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Séoul est traversé de l’ouest à l’est par un large canal principal portant au fleuve l’eau de toutes les petites rivières qui descendent des montagnes et forment une multitude de petits cours d’eau perpendiculaires au Canal Central. Parallèlement à celui-ci s’étend une large voie, ainsi que trois autres plus étroites : toutes quatre sont coupées à angle droit par un grand nombre de rues, dont les principales se dirigent vers les anciens palais royaux et le temple de Confucius au nord de la ville. Enfin une autre rue fort importante part de la porte du Sud-Est et rejoint la voie centrale en formant un arc régulier. Le reste de la ville est composé d’un dédale énorme de ruelles et d’impasses de toute sorte, qui communiquent entre elles, soit directement, soit par de nombreux ponts en dos d’âne et sans parapet, traversant ruissceaux, rivières et canaux torrentueux ou à sec suivant les saisons.

Les grandes voies, comme à Pékin, sont obstruées par une multitude d’échoppes, la plupart en bois recouvert de chaume, où de nombreux marchands font leur trafic presque en plein air. Quand le roi sort, toutes ces constructions sont démolies, comme en Chine pour le passage de l’empereur. La voie, redevenue large de plus de 60 mètres et bordée par des maisons construites en pierre, reprend alors son caractère d’artère principale.

Le roi de Corée et son fils (voy. p. 298). — Gravure de Thiriat, d’après une photographie.

La capitale se subdivise en plusieurs quartiers, parmi lesquels les anciens et le nouveau palais royal, complètement entourés de murs, forment avec leurs portes monumentales comme des villes dans la ville. Le quartier des nobles se distingue par ses maisons élégantes recouvertes de tuiles et ses beaux jardins clos de murs très bas : aussi est-il défendu, de par la loi ; sous les peines les plus graves, de regarder chez ses voisins ; on doit même les prévenir pour les réparations à faire aux toitures. Ce règlement de police s’applique à toute la ville. Les industriels et les commerçants se réunissent généralement par profession : c’est ainsi qu’on trouve la rue des Tissus, des Meubles, de la Poterie, Le quai du Fer, du Cuivre, de la Peausserie, la place du Poisson, de la Boucherie, etc. Enfin les Japonais ont aussi leur centre dont ils font seuls la police ; il en est de même pour les Chinois, près desquels se sont groupées presque toutes les légations européennes, résidant, pour la plupart, dans d’élégantes constructions coréennes, aménagées à nos usages. Quant au quartier suburbain, ses constructions rappellent les misérables chaumières de Tchémoulpo.

Outre ce dont nous venons de parler, la capitale possède des écoles spéciales pour les langues étrangères, les beaux-arts, l’astronomie, la médecine, enfin un hôpital et un grand nombre d’autres établissements publics, organisés d’une façon tout à fait primitive.

Quelques casernes sont bâties non loin des murailles intérieures. Au centre de la ville, dans le jardin d’une maison particulière, se dresse une pagode en pierre de 25 pieds de hauteur, formée seulement de deux masses de granit blanc auquel le temps a enlevé sa couleur. Elle est divisée sculpturalement en huit étages, qui typifient le ciel bouddhique en représentant les âges successifs par lesquels l’âme doit passer pour arriver à sa purification complète. Le délaissement du bouddhisme explique seul l’enfouissement de ce joli échantillon d’architecture indo-chino-coréenne. C’est que le confucianisme est véritablement la doctrine religieuse dominante, aussi a-t-on élevé au grand philosophe chinois un magnifique temple situé au nord-est de Séoul. Il est abrité de tous côtés par les montagnes et protégé par deux rivières qui l’entourent en se rejoignant vers le sud. Cet immense établissement religieux possède, outre le sanctuaire de pur style chinois dédié à Confucius et aux ancêtres, une vingtaine de bâtiments, dont quelques-uns fort spacieux servent à abriter de nombreux lettrés coréens, qui viennent y poursuivre le cours de hautes études philosophiques. On sent que c’est le point où gît la véritable force intellectuelle du pays et d’où elle se répand pour diriger l’administration, la famille, les mœurs de la Corée. Pour terminer l’énumération des édifices religieux, il ne nous reste plus qu’à parler des divers temples élevés dans les montagnes voisines de Séoul. La plu-