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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

de Bamba ne fut pas moindre que lors de la première rencontre. Ishak dut s’enfuir à nouveau vers le sud.

En des circonstances aussi critiques, les Songhoïs s’avisèrent de s’affaiblir encore par des discordes intérieures. Askia Kaghou fut proclamé roi par une partie de l’armée. Totalement démoralisé, Ishak ne tenta rien pour reprendre la suprématie. Celui qui le dernier régna sur le grand royaume de Songhoi disparut sur une scène, sinon héroïque, du moins très tragique. « Quand il eut pris la résolution de céder la place à son rival, les grands de l’armée qui lui étaient restés fidèles rassemblèrent tous les insignes royaux et les brûlèrent en un lieu nommé Téra. Ensuite ils prirent congé d’Ishak, et l’on se demanda mutuellement pardon. Le roi pleura. Les grands pleurèrent. Et ce fut la dernière fois qu’ils se virent. » Peu de temps après, Ishak mourait obscurément et abandonné au Gourma où il s’était réfugié (1592).

Le pacha Mahmoud procéda alors à la conquête et à la pacification avec une férocité qui est restée légendaire au Soudan. Le prétendant Askia Kaghou étant venu se rendre, il le fit périr avec son entourage en faisant écrouler sur eux la maison dans laquelle ils avaient été enfermés. Quatre-ving-trois membres de la famille royale subirent les supplices les plus divers : décollation, noyade, mise en croix.

Tombouctou qui s’était soulevée à la suite des mauvais traitements que la garnison infligeait à ses habitants, fut cruellement châtiée. Deux personnages considérables moururent les pieds et les mains tranchés, d’autres furent massacrés, et tous les savants, ces marabouts qui étaient l’orgueil de la grande ville, furent emprisonnés, puis conduits et internés au Maroc, d’où bien peu revinrent.

À l’effondrement du Songhoi, un grand nombre de chefs s’étaient soulevés dans les pays conquis depuis Sunni Ali, Le sud et l’ouest avaient été pillés et dévastés par eux. Toute une partie du royaume fut en proie à l’anarchie. Foulbés,