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Alfred Jarry ou le Surmâle de lettres/05

La bibliothèque libre.
B. Grasset (p. 93-130).


UNE AFFAIRE UBU

V

FEUILLETON DU Temps
DU 5 JANVIER 1922

LES LIVRES

Alfred Jarry : Ubu-Roi, nouvelle édition, avec les croquis de l’auteur et une préface de M. Jean Saltas, 1 vol.  Fasquelle. Cf. Messaline, le Surmâle, Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien, etc…, ibid. — Charles Chassé : les Sources d’Ubu-Roi, avec 12 illustrations, 1 vol.  Floury.

Il y a une affaire Ubu. Il paraît qu’Ubu-Roi n’est pas d’Alfred Jarry. C’est toute une histoire.

Vous savez qu’Ubu-Roi fut représenté pour la première fois en décembre 1896, par le théâtre de l’Œuvre, que dirigeait et dirige encore M. Lugné-Poe. J’y étais. Cela se passait dans la salle qui devait devenir le théâtre Réjane et qui est aujourd’hui le Théâtre de Paris. Gémier jouait Ubu. La mère Ubu, c’était l’étonnante Louise France, si spirituelle et si disgraciée, pareille à une vieille portière à chaufferette égarée dans la vie de bohème, et qui n’avait pas besoin de se camoufler pour justifier cette apostrophe d’Ubu : « Mère Ubu, tu es bien laide aujourd’hui. Est-ce parce que nous attendons du monde ? » Je vois encore Henri Bauer, colosse à grosse figure jeune et à cheveux blancs un peu crépus, bien en vue dans une baignoire découverte, côté jardin : il était alors le critique très influent de l’Écho de Paris, grand patron des novateurs audacieux, et notoirement favorable à Ubu-Roi. Beaucoup d’esthètes à cheveux longs dans la salle, qui devint très vite houleuse ; Laurent Tailhade a écrit, dans Quelques fantômes de jadis : « Quand, avec la tête piriforme et le jupon ballonné du père Ubu, Gémier ouvrit la scène par le mot essentiel du parlage français, enrichi d’une consonne, après un temps d’hésitation, le rire se déchaîna, cordial et bon enfant. » La consonne intercalée était un r ; et le mot du général de Waterloo ne rimait plus avec le subjonctif, mais avec l’infinitif même du verbe perdre. On rit, certes ; mais certains se fâchèrent aussi, et toute la représentation fut entrecoupée de manifestations en divers sens. Ce qui est vrai, c’est qu’à la fin de cet étrange spectacle, le nom d’Alfred Jarry, proclamé par son principal interprète, entrait dans la célébrité.

C’était un jeune littérateur breton, né en 1873, fort répandu à Paris dans les milieux littéraires d’avant-garde, collaborateur de la Revue blanche et du Mercure de France. Il menait l’existence la plus absurde, habitait une mansarde près du carrefour Buci, seul avec deux hiboux, portait des costumes hétéroclites, généralement miteux, et mourut prématurément en 1907, de misère, de tuberculose et d’alcoolisme. Il n’était pas si paresseux, en somme : il a laissé plusieurs volumes, où il y a des choses qui ne sont pas méprisables. S’il avait vécu et s’était débarrassé de certaines manies, il aurait eu du talent. Mais Ubu-Roi fut son unique succès. Ubu-Roi lui a donné une espèce de gloire, qui a persisté après sa mort, et qui lui paraissait définitivement acquise. Deux événements viennent de la remettre en question.

