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MAROUSSIA.

fois sa moisson. Pied à pied, de lac en rivière, de steppe en forêt, l’ennemi avait dû reculer. L’ataman de Tchiguirine, après avoir défendu héroïquement et sauvé la ville, après avoir fait des prodiges de valeur, était mort, dit-on, mais mort en héros, mort content, en plein triomphe. Un homme inconnu jusque-là, Tchetchevik, le lion, c’est ainsi que d’une commune voix on l’avait bientôt appelé, combattait à ses côtés dans la mêlée corps à corps où il avait succombé. Le lion intrépide avait arraché le corps de son chef, couvert de nobles blessures, à l’ennemi, et repris à sa place la tête du mouvement dans toute la contrée.

Du côté de Gadiatch, l’autre ataman, reconnu comme chef suprême, avait retrouvé son antique vigueur. On avait vu souvent à sa droite, quelquefois en avant, une amazone belle comme le jour, qui ne commandait pas, mais qui apparaissait toujours au plus rude des combats, et dont la présence avait la vertu de relever tous les enthousiasmes, de ranimer tous les courages. Elle était partout, suivie d’une sorte de petit page intrépide qui lui servait de porte-étendard, et qui, monté sur un cheval noir plein de feu, agitait son drapeau d’une main vaillante, au milieu des balles, sans souci du danger. Les soldats adoraient ce petit guerrier, il était beau comme un ange. Était-il un ange en effet, ou seulement un enfant, ou, comme quelques-uns le prétendaient, une