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TOMBOUCTOU LA MYSTÉRIEUSE

risait encore ce pays lorsque le colonel Borgnis-Desbordes planta là, pour la première fois, notre drapeau en face du Niger. Tandis que les Chinois élevaient ces fortifications primitives, la petite troupe d’infanterie de marine retranchée dans une redoute voisine, qui se voit encore, faisait le coup de feu. Les hordes du conquérant noir multipliaient les assauts. Enfin Samory vint lui-même conduire une dernière et décisive journée. Plusieurs fois on en arriva au corps-à-corps. Le colonel et son état-major durent se jeter dans la mêlée. Les munitions vinrent à manquer… C’est alors qu’accourant pour repousser l’assaut final, Borgnis-Desbordes dit en riant à son entourage : « Et maintenant que chacun garde une balle dans son revolver, car, après avoir largement servi les autres, il faudra peut-être songer à nous-mêmes… »

Si Bammakou n’est pas encore, à l’exemple de Bafoulabé, de Badoumbé, de Kita, un centre uniquement administratif, et si, à côté du fort s’étend un joli camp tout ombragé d’arbres, où, suivant les moments sont cantonnées, en nombre plus ou moins grand, des compagnies de tirailleurs soudanais, ce n’est pas que la région même demande un pareil déploiement de forces. Elle n’est pas moins pacifiée que celles que nous venons de parcourir depuis Kayes. Mais Bammakou est admirablement placée, au centre de notre colonie soudanaise, et constitue un point stratégique important, d’où il est facile de porter des renforts sur les points momentanément menacés.

La précaution est sage. Car sait-on avec quels moyens nous sommes maîtres de cet admirable pays, plusieurs fois grand comme la France et peuplé de 10 à 15 millions d’habitants ? Sur le Niger, admirable instrument de domination, nous avons une flottille de deux canonnières et de chalands en fer armés de mitrailleuses, sous le commandement d’un lieutenant de vaisseau et d’un enseigne. Les équipages sont