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L’UNIVERSITÉ DE SANKORÉ

pas de raison pour que ne s’accomplisse pas ce que demande un croyant.

Sur la crête des dunes, au nord comme au sud, à l’est comme à l’ouest, tout autour de la ville, s’élevèrent ainsi de petites chapelles, formant à Tombouctou comme un rempart de sainteté. J’ai voulu les visiter en souvenir des contes jolis qui sont sortis de la poussière de ceux qui y dorment. Un jour, mon domestique et moi, nous avons dûment chargé nos winchester de leurs douze coups (car la brousse, aux maraudeurs touaregs propice, commence par là) et dans la plaine de sable, nous avons pataugé. Une douzaine, à peine, de ces édicules sont encore debout. Quelque arbre étique du désert jette sur eux un soupçon d’ombre. Devant l’un, je trouvai un vieillard, marabout du temps présent, qui, comme moi, était venu voir ces marabouts des temps passés. Il avait ouvert la porte de la petite chapelle, dont l’intérieur montrait un tertre en pisé, recouvert de pauvres étoffes. Assis sur le seuil, il psalmodiait des versets du Koran.

Et ce fut le seul bruit que nous entendîmes, le seul être vivant que nous rencontrâmes dans la blanche fournaise des sables. C’était autour de la ville un vaste champ de morts. À chaque pas le pied heurtait quelque crâne, un tibia, des squelettes entiers, — restes des générations disparues depuis des siècles, et cadavres confiés hier aux sables inconstants, et hier déterrés par les fauves. En face de la sévérité et de la stérilité du paysage, et de cette mort accumulée, se dressa en moi la vision lointaine de la vallée de Josaphat, située de même devant les murailles de Jérusalem la Sainte, où le sol, de même, ne produit qu’une floraison de tombeaux.

Les marabouts qui se consacraient à la magistrature rendaient la justice d’après le Koran et suivant les principes de