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pays sans qu’il lui profite en rien. Le chiffre élevé de la dette nationale ne permet de rien entreprendre, et l’instruction, dont les Grecs sont avides et qui est plus généralement répandue à Athènes que partout ailleurs, crée chez une nation pauvre une exubérance de forces intellectuelles qui ne trouvent à s’utiliser nulle part. Les fonctions publiques sont avidement recherchées, mais comme elles sont mal rétribuées, la tentation doit être grande d’en augmenter le revenu par des moyens peu licites.

De tout cela les journaux ne disent rien ou presque rien, tant ils craignent de compromettre le pays aux yeux de l’étranger, et tant aussi le nombre de ceux qui ont intérêt au mal est grand. Parmi les influences étrangères, la plus désintéressée est l’influence française ; elle est la moins écoutée, justement parce qu’elle est moins passionnée en ses conseils, et on lui en veut de demander le remède à tant de maux. Il suffit, en effet, de faire quelques pas hors de la ville pour être péniblement impressionné par l’abandon et le dénûment dans lequel sont laissées les campagnes. « Si le roi le savait ! » disent naïvement les paysans.


Le roi et ses ministres. — Agriculture, commerce, industrie. — Instruction publique et beaux-arts.

Le roi de Grèce est de la maison de Witelsbach ; il est né le 1er juin 1815 et a été élu le 7 mai 1832. La reine Amélie est de la maison d’Oldenboug. Le roi est grand, maigre et légèrement voûté ; on le dit instruit, laborieux, mais lent au travail ; la reine a eu une grande réputation de beauté ; elle est active et aime passionnément l’horticulture et l’agriculture ; son jardin anglais est un trésor d’ombre et de fraîcheur rare à Athènes. Sa ferme, construite à Nuremberg et transportée en Grèce malgré le mauvais état des routes, est une merveille de propreté.

Plan de l’Acropole.

On voit souvent le roi et la reine, dans le jour à cheval, le soir au théâtre ; depuis quelque temps, cependant, le roi sort peu, il souffre de la fièvre ; et la surdité, qui est résultée du traitement, fait qu’il ne prend aucun plaisir au théâtre, bien que la musique de Verdi, dont on y abuse, passe pour un excellent spécifique contre les affections du tympan.

Les anecdoctes sur le palais sont nombreuses ; il y en a de fort plaisantes ; sans aucun doute, beaucoup sont apocryphes, mais on ne peut nier que cette petite cour empesée dans son étiquette allemande prête à rire. Pour ma part, je me suis contenté de la voir passer de loin, soulevant sur la voie sacrée son mince tourbillon de poussière.

Le gouvernement du roi Othon est constitutionnel de nom ; il à sept ministres, et tout d’abord un ministre de la guerre.

Le roi Othon a formé une armée régulière, et cela avec un si grand désir de bien faire, qu’il prend les soldats à l’âge de dix-sept ans, en sorte qu’aujourd’hui le petit royaume de Grèce à une armée de près de dix mille hommes costumés en Bavarois et disciplinés à l’Allemande. Athènes est encombrée d’officiers de toutes armes, qui ont fait, pour la plupart, leur éducation dans les écoles françaises. Les gendarmes et les gardes-frontières rendent de grands services ; les autres seront peut-être appelés à en rendre plus tard. Les importations européennes. que l’on peut critiquer dans les institutions de la nouvelle Grèce ne sauraient qu’être approuvées en