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HISTOIRE D’UN RÉPROUVÉ

Le maître d’hôtel fit exécuter l’ordre du voyageur.

Dunbar se jeta dans un fauteuil et prit un journal. Mais il ne lut pas une ligne de la page qu’il avait sous les yeux. Il était dans cette situation d’esprit commune aux personnes nerveuses quand elles sont dans l’attente, par suite de quelque événement inexplicable. L’absence de Wilmot devenait de plus en plus inconcevable, et son ancien maître n’essayait pas de cacher son inquiétude. Le journal lui échappa des mains, et il demeura assis la figure tournée vers la porte. Il écoutait.

Il resta plus d’une heure sans bouger, et au bout de ce temps, le maître d’hôtel reparut.

— Eh bien ?… — s’écria Dunbar.

— Le garçon d’écurie est revenu, monsieur. Aucun messager de vous ou de n’importe qui n’a paru aux Fougères cette après-midi.

Dunbar bondit tout à coup sur ses pieds et regarda le maître d’hôtel bien en face. Après un examen de quelques minutes, et d’un air pensif, il dit lentement et délibérément :

— J’ai peur qu’il ne soit arrivé quelque chose.

Le maître d’hôtel joua avec son énorme chaîne de montre et haussa les épaules avec un geste d’incertitude.

— Ma foi, c’est étrange, monsieur, pour ne pas dire plus ; mais vous ne pensez pas que ?…

Il regarda Dunbar, sans trop savoir comment achever sa phrase.

— Je ne sais que penser, — s’écria le banquier. — Souvenez-vous que je suis presque aussi étranger dans ce pays que si je n’avais jamais, avant aujourd’hui, foulé le sol anglais. Cet homme peut m’avoir joué un tour et s’être éloigné dans un but quelconque le concernant, quoique je n’aie aucune idée de ce que peut être ce but. Il aurait mieux servi ses intérêts en res-