1081 sq. ; de saint Germain, patriarche de Constantinople († 7 : i : i), lu sanctam Dei G-enilricis dormitionem, I’. G., t. xcviii, col. 345 sq. ; et enfin de saint Jean l).(iiiascène(† 760), In dormitionem beatec Marix Virginis, P. G., I. xevi, col. 716 sq.

Y a-t-il des textes antérieurs ?

Certains théologiens, désireux sans doute de faire remonter la tradition écrite le plus haut possible, ont eu le tord de s’appuyer sur des textes d’autorité douteuse ou même sûrement apocryphes. Il est démontré, par exemple, que le livre des Noms divins n’est pat l'œuvre d’un disciple de saint Paul, mais d’un écrivain de la fin du Ve siècle, et que cet ouvrage du pseudo-Denys ne prouve pas l’assomption, si tant est qu’il en parle dans un passage très obscur. Voir Thomassin, De dierum festivorum celebritate, I. II, c. xx, § 12, et Tillemont, loc. cit., note xv sur la sainte Vierge. Le texte de la Chronique d’Eusébe, P. L., t. xxvii, col. 581, mentionne, il est vrai, le mystère de l’assomption dans cette phrase : Maria Virgo… ad Filium assumitur in cælum, ut quidam fuisse sibi revelatum scribunt ; mais, de l’aveu des critiques compétents, ce passage n’est qu’une interpolation. Quant au sermon attribué à saint Augustin sur le même mystère, il ne remonte pas au delà du XII siècle, et les bénédictins ont eu soin de le mettre ad calcem. P. L., t. XL, col. 1142. Les plus expresses réserves s’imposent également au sujet d’un récit rapporté par saint Jean Damascène sur la foi d’une histoire qu’il attribue à un certain Euthymius, et d’après laquelle le célèbre Juvénal, patriarche de Jérusalem, aurait lui-même invoqué, au milieu du Ve siècle, une ancienne et très véridique tradition prouvant la résurrection et l’assomption de la sainte Vierge. S. Jean Damascène, In dormit. B. M. V., homil., II, 18, P. G., t. xcvi, col. 748 sq. Ce passage, il est vrai, est inséré dans le bréviaire romain. Fest. Assumpt., IV die infra Octav., II Noctum. Mais l’Église elle-même nous invite à une certaine défiance à cet endroit, en supprimant l’expression très véridique. On sait d’ailleurs que Juvénal était peu scrupuleux sous le rapport de la probité littéraire ; et le pape saint Léon, dans une lettre à Maxime d’Antioche, s’en plaignait déjà très vivement. P. L., t. liv, col. 1044. — Dans quelle mesure peut-on invoquer le témoignage des apocryphes proprement dits. Il y a deux opinions à ce sujet. Les uns pensent qu’on peut les utiliser comme preuve au moins historique de la croyance chrétienne à l’époque de leur composition. Leurs auteurs, disent-ils, n’ont pas inventé le fait de l’assomption de Marie ; ils l’ont sans doute enjolivé de détails et de circonstances légendaires. Le fait lui-même était déjà connu et reçu dans l’Église, et les apocryphes peuvent être invoqués comme des témoins de la tradition orale de l’Église. Jurgens, dans la Zeitschrift für katholische Théologie, Inspruck, 1880, p.641 sq. ; Hurler, Theologix dogmaticae compendium, Inspruck, 1891, t. ii, n. 665. D’autres estiment qu’il est plus prudent d’écarter le témoignage des apocryphes, parce que leur origine est trop suspecte en général, et que nous ne sommes pas encore suffisamment renseignes sur leur provenance, leur date ou leur valeur. Quoi qu’il en soit, la croyance traditionnelle de l’Église ne doit pas son origine à ces documents légendaires. Non seulement il est impossible d’établir, par des textes et des faits précis, cette prétendue filiation que soutiennent ou insinuent volontiers certains critiques, mais il est facile de prouver que toutes les vraisemblances historiques écartent absolument une pareille hypothèse. Car enfin « il n’est pas vraisemblable que l’opinion d’un auteur plus ou moins digne de foi, produite au Ve siècle, se soit répandue subitement en Orient et en Occident, de manière à être acceptée par des Églises fort éloignées les unes des autres. et à provoquer sur les points les plus différents l’institution immédiate d’une fête solennelle. Cet accord que l’on constate ne peut être l’effet du hasard ou de l’irréflexion ; il résulte évidemment d’une persuasion universelle chez les chrétiens de cette époque, et qui, pour s’imposer, a dû être appuyée sur la double autorité de l’enseignement officiel et de la tradition » . Dom Renaudin, De la définition dogmatique de l’assomption, Angers, 1900, p. 21. Et cette induction historique à d’autant plus de valeur, qu’elle s’accorde pleinement avec les données théologiques concernant l’infaillibilité doctrinale de l’Église et la légitimité de l’argument de prescription. En fait de tradition et de croyances, c’est surtout dans l’Église que la prescription vaut titre, et qu’elle a force de loi, tant qu’elle ne vient pas se heurter à des titres supérieurs. Or, il n’y a, dans l’espèce aucun titre plus ancien ou plus sûr.

