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des ciels. Tout de suite on va savoir comment la loi sera exécutée. Elle ne parle en effet que de biens « détenus » par la congrégation, — par elle-même ou ses prête-noms ; — et si le liquidateur a le devoir et le droit d’appréhender ces biens en dépossédant ceux qui les détiennent, c’est uniquement quand il trouve en face de lui, comme détenteurs, soit la congrégation elle-même, soit ces personnes interposées que sont ou le congréganiste ou la Société composée, même en partie, de congréganistes. Dans tout autre cas, toute mesure de dépossession lui est interdite.

Or, que se passe-t-il ? Le liquidateur consulte le tableau dressé par l’administration des Contributions directes et l’Annuaire du Clergé français. Il y voit que la congrégation possède des établissemens dans tels départemens, dans telles communes. Il se présente ou fait présenter un mandataire. Ce sont par exemple des Carmélites. Les religieuses protestent, et sur leur protestation on va en référé devant le président du Tribunal. Là il apparaît que les religieuses ont acheté leurs immeubles en se donnant comme religieuses et pour le compte de la congrégation. Pas de doute que le liquidateur ne soit en présence de biens « détenus » par la congrégation et qu’il n’ait le droit de les appréhender. — Voici un autre cas. Le liquidateur des Jésuites se présente à Cannes, à l’établissement de la rue de Fréjus. Même résistance ; même procédure de référé. Le propriétaire, cette fois, est un prêtre, l’abbé F… Mais l’abbé F… est jésuite. La loi l’a présumé personne interposée au profit de la congrégation. Pas de doute encore que le liquidateur ne soit dans son droit, dans son rôle en prenant possession, sauf à l’abbé F… à former contre lui une action en revendication et à la justifier en prouvant qu’il est propriétaire, qu’il a acquis l’immeuble en son nom personnel. — Voici enfin un troisième cas. Le liquidateur des clercs de Saint-Viateur se présente à Peyrusse, dans une école privée qui était desservie par ces religieux. Le propriétaire ici est une dame B…, dont l’acte d’acquisition est de 1892. Il n’y a ni congrégation, ni personne interposée, et le liquidateur, le premier, reconnaît la sincérité de l’acte authentique de 1892. Cependant il prétend avoir le droit, de par son titre, de se mettre en possession… De même, dans des conditions à peu près pareilles, le liquidateur des frères de la Sainte-Famille de Belley trouve un prêtre, l’abbé S…, qui n’a jamais été congréganiste,