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LA POLITIQUE ET LA LITTÉRATURE

ajoutaient les œuvres de leurs propres écrivains. Elles étaient presque toujours d’un genre sérieux, traitant de scolastique et de Droit. Aussi la majeure partie de la production littéraire reste-t-elle sans intérêt pour nous. Une partie moindre est, au contraire, de la plus haute importance : ce sont les œuvres historiques qui viennent enfin Jeter quelque lumière dans l’obseur passé de ces vastes régions. Et, à ce titre, il importe de nous arrêter aux écrits de Kôti.

Sous le titre de Fatassi il a rédigé une histoire des royaumes de Ganata, du Mali, du Songhoï et de Tombouctou depuis leurs origines jusque vers l’an 1554 (950 de l’Hégire). Malgré d’incessantes recherches pendant toute la durée de mon voyage, il m’a été impossible de recueillir de ce travail considérable autre chose que des fragments. Tout le monde connaît l’œuvre et la vante. Personne ne la possède. C’est le livre-fantôme du Soudan.

Kôti était né en 1460, il survécut quinze ans à Askia-le-Grand et fut mêlé aux affaires publiques : son récit sur cette époque si brillante du Soudan aurait donc une valeur particulière. Les fragments que nous possédons s’y rapportent en effet, et leur intérêt ne fait qu’augmenter nos regrets. Peut-être trouverait-on un exemplaire complet à Dia ou à Korienzé, m’a-t-on dit. Quant à moi, je n’ai pu découvrir qu’un descendant de l’historien, nommé Ahmadou Sansérif et exerçant à Tombouctou les fonctions de cadi, homme très instruit qui revisait les manuscrits que Je faisais copier. Voici ce qu’il me raconta sur l’œuvre de son aïeul :

« Le Fatassi n’a jamais été aussi répandu que les autres livres qui racontent les histoires du Soudan, parce qu’il y était question de beaucoup de peuples et de beaucoup d’hommes. Des familles devenues, depuis, riches et considérables, ct des chefs de divers pays étaient montrés avec des origines très humbles, parfois issus d’esclaves. Ce livre gênait donc