Le seul argument plus ou moins spécieux qu’on puisse opposer a la croyance traditionnelle, est le silence des Pères pendant les cinq premiers siècles. Mais pour que cet argument négatif eût quelque valeur, il faudrait prouver que les circonstances ou ont vécu les Pères rendent leur silence inexplicable, et cette preuve ne sera jamais faite. L’assomption, d’ailleurs, n’est pas la seule doctrine qui ne soit pas documentée pour les premiers siècles ; et le dogme de l’immaculée conception, entre autres, n’est guère mieux partagé sous ce rapport, car il ne paraît au grand jour qu’aux Ve et VIe siècles, vers la même époque que l’assomption. Si les Pères antérieurs n’ont pas cru devoir mentionner ces deux d’une façon explicite, c’est qu’ils avaient leurs raisons ; et, encore qu’il nous soit difficile de les connaître parfaitement, nous pouvons toutefois en soupçonner quelques-unes. N’y avait-il pas à craindre, par exemple, que certains hérétiques eussent abusé de ces dogmes en y cherchant la justification de leurs erreurs, et que les valentiniens, entre autres, eussent pris occasion de là pour s’affermir davantage dans leur conviction en au sujet du corps de Notre-Seigneur qu’ils formé d’une substance céleste et impassible ? Peut-être aussi les Pères laissaient-ils à dessein le culte de Marie dans une ombre discrète, pour éviter de fournir le moindre prétexte à une répétition quelconque d’actes idolâtriques, en réveillant par un enseignement inopportun le souvenir des nombreuses déesses que les païens avaient adorées. Les auteurs ecclésiastiques des premiers siècles avaient d’ailleurs bien d’autres préoccupations plus urgentes que de consigner par écrit, surtout pendant les persécutions, tout ce qui concerne le culte de la sainte Vierge ; et leur silence, après tout, ne doit pas nous paraître trop surprenant. Si la plupart des dogmes catholiques ont été soumis à la loi providentielle du développement organique, il n’est pas étonnant que cette loi se vérifie, même avec plus de rigueur, quand il s’agit d’une doctrine qui n’appartient pas, comme d’autres, à la substance même de l’économie rédemptrice.

Nous concluons de là que la croyance catholique au mystère de l’assomption, dont nous avons constate l’épanouissement aux VIe et VIIe siècles, doit remonter jusqu’aux apôtres par voie de tradition orale. C’est la seule explication satisfaisante de son origine, puisque cette croyance ne dérive pas des apocryphes et semble inconnue d’autre part a la tradition écrite. Elle aurait pu sans doute devoir son existence à une révélation privée ; mais l’histoire n’en a pas conservé la moindre trace, et c’est la une hypothèse gratuite, dépourvue de toute valeur. Seule, une tradition orale remontant aux apôtres peut être considérée comme la solution du problème.

3o Témoignages postérieurs au VIIIe siècle.

