VOYAGE DE L’OCÉAN PACIFIQUE À L’OCÉAN ATLANTIQUE,
À TRAVERS L’AMÉRIQUE DU SUD,
PÉROU.
HUITIÈME ÉTAPE.
DE TUNKINI À SARAYACU.
Ce fut avec un véritable plaisir que nous nous séparâmes de ces indigènes, qui pendant dix jours nous avaient tenus en tutelle et traités sans plus de façon que des ballots de marchandises. Conventions faites avec les Conibos, nous quittâmes Paruitcha et mîmes immédiatement le cap au nord. Deux heures de navigation avec nos recrues, suffirent pour établir entre nous des relations intimes. Ces naturels paraissaient de tempérament lymphatique et d’humeur débonnaire, et s’ils étaient moins habiles que les Chontaquiros dans le maniement de la rame et de la pagaye, en revanche ils possédaient des qualités de douceur, de patience, d’aménité, totalement inconnues à nos pillards de Santa-Rosa. Avec ces nouveaux compagnons, nous eussions été les voyageurs les plus fortunés du monde, si le ciel, pour contre-balancer notre félicité, n’eût mêlé à son miel une forte dose d’absinthe. En mettant le pied sur le territoire des Conibos, nous venions d’entrer sans le savoir dans le domaine des zancudos ou moustiques.
Cent pages de points d’exclamation, les interjections les plus véhémentes, tous les oh ! les ah ! les ouf ! les aïe et les hélas ! des langues humaines, réunis, combinés, élevés à la centième puissance, ne donneront jamais qu’une idée imparfaite de l’horrible supplice, de l’atroce torture, de la rage incessante que vous font éprouver
- ↑ Suite. — t. VI, p. 81, 97, 241, 257, 273 ; t. VII, p. 225, 241, 257, 273, 289 ; t. VIII, p. 97, 113, 129 ; t. IX, p. 129, 145, 161, 177, 193, 209 ; t. X, p. 129 et la note 2.