Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 10.djvu/462

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bretonnes, la première maison a été ici un ermitage, non pas un ermitage de saint, mais la retraite d’un monarque détrôné, Gunthiern, prince de la Grande-Bretagne, roi de Cambrie, qui tua, dans une bataille, son neveu, inconnu de lui. La douleur et le remords le firent renoncer à la couronne. Il s’en vint d’abord à l’île de Groix, puis sur la terre entourée de l’Ellé et de l’Isole. La légende veut qu’il y ait fondé un monastère ; Albert le Grand dit oui, Dom Lobineau dit non. Ce qui est plus certain, c’est qu’il y eut ici un des châteaux des comtes de Cornouailles. L’un de ceux-ci, Alain Canhiart, près de perdre la vue, fut guéri en un rêve où il aperçut une croix d’or. Le pape, consulté, conseilla de construire un monastère en l’honneur de la Sainte Croix, lequel fut fondé le 14 septembre 1029, jour de la fête dite l’Exaltation de la Sainte Croix. Ce fut à ce moment que Belle-Île-en-Mer et autres fiefs furent donnés aux religieux par Alain Canhiart. Les religieux avaient droit sur les moulins de la ville ; haute, basse et moyenne justice sur la ville, dans Clohars et dans Moëlan ; droit de disposer des terres vaines et vagues, taille sur les hommes de la ville, droit sur le sel et autres marchandises importées dans la ville, droit d’étalage sur la halle, droit de police, droit de mesurage des blés, droit d’aunage, droit de croc. Les droits de mesurage servaient à rétribuer, les uns, le religieux prévôt, les autres, l’office du chambrier : le profit des gros poids était pour le chambrier, celui des menus poids pour le prévôt. Dom Placide Le Duc, qui écrit ces détails, nous apprend aussi que, la veille du premier mai, on apportait à l’abbé cinq faucilles neuves : il en prenait deux, le prieur une, le chambrier une, le cellerier une, ou bien, à la place des cinq faucilles, on leur remettait cinq sols. La veille de la Saint-Jean, c’étaient douze faisceaux d’herbe pour les chevaux de l’abbé. L’abbaye possédait un bois, prolongement de la forêt de Carnoët, le manoir de Saint-Nicolas, les moulins à farine et à tan, la pêcherie des Gorets, des rentes sur diverses maisons, de nombreux prieurés par toute la région, près Lorient, Quimper, Port-Louis, Concarneau, Auray, en Quiberon, en Vannes, dans l’île de Groix, à Belle-Île, etc. J’ai dit la dispute pour Belle-Île entre les religieux de Quimperlé et les religieux de Redon, qui se prévalaient d’un acte du duc Geffroy Ier, et comment Quimperlé l’emporta. L’histoire de l’abbaye a été écrite par les moines : le pillage des soldats de Du Guesclin, la charte du duc Jean IV, en 1386, qui donne pouvoir à l’abbé de recourir au bras séculier pour la correction de ses moines, la réforme, en 1476, des mœurs du couvent devenues luxueuses, malgré tels détails cités, comme, par exemple, l’éclairage par des pots de graisse où trempaient des mèches, des mouchons fournis

QUIMPERLÉ, AVEC LE CLOCHER DE SAINT-MICHEL.