À partir du IXe siècle, ils deviennent plus nombreux ; et si l’on excepte les quelques hésitations dont nous avons parle, et qui se sont produites çà et là, spécialement en France, sous l’influence combinée du décret pseudo-gélasien contre les apocryphes et de la lettre du pseudo-Jérôme à Paula et à Eustochium, nous trouvons une série ininterrompue de témoignages très explicites, où les Pères et les docteurs scolastiques, non seulement affirment la réalité de l’assomption corporelle, mais s’efforcent d’en montrer les multiples convenances et de marquer quelquefois le degré de certitude que comporte cette doctrine. Citons, entre autres, pour l’Église d’Occident. Notker, moine de Saint-Gall, qui en parle dans son martyrologe, vers 870. P. L., t. cxxxi, col. 1161 ; Atton, évêque de Verceil (†960), Serm., XVII, In assumptione beate Dei genitricis semper Virginis Mariae, P. L., t. cxxxiv col. 857 ; Fulbert, évêque de Chartres (†1029), Serm, v, De naiivitate beatse Marise, P. L., t. cxlï, col. 325 ; S. Pierre Damien († 1072), Serin., xl, De assumptione beatse Marisa, P. L., t. CXLIV, col. 717 ; S. Anselme († 1109), Orat., xl, Ad sanctam Virginem Mariain, P. L., t. clviii, col. 966 ; Hildebert, évêque du Mans, puis archevêque de Tours († 1133), Serni., I, In Dciparse assumptione, P. L., t. clxxvii, col. 808 ; Abélard († 1142), qui s’appuie, entre autres, sur la collecte Veneranda et l’explique dans le sens traditionnel, Serm., xxvi, In assumptione beatsa Mariæ, P. L., t. clxxviii, col. 541 ; S. liernard († 1153), dont les paroles sont insérées au bréviaire romain, zfi jour dans l’octave de l’Assomption. Serm.. xxw, In Cantic., n. 5, P.L., t. rxxxxin, col. 416 ; Ainédée, évêque de Lausanne (-j-1159), Ilom., vil, lu laudes sanctse Mariæ, P. L., t. clxxxiii, col. 1342 ; Richard de SaintVictor († 1173), Explic. in Canlic, 62, P. L., t. cxcvi, col. 523 ; Jean Béleth, théologien de Paris († 1182), Rationale divini offic, c. CXLVI, P. L., t. ccii, col. 148 sq. ; Pierre, abbé de Celle et ensuite évêque de Chartres († 1187), Serm., lxvii, lxxiii, De assumptione, P. L., t. ccii, col. 850-851, 856 ; Pierre de Blois († 1200), Serm., xxxiii, In assumptione beatse Maria% P. L., t. ccvii, col. 661-662 ; Absalon, abbé de Springkirsbach du diocèse de Trêves († 1203), Serm., xuv, In assumptione gloriosæ Virginis Mariæ, P. L., t. ccxi, col. 255. — Parmi les écrivains de l’Église orientale, citons S. Théodore Studile († 826), laudes in dormit. Deiparse, P. G., t. xcix, col. 719 sq. ; Siméon Métaphraste (-[-960), Oralio de sancta Maria, P. G., t. CXV, col. 560 ; Jean Maurope († 1050), Serm. in sanct. Deiparse dormitionem, P. G., t. cxx, col. 1080 sq. ; Michel Glycas († 1050), P. G., t. clviii, col. 440. De nombreux témoignages de la liturgie grecque se trouvent dans le ménologe basilien, P. G., t. CXVII, col. 586, et surtout chez Cozza-Luzi, De corporea assumptioneb. Marise testimonia lilurgica Grœcorum selecla, Rome, 1869. Cf. A. Baumslark, Die bibliche Uimmelfahrt der allerseligsten Jungfrau, dans Oriens christianus, 1904. Les docteurs scolastiques sont également très affirmatifs sur la réalité de l’assomption. Albert le Grand proclame souvent cette doctrine, surtout dans ses Queestiones super « Missus est » , n. 132, où il examine les différentes raisons qui militent en faveur du mystère. Liturgie (collecte Veneranda), Ecriture sainte (Ps. cxxxi, 8), textes des Pères, raisons de convenance, il passe tout en revue, et conclut ainsi : His ralionibus et auctoritatibus et multis aliis manifesium est quod beatissima Dei Mater in eorpore et anima super choros angelorum est assumpla. Et hoc modis omnibus credimus essr verinn. Opéra omnia, Lyon, 1651, t. xx, p. 87 sq. Saint Thomas, son disciple, tient un langage analogue, comme nous l’avons vu plus haut. Citons encore ce passage : Kesurreclio aliorum differtur usque ad finem mundi, niai aliquibta ex privilégia antea concedatur, ut beatse. Virgini, et, ut pie crédit ur, beato Joanni evangelistæ. Opusc. VI, De cxposilione sijmboli, a. 5. Cf. Sum. theol., III » , q. XXVII, a. I ; q. i.xxxmi, a. 5, ad 8° m. Même doctrine clic/, saint Bonaventure : Sancti doctores rationabiliter probars nituntur, et fidèles hune sentum pie amplectuntur, videlicel quod beata Maria jam cum eorpore sil cusumpta, et corpus jam omnino cum anima tit glorificatum Breviloquium, lect. cil. Suarez affirme la même chose et ajoute ces paroles : fin smiii universa Ecclesia, et hic ejus consensus ea antiquorum Patrum tradiHone manavit. Puis il signale et rejette l’opinion di Catharin qui avait enseigné que l’assomption était un do| me de foi : Sed rêvera non est, qui neque est <t ! > Ecclesia defmita, née est lestimonium Scripturm aut tufficiens traditio quse infallibilem facial fidem. Est igiturjam nunc tam recepta hsec sententia, ut » nullo 7 et catholico posiit m dubium revocari, aut sine’<tate negari. lulll 1 ™ part. Sum. theol., diap. XXI, sect. ii, a, 14.