Depuis une vingtaine d’années, la brochure était introuvable en librairie. Les bibliophiles s’en disputaient les rares exemplaires à prix d’or. Ceux-là ne lisent point, et ceux qui l’auraient lue, ou relue, ne pouvaient se la procurer. Ubu-Roi vivait donc sur sa réputation, ou sur sa légende. Enfin, l’éditeur Fasquelle s’est décidé à réimprimer cet ouvrage fameux, et tous les lettrés ont voulu l’avoir dans leur bibliothèque. Ils ont trouvé dans cette nouvelle édition une préface de M. Jean Saltas, qui fut l’ami de Jarry et qui ne barguigne pas à proclamer ceci : « Ubu-Roi, son chef-d’œuvre, cette pièce bouffonne et légendaire qui renferme la simplicité satirique d’Aristophane, le bon sens et la truculence de Rabelais, et la fantaisie lyrique de Shakespeare, fut composé par lui à l’âge de quinze ans. C’est avec raison qu’on a écrit que le héros de cette géniale guignolade est entré dans l’humanité et l’histoire, comme don Juan, Tartuffe, Hamlet et Panurge. » Excusez du peu !

On conçoit que si ce chef-d’œuvre n’est pas réellement d’Alfred Jarry, l’auteur véritable ait enfin résolu de se faire connaître et de revendiquer sa place parmi les génies, à côté, ou peut-être même un peu au-dessus d’Aristophane et de Rabelais, de Shakespeare et de Molière. C’est bien tentant.

Nous avons donc vu paraître une brochure intitulée : Sous le masque d’Alfred Jarry : les Sources d’Ubu-Roi, par M. Charles Chassé, agrégé de l’Université, professeur d’anglais à l’École navale. En sa qualité d’anglicisant, M. Charles Chassé a nécessairement étudié la question Shakespeare ; peut-être n’est-il pas stratfordien, et croit-il que les œuvres de Shakespeare sont de Bacon, ou de Rutland, ou du sixième comte de Derby. On voit qu’il a emprunté son titre à l’éminent proderbyste, M. Abel Lefranc, son confrère du Collège de France. Quoique M. Pierre Louys s’en soit mêlé, et affirme que les œuvres de Molière sont de Corneille, la recherche des sources, plagiats et faux états civils est, en général, une spécialité universitaire.

Donc, d’après M. Charles Chassé, Ubu-Roi n’est pas d’Alfred Jarry, mais des frères Charles et Henri M… dont il a promis de ne pas publier le nom en toutes lettres ; maison l’a donné ailleurs, au cours des polémiques provoquées par l’incident : et ce nom est Morin. Les frères Morin, tous deux officiers d’artillerie, sont catégoriques. Ils ont été les condisciples de Jarry au lycée de Rennes. Or, il y avait à ce lycée un professeur de physique, nommé Hébert, qui était, comme on dit, coulé à fond. Il se trouve par hasard que j’ai connu ce professeur Hébert. Très jeune moi-même à cette époque, je le rencontrais souvent au Havre, où il passait ses vacances en famille, ayant épousé une Havraise. C’était un gros homme, avec une grosse moustache, une vaste redingote noire, une rosette violette d’officier de l’Instruction publique, et un air de bonhomie un peu paterne. Il est vrai que je n’ai pas été de ses élèves, mais je suis surpris que ceux qu’il avait à Rennes aient découvert en lui tant d’énormités. Peut-être avait-il la prétention de les obliger à suivre le cours, au lieu de lire les feuilletons de Sarcey et de Lemaître, comme j’avais coutume de le faire pour ma part pendant la classe du lundi matin. Toujours est-il qu’abominablement « chahuté », M. Hébert devint en outre le héros de petites bouffonneries en vers et en prose, rédigées par ces collégiens en révolte, et que c’est lui le prototype du père Ubu. L’un d’eux dit aujourd’hui : « Il a pu nous faire rire, mais il n’a jamais été odieux. Ce que j’ai su, depuis, de sa vie privée est tout à son honneur… » Et cet apologiste ajoûte que Jarry a commis une mauvaise action lorsque, dans une conférence, il a présenté Ubu comme « la déformation par un potache d’un de ses professeurs qui représentait pour lui tout le grotesque qui fût au monde. » On ne voit pas bien la mauvaise action de Jarry, puisqu’il parle lui-même de « déformation ». Et son contradicteur reconnaît que « sur un plan imaginatif, on lui attribuait (à M. Hébert) les pires forfaits ». C’est cela qui m’étonne. Il ne m’avait pas semblé si ridicule, ni surtout si féroce, même superficiellement. M. Charles Géniaux, dans une lettre aux Débats, explique, avec des grandes marques de repentir, que M. Hébert était clérical, et que les mauvais garnements du lycée n’aimaient pas cela. Je me souviens aussi de monômes du quartier Latin où l’on conspuait les « postards » ; mais on ne les soupçonnait pas de vouloir « décerveler » leurs concurrents de Saint-Louis ou d’Henri-IV. La métamorphose du P. H., ou Père Heb, ou Père Ebé, en Père Ubu, demeure un peu mystérieuse. Elle n’en est pas moins incontestable, étant avouée à la fois par Jarry et par tous ses camarades de Rennes, y compris ceux qui l’accusent de s’être paré des plumes du paon.