A ces citations des écrivains catholiques, qu’il serait facile de multiplier, il convient de joindre le lémoignage des schismatiques, et notamment celui de l’Église grecque, au concile tenu à Jérusalem en 1672, contre les calvinistes : Recte [B. Virgo] signum esse dicitur in cœlo, eo quod ipsa cum eorpore assumpta est in cselum. Et quanivis conclusum in sepulcro fuerit immaculatum corporis ejus tabernaculum, in cselum tamen, ubi Christus fuerat assumptus, tertio et ipsa die in cœlum mirjravit. Ilardouin, Acta concil., t. xi, col. 199.

III. Raisons de convenance.

C’est à dessein qu’on emploie ici cette expression, au lieu de la formule ordinaire raisons théologiques. Car on ne voit pas trop comment l’assomption pourrait être déduite, comme conclusion strictement théologique, d’un dogme révélé quelconque. Certains auteurs semblent dire que le dogme de l’immaculée conception exigeait cette faveur ; mais leur argumentation ne paraît pas rigoureuse. Car si la sainte Vierge n’a pas reçu le privilège de l’immortalité, qui s’harmonisait si bien avec sa conception immaculée, c’est une preuve qu’il n’y avait pas un lien nécessaire et absolu entre la grâce originelle de Marie et les faveurs préternaturelles qui en découlaient. Rien ne garantit davantage qu’il ait existé une connexion plus étroite entre cette première grâce et la résurrection ou l’assomption glorieuse de la sainte Vierge. Rigoureusement parlant, son corps virginal aurait pu attendre la r-surrection générale, et nul n’aurait pu y voir une atteinte sérieuse à l’économie du monde surnaturel.

Ces réserves faites, disons cependant que de nombreuses et admirables convenances plaidaient en faveur de l’assomption. Le pape Benoit XIV, qui les appelle « des raisons théologiques » , au sens large évidemment, les résume ainsi, en quelques mots : Piæ ac religiosse sententiæ de assumpto in cselos Virginis eorpore rationes etiam theologicæ sufjragantur, pelilse ex dignitate Matris Dei, ab excellenli virginitate, ab insigni super omnes homines et angelos sanctitate, ex intima cum Cliristo Filio conjunctione et consensione, ex Filii in matrem dignissimam affectu. De canoniz. sanct., 1. I, c. xlii, n. 15. Il est facile de voir que toutes ces raisons découlent, au fond, d’une seule, la maternité divine. Aussi, laissant de côté les développements, d’ailleurs faciles, que comportent les autres raisons de convenance, nous estimons qu’il suffit de mettre en relief celle qui en est le principe et la clé.

Saint Thomas, parlant de la maternité divine de la sainte Vierge, en montre bien la transcendance : Beata Virgo, ex hoc quod <’st Mater Dei, habet quamdam dignitatem infinitam ex bono infinito quod est Drus. Sum. theol., l*, q. xxv, a. 6, ad 4um. Cette maternité faitde Marie une créature unique et la constitue à elle seule dans un ordre à part, en la rapprochant de Dieu autant qu’il est possible à une personne créée. Sa chair a contracté ainsi l’union la plus intime avec la chair du Christ ; ou plutôt, suivantle mot attribué à saint Augustin, les deux ne font qu’un, d’une certaine manière : CaroJeSU, euro Marin’. P. L., t. xi., col. 1145. Convenait-il, dès lors, que Jésus-Christ laissât le corps de sa mère en proie à la corruption du tombeau, comme un cadavre vulgaire ? Ne devait-il pas plutôt l’associer au mystère de sa propre ascension, en devançant pour lui l’heure de la résurrection et de la glorification suprême ? N’était-ce pas le couronnement logique des privilèges merveilleux qui avaient préparé, accompagne et suivi la maternité divine de Marie ? C’est l’argument que font valoir de préférence un grand nombre de l’eivs, entre autres le pseudo-Augustin : llimt ergo sacralissimum corpus, de quo Christus carnem assumpsit et divinam naturam humants univit, non amittens quod erat, sed assument </’/< » / non erat, ni Verbum caro, hoc exi Deus homo fieret, escam vermi-Ims traditum, quia sentire non valeo, dicere pertimesco communi sorte putredinis et futuri de vermibut pulverii. Dé cutumptione beatæ Maria Virginit liber un ut, /’. /.., i. i. col. Il i’iVoir i ce sujet de belli pieuses considérations tirée » différi et des théolo dans le P. rerrien, /." Mère de Dit 1900, t. » , l. VIII, c. iii, [v, p. 340-300.

IV. La croyance à l’assomption pourrait-elle étre l’objet d’une définition dogmatique ?

Il résulte de jui précède que la croyance à l’assomption est une rite.1 tout le moins certaine, el qui ne pourrait être i -.mla pininsigne témérité, puisque I Eglise l’ene infailliblement par son magistère ordinaire. Mais il in s’ensuit pas qu’on puisse la ranger actuellement parmi les vérités de foi, comme le pensent quelques rares théologiens. Car le magistère ordinaire de l’Eglise ne s’est jamais prononcé sur son origine, et ne l’a jamais présentée comme faisant partie du dépôt de la révélation. I’Tait-elle, <lu moins, être l’objet d’une définition dogmatique’La question revient ; ’i savoir si cette vérité appartient vraiment au dépôt de la révélation, ou, ce qui est tout un, si elle constitue une tradition divino-apostolique. Car si les apôtres en avaient eu connaissance par des voies purement humaines et nous l’avaient transmise comme telle, cette croyance pourrait sans doute exiger de nous le même assentiment qu’un fait historique ordinaire, et même l’acte de foi ecclésiastique qui est dû à toute vérité infailliblement enseignée par l’Église ; mais elle ne pourrait pas s’imposera notre esprit propres auctoritatem Dei revelantis, ni être par conséquent définie de foi divine et catholique.

Il importe donc de savoir comment les apôtres ont eu connaissance de l’assomption, et à quel titre ils l’ont enseignée aux fidèles. De la réponse à cette question dépend, au fond, la solution de tout le problème. Pour cela, nous avons le choix entre deux hypothèses qui résument toutes les autres, celles de la vision et de la non-vision du fait par les apôtres. Or l’une et l’autre semblent exiger une intervention de Dieu garantissant le fait en question.

D’abord, si aucun des apôtres n’a été le témoin oculaire de l’assomption, il est clair qu’ils n’ont pas pu la connaître avec une entière certitude, en dehors de toute révélation. Même en supposant qu’Usaient trouvé le sépulcre vide et constaté la disparition du corps de la sainte Vierge, ils n’avaient pas le droit de conclure rigoureusement à sa résurrection bienheureuse et à sa glorification céleste. On aurait [m leur objecter que Dieu avait peut-être soustrait le corps de Marie à la vénération des fidèles pour le transporter en un lieu inconnu, connue il l’avait lait autrefois pour.Moïse. Sans doute. la disparition du corps virginal eût été une forte présomption en faveur de son assomption glorieuse ; mais elle n’eût pas suffi pour exclure jusqu’à l’ombre d’un doute, et créer cette pleine et entière certitude que nous avons constatée à l’origine première de la tradition. Seule, une révélation divine explique la croyance îles apôtres, s’il n’ont pas vu eux-mêmes la sainte Vierge s’élever dans les cieux.

On arrive, en somme, à la même conclusion, avec l’autre hypothèse, celle de la vision du mystère par un ou plusieurs des apôtres. Tout porte à croire que, même dans ce cas, il a eu sinon révélation proprement dite, du moins intervention divine pour continuer le fait de l’assomption et enjoindre aux apôtres d’enseigner cette vérité aux fidèles. Car enfin, s’ils ont vu la -amie Vierge monter au ciel, surtout avec les qualités îles corps glorieux, il semble bien cpie c’est par une disposition U, -Spéciale de la providence, qui avait -es de--eins en les faisant assister par privilège a ce merveilleux spectacle. Or, peut-on assigner a cette intervention providentielle un autre but digne de Dieu, que de donner à la fois aux apôtres la certitude pleine et entière du mystère et la mission de l’annoncer aux Qdèles ? C’était un événement qui intéressait au plus haut point la pi el qui avait une portée autrement -impie fait ordinaire, dont les apôtres auraient coi, la réalité historique par leurs facull donC C|l Mie de lollteb- [. 11’I.1 1 1’.11 - cllTl’-l par conséquent comme prédicateurs de la doctrine i lée, que les apôtres auraient eu le privih pler b mystère de l’assomption ; ce qui revient a d dans notre hypothèse, qu’ils ont dû enseignei tri rusoula garantie de l’autorité divine, et qu’ils été chai-.’- par Dieu même de la prêcher aux lidi Rien ne lui manquerait dès lors pour’ible d une définition dogmatique.

Cette origine divino-apostolique, que nous venon ir li croyance universel I assomption, lui est d’ailleurs reconnue par un grand nombre de théologiens. Aussi n’y eut-il aucun étonnemenl dans le monde théologique, lorsqu’on apprit, à l’époque du concile du Vatican, qu’un grand nombre de Pères demandaient la définition dogmatique de cette vérité, i II y eut dix propositions de ce genre, émanant de l’initiative des J’en -. faisant toutes au concile la même dem mais dont chacune était appuyée par un groupe différent d évoque-, fin additionnant le total des signatures doi en vue de cette définition solennelle, on obtenait lechiffre de litT Pires, cardinaux, archevêques, évêques i’. supérieurs généraux d’ordres religieux. Les dix propositions, qui motivaient leur demande par des raisons semblables et souvent exposées dans les mêmes termes, affirmaient nettement que la croyance de l’Église à l’assomption était une tradition apostolique reposant elle-même sur une révélation divine, dont l’apôtre saint Jean, parexi mple, avait pu être favorisé, puisqu’il survécut aux apôtres et à la sainte Vierge. > M" Martin. Les travaux concile du Vatican, trad. franc., Paris. 1870 p. 10E Bien plus, quelques évêques, entre autres celui de en Espagne qui en lit la proposition au concile, Collectio Lacencis, t. vii, col. 872, et celui de Nîmes, M » ’Plantier, étaient d’avis que le concile aurait pu définir doctrine par voie d’acclamation spontanée, puisque, disait-on. elle était parvenue a ce point de maturité e|orieuse ou Pie 1 saisit l’immaculée conception de Marie pour l’imposer à la foi des peuples ; évidemment il n’y aurait ni précipitation, ni témérité à la définir telle quelle, même par voie d’acclamation, parce que une cause suffisamment étudiée. > Lettre pastorale de

ue de Ximes annonçant le concile œcuménique du

Vatican, Ninies. I869. Cf. Martin, Omnium conedii Valicani qua ad doclrinam et disciplinant pertinent documentorum collée tio, Paris. ISvJ. p. II » .

Depuis cette époque. Comme auparavant déjà, les tl logiens ont souvent exprimé ce même voeu d’une définition dogmatique. Citons, entre autres, le P. Bus La Vergine Maria vivente in corpo ed in anima in cielii, ossia Disserlazione theologico-storiro-critica sulla definibilità dogmatica délia corporca assunsione délia M mire di Dio, Borne, 1863 ; M » ’Vaccari, De cor Deiparæ assumptione, Rome, 1869 ; l>e Ileata’Virginie Maria morte, resurrectione et in calum gloriosa assumptione, Ferrare, 1881 ; Gaspard de Luise, L’assum ih MariaMadre di Dio, trionfo delta dottrina cattolica sul naturatismo, Turin, 1869 ; le P. Lana. consulteur de la S. C. des Rites. La risurrezionee corporca assvnzione al cielo délia santa Vergine ifadri 1880 ; trad. francpar Chevalier, in-8°, Dijon, I M Virdia, évêque de Cariali, l’ostulatum pi tica définit ione intégra in endos assumptione Deiparm Virginis, Rome, 1880 ; Bertani, plusieurs articles la Scuola cattolica de Milan, I Outre les auteurs mentionnés an cours de Tari icltosomatica et pneumalosomalica /’* ijiarentis aêtvmp>’S, Turin, IsM. Ci I eiivrapo contient une I de renseignements, mais il manque de critique, - JjiJleurs que la plupart des ouvrages italiens cités plus haut. Voir aussi G. Perrella, Qusestio utrum B. Virgo non solum in anima, sed eliam in corpore evecta fuerit in cxlum, Naples, 1901, et dans la Revue thomiste, année 1901, une série d’articles où dom Renaudin développe longuement sa dissertation sur la Définition dogmatique de l’assomption, Angers, 1900.

.1. Beli.amy.

ASSURANCE. Voir Aléatoires (Contrats), col. 698700.

ASTATES. Nom qu’on donna, au dire de Photius et de Pierre de Sicile, à un parti de pauliciens d’Arménie, voir Pauliciens, probablement, pense Dôllinger, à cause de la vie errante à laquelle les condamnaient leurs opinions des plus hétérodoxes : auTaxoc, sa ?is demeure. Photius les qualifie de « notables entre les disciples de Sergius » . Les édits de Léon l’Arménien (813-820) avaient institué contre les pauliciens un véritable tribunal de l’inquisition, dont les principaux agents dans l’Arménie romaine furent Thomas, évêque de Néocésarée, et l’abbé Paracondacès. Les astates tramèrent la mort des deux inquisiteurs ; ils assassinèrent traîtreusement l’abbé Paracondacès, tandis que la populace de Cynochore, conduite par un astate, massacra l’évêque Thomas. Ils se hâtèrent de passer la frontière et se retirèrent sous la domination de Monochérarès, émir de Mélitène, dans la seconde Arménie, qui leur donna la petite ville d’Argaoun, probablement Arcas, bientôt trop étroite pour contenir le nombre toujours croissant des réfugiés, nid d’aigles sur les hauteurs, d’où ils ne cessèrent de s’élancer sur les terres de l’empire. Ils continuèrent d’y pratiquer secrètement leur culte, tout en embrassant ostensiblement celui de Mahomet.

Photius, Contra manichœos, 1. 1, c. xxiv, P. G., t. en, col. 77-78 ; PetrusSiculus, Historiamanichxorum, c.A, P.G., t.civ, col. 1302 ; Dollinger, Beilràge zur Seklengesclnchte des Mittclallers, t. I, p. 12 sq.

C. Verschaffel.

ASTÈRE (Saint), évêque d’Amasce, dans le Pont, contemporain de saint Jean Chrysoslome. Il nous apprend lui-même qu’il eut pour instituteur un certain Scythe (un Goth ?) qui, vendu tout jeune comme esclave à un professeur d’Anlioche, avait fait à l’école de ce maître de merveilleux progrès et gagné une grande réputation parmi les Grecs et les Romains. Photius, Bibliulheca, cod.271, P. G., t. Civ, col. 216. C’est tout ce que l’on sait de sa vie, dont l’époque est toutefois fixée par certaines allusions de ses homélies aux événements contemporains. Il se souvient île l’apostasie de Julien, Orat., nr, P. G., t. XL, col. 208 ; son sermon de la fête des Calendes, Oral., iv, col. 218, est de l’année qui suivit le consulat et la chute d’Kutrope, c’est-à-dire du jour de l’an 400 ; il parle ailleurs de son grand âge. Photius, Amphil., 312, /’. G., t. ci, col. Util.

Il ne nous reste ^uère de saint Altère que des sermons ou homélies. Vingt-deux de ces discours sont complets, s.iwiir douze si iides sujets divers, dans l’édition de Combefis, Paris, 1648, huit sur les Psaumes, dont un parmi les œuvres de saint Chrysostome, et les sept autres publiés par Cotelier, Monumenta Ecclesise grsecæ, Paris, i. ii : deux, enfin, qu’on trouve parmi les œuvres de saint Grégoire de Nysse, mais attribués à noire auteur par Photius, Biblioth., cod.271, /’.G., t. civ, col. 201-204, 216. Photius donne des extraits de plusieurs autres disqui semblent perdus. Ibid., col. 201-2l6, 221-221. Mais nous possédons encore, sous le nom de saint Astére, une on prédécesseur, saint Basile d’Amasée. Acla suint., t. m aprilis, Paris, isiit ;, t. x ii, p. 120-427, oeuvres complètes -ont dans Migne, /’. G., t. xi, , col. 163 180. Tillemonl les analyse avec son exactitude ordit. , p, 109 sq.

Saint Astère était un orateur de mérite, bien qu’inégal. Il te prop i Dé.mosthène pour i lèle. Orat., xi, col.’.'<’.’, . Ses meilleurs discours témoignent d’une grande force d’expression et d’un grand sérieux de conviction morale. Il y a des passages d’une frappante éloquence. Son orthodoxie était incontestée. Par contraste avec son homonyme arien. Photius, Amphil., lue. cit., le dépeint ferme dans la foi, dévoué au soin de son troupeau, auquel il donnait l’exemple de la piété et de toutes les vertus. Les conciles des siècles postérieurs, spécialement ceux relatifs à la controverse iconoclaste, aiment à citer son autorité. Le IIe concile de Nicée l’appelle « un astre brillant, éclairant tous les esprits » . Labbe, Concil., t. viii, col. 1385, 1387.

P. G., t. XL, col. 155-162 ; Tillemont, Mémoires pour servir à l’histoire ecclésiastique des si.T premiers siècles, Paris, 1705, t. x, p. 407-414 ; Acta sanctorum, t. xiii octobris, p. 330-334 ; Engelhardt, Die Homilien des Asterius von Aynasea, drei Programme, Erlangen, 1830-1833 ; L. Kocli, Asterius, Bischof von Amasea, dans la Zeitschrift fur historische Théologie, t. xli (1871), p. 77-107 ; Fessler-Jungmann, Institut, patrologise, Inspruck, 1890, t. i, p. 624, note ; Bardenhewer, Patrologie, Fribourg-en-Brisgau, 1894, p. 283 ; trad. franc., Paris, 1899, t. II, p. 125 ; U. Chevalier, Répertoire des sources historiques du moyen âge, Bio-bibliographie, p. 179-180.

C. Verschaffel.

ASTERIUS URBANUS. Voir Montanistes.

ASTESANUS, frère mineur, connu seulement par le nom du lieu de son origine, Asti, dans le Piémont, était instruit dans le droit canonique et civil. Il est mort vers 1330. Il rédigea un grand volume, divisé en huit livres, Summa de casibus conscientise, Venise, 1468. Cet ouvrage a été souvent réédité sous le titre de Summa astesana ou aslensis, sans lieu ni date [Strasbourg, 1473] ; Venise, 1478 (avec des corrections), 1480 ; Cologne, 1479 ; Nuremberg, 1482, 1528 ; 2 in-4°, Lyon, 1519 ; 2 info ]., Rome, 1728, 1730. Le sens des mots du droit canonique et romain est donné au 1. VIII, tit. xlvii ; cequi.au jugement de Schulte, forme un court manuel de la latinité des deux Corpus juris. On a extrait du 1. V, tit. XXXII, quarante-sept Çanones pœnitentiales, empruntés à saint Bonaventure, et on les a publiés à la suite du Décret de Gratien, Rome, 1578, puis à part, Venise, 1581, avec des notes d’Antoine Augustini ; 1595, sans nom d’auleur.

Kircheyile.xikon, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 18’82, t. I, col. 1523-4524 ; Hurter, Nomenclator literarius, lnspruck, 1899, t. iv, col. 499-500.

E. Mangenot.

ASTI (Jean-Baptiste d’), théologien de l’ordre des augustins que sa science lit surnommer Phœnix theolO’gorum. On ne sait si ses Commentaria in librus IV Sententiarum ont été imprimés.

Hurter, Nomenclator literarius, Inspruck, 1892, t. i, p. 136, note.

V. Oblet.

ASTORIN Pierre-Elie (1051-1703), religieux carme italien, publia contre les gallicans le Depotestate sanctse seilis apostolicx, Sienne, 1693 ; et contre les protestants le De vera Ecclesia Jesu Christi, in-i°, Naples, 1700. Dédaigneux de la scolastique et ami des nouveautés, As’orin se lit une réputation d’esprit aventureux qui lui causa beaucoup d’ennuis. Il quitta momentanément l’habit religieux, et même la religion catholique, pour s.’l’aire protestant. Mais le spectacle des divisions profondes qu’il rencontra chez les théologiens reformes lui tit comprendre sa faute, et il s’empressa de rentrer il, ins le sein de l’Eglise catholique et desa congrégation, où il remplit jusqu’à la mort les fonctions de prédicateur.

Mnrier. Nomenclator literarius, Inspruck, 1893, t. ii, col, 664-665.

, l. Bellamy.

ASTROLOGIE. Voir Divination.

ASTROS (Paul Thérèse David d'). cardinal fran ! ’i né à Tourvès (Var) en 1772, mort en 1861. Entré dans les ordres à la liu de la Ilévolutiou, il fut, après le