Ce lycée aurait vu naître tout un cycle, ou même plusieurs cycles ubuesques. Après un certain nombre de récits et fantaisies héroï-comiques, M. Charles Morin, l’aîné, aurait composé, avec la collaboration de son frère Henri, ce que M. Charles Chassé appelle assez inexactement le Pré-Ubu, ou Ur-Ubu, comme on dirait en Allemagne. Terme deux fois impropre, car le Ur-Faust, par exemple, c’est le premier embryon du Faust, et ce prétendu Ur-Ubu n’est nullement primitif, ayant été précédé de plusieurs autres essais, à ce que rapporte M. Chassé lui-même ; et d’autre part, Jarry ne l’aurait pas développé, transformé et fait éclore, comme une fleur d’un bourgeon ou un tableau de maître d’une esquisse sommaire. Il l’aurait purement et simplement recopié et produit tel quel. Ubu-Roi, ce serait textuellement l’Ur-Ubu ou Pré-Ubu, d’abord intitulé les Polonais, et dont M. Henri Morin lui aurait remis le manuscrit, entièrement rédigé par son frère Charles. L’apport de Jarry aurait consisté dans le changement de titre et de… signature, avec quelques autres modifications dans les noms des personnages et quelques variantes insignifiantes. Bref, ce serait un plagiat complet, et sans mystification, ni piège à loups. MM. Charles et Henri Morin témoignent cependant qu’au point de vue pécuniaire, et par exemple au regard de la Société des auteurs, Jarry était en règle, attendu qu’ils l’avaient expressément autorisé à disposer de leur manuscrit comme il l’entendrait. Ce serait parfait pour une opérette dramatico-industrielle, pour l’exploitation d’un vaudeville ou d’un mélo ; mais l’honneur littéraire ne se confond pas simplement avec la probité commerciale. Jarry pouvait sans scrupule encaisser les droits éventuels, et je doute au surplus qu’ils aient été considérables ; mais, devant le bruit, le succès d’applaudissement et de scandale, la renommée équitable ou excessive, mais réelle, n’aurait-il pas dû être le premier à proclamer que le principal bénéfice en devait revenir aux frères Morin, dont il n’aurait été que l’impresario ou le cornac ?

Ceux-ci attestent qu’ils ne l’en ont pas prié, qu’ils ne s’en souciaient pas, que ce tapage aurait même pu leur nuire dans leur carrière etc. Cependant, si ces dernières révélations sont pleinement exactes, je persiste à croire qu’il aurait dû parler.

Mais d’abord, je ne suis pas bien sûr qu’il se soit tu. Et je ne dirai pas que M. Charles Chassé ne nous apprend rien, mais on avait déjà quelques lueurs de ce qu’il nous révèle. Laurent Tailhade, dans l’article cité, faisait état du fameux professeur et du travail préparé sur ce thème par plusieurs générations d’écoliers. Et M. Chassé lui-même signale loyalement que dans le Mercure de France l’article nécrologique sur Jarry, signé A. V., c’est-à-dire Alfred Vallette, contenait cette phrase : « La plus connue de ses œuvres, Ubu-Roi, fut écrite au collège en collaboration avec deux camarades. » De qui Laurent Tailhade et M. Alfred Vallette tenaient-ils ce renseignement, sinon de Jarry lui-même ? Il y a mieux. Dans le Figaro d’hier, M. Chassé reproduit une lettre inédite de M. Charles Morin à Henry Bauer, datée du 17 décembre 1896, et dénichée par un amateur d’autographes, où on lit : « Cette pièce, si pièce il y a, est notre œuvre commune (à mon frère et à moi), et Jarry, camarade de mon frère, l’a publiée après avoir simplement changé les noms de quelques personnages. À tout cela, d’ailleurs, nous ne voyons aucun mal… Nous tenons, mon frère et moi, à garder dans tout cela le plus grand complet anonyme. » Bien ! Mais on pouvait signaler l’existence des frères Morin sans imprimer leurs noms. À qui persuadera-t-on que Bauer, bouillant don Quichotte de la critique, n’eût pas publiquement exécuté Jarry, ce qui ne l’obligeait pas à nommer les Morin, s’il eût tenu ce Jarry pour un plagiaire ? Ainsi averti, il a dû sans doute lui demander des explications, si l’autre n’avait pris les devants, et les trouver satisfaisantes, puisqu’il n’a pas fulminé.

Depuis l’apparition de la brochure de M. Chassé, M. Paul Fort, prince des poètes, est intervenu dans le débat et n’a pas craint d’affirmer à deux reprises, dans Comœdia, que pour lui Jarry était bien l’auteur d’Ubu-Roi. Il a vu le manuscrit, de la main de Jarry, avec de nombreuses surcharges anciennes, et quelques autres corrections d’une encre plus fraîche. Or, M. Charles Morin déclare que son manuscrit à lui, confié par son frère à Jarry, était sans ratures. Ce manuscrit de M. Charles Morin n’a pu être retrouvé ; tant qu’on ne l’aura pas, il planera un doute. Car M. Morin affirme que le texte de Jarry est conforme au sien, à quelques variantes près ; et sa bonne foi est hors de discussion, mais sa mémoire peut le tromper. Elle pouvait déjà le tromper en 1896, puisqu’il y avait alors déjà dix ou onze ans qu’il avait écrit sa pièce (Chassé, page 32).

Provisoirement, voici ce qui paraît probable. Jarry aura travaillé sur le manuscrit de M. Morin, mais comme sur un brouillon de premier jet, en y apportant des modifications qui lui auront semblé, à lui, et qui sont peut-être en effet plus importantes que M. Morin ne pouvait s’en rendre compte à distance. Observez que M. Morin attribue lui-même à Jarry des changements de noms, et notamment l’invention de celui d’Ubu. Quelqu’un disait à M. Chassé, qui le raconte : « Jarry n’eût-il inventé que le nom d’Ubu, ce serait capital. » La remarque est la justesse même, comme on le verra tout à l’heure, et il est vraisemblable que Jarry ne s’en était pas tenu là. Bref, il aura certainement pu croire, dans son for intérieur, non pas à un plagiat, mais à une véritable collaboration, avec des collaborateurs qui refusaient d’être nommés. Dès lors, sa conscience ne lui permettait-elle pas non seulement de toucher (s’il y avait lieu), mais de signer seul, quitte à mettre ses amis littéraires dans la confidence ? Jusqu’à plus ample informé, en l’absence du document qui serait décisif, j’estime que la réputation morale du pauvre Jarry n’est pas gravement atteinte.

Quant à sa réputation d’écrivain, je suis réduit à confesser qu’elle me paraît surfaite. À cet égard, mieux eût valu pour lui qu’Ubu-Roi continuât d’être inaccessible, excepté pour les bibliophiles, millionnaires ou spéculateurs, et qu’on ne le pût juger que sur de lointains souvenirs. Franchement, celui que je conservais de la représentation de 1896 n’était pas merveilleux, et je pensais depuis longtemps que cet Ubu-Roi, ce n’était pas grand’chose. Mais j’étais un peu ébranlé par ce qu’on en disait de divers côtés, et surtout par le fait qu’après vingt-cinq ans cet Ubu n’avait pas sombré dans l’oubli. Il faut déjà qu’une pièce ne soit pas absolument banale pour qu’on se la rappelle encore au bout d’un quart de siècle.

Je sais aujourd’hui qu’il s’en faut peu que ce ne soit rien du tout. À proprement parler, Ubu-Roi n’est qu’un tissu de pauvretés, avec d’énormes facéties scatologiques d’un esprit facile. Ubu conspire, tue le roi, devient roi lui-même, est détrôné à son tour et se sauve en bateau ; il est sale, mal embouché, goinfre, rapace, cruel et couard. C’est tout. C’est, si l’on veut, une parodie de Macbeth, et ce scénario pouvait suffire pour faire un chef-d’œuvre ; mais l’exécution est enfantine. Il est même comique qu’on s’en dispute la paternité. Pour le théâtre de Shakespeare, au moins, cela en vaut la peine. Quant à la pièce intitulée Ubu-Roi, elle existe si peu, que l’identité de l’auteur, ou des auteurs, n’importe guère.

Oui, mais, malgré tout, MM. Charles et Henri Morin dénigrent trop Ubu-Roi au moment même où ils font valoir assez âprement leurs droits paternels. Ils se gaussent sans modération, et M. Chassé avec eux, de la critique de 1896, des Henry Bauer et des Catulle Mendès, qui ont pris au sérieux cette puérile plaisanterie de potaches. Ils en prétendent déduire la condamnation du symbolisme, dont se réclamait Jarry, et de toute une époque littéraire contaminée par les symbolistes. Ils vont trop loin.

La pièce n’existe pas, mais Ubu lui-même existe beaucoup moins par son texte si faible que par son nom, magnifiquement expressif et vraiment trouvé. Ubu existe précisément de la même façon que Polichinelle, Karagheuz, Croquemitaine, la mère Michel ou le père Lustucru. Sous ce nom vaseux et cette silhouette de citrouille ignoble, on peut mettre tout ce qu’on veut, dans l’ordre de la muflerie truculente et de l’horreur burlesque. Ubu est éminemment un personnage de Guignol, et peut-être, dans cent ou deux cents ans, jouera-t-il les premiers rôles dans les petits théâtres de marionnettes. Or, c’est exactement ce qu’avaient dit Mendès et Bauer. M. Gérard Bauer signalait l’autre jour que son père avait conclu : « Le type restera. » Et, en effet, dans cette mesure, il est resté. Le pavé de l’ours, le rapprochement avec Shakespeare, Aristophane, Molière, etc., ne vient que de M. Jean Saltas, dont l’autorité est un peu moindre.

Paul Souday.
Quel est l’auteur d’Ubu-Roi ?
Alfred Jarry, nous répond M. Paul Fort.

Qui a écrit Ubu-Roi ? Alfred Jarry ou Charles M… ? Là-dessus, dans un livre plaisant et farci d’arguments aux airs péremptoires, les Sources d’Ubu Roi, M. Charles Chassé a affirmé que l’auteur véritable était un certain Charles M…, condisciple de Jarry, et que ces farces de collège, recueillies en bribes par Jarry, n’auraient guère été que classées, ordonnées par lui.

Acceptant les conclusions de M. Chassé et plus affirmatif même, M. André Thérive, qui est jeune et n’a pas connu les temps « ubuesques », affirme dans l’Opinion que l’imposture d’Alfred Jarry est indiscutable, que l’auteur de la farce géniale est bien Charles M… et que cet M… que M. Chassé n’a pas nommément désigné, il le nommera, lui, qu’il s’appelle Gabriel-Charles Morin, qu’il naquit en Arles le 8 mai 1869 et qu’il commande actuellement, comme chef d’escadron, l’artillerie de la place de Brest.

Très bien. Toutefois, avant d’affirmer si énergiquement, M. André Thérive n’eût-il pas bien fait de se renseigner auprès des amis vivants de Jarry ; Jarry n’est point mort depuis si longtemps. Ce n’est pas Homère. Des poètes l’ont connu et précisément le prince des poètes, Paul Fort. Paul Fort nous a répondu tout de go :

— Je ne crois pas du tout à ces histoires. Voici dans quelles circonstances Ubu vint au monde. Nous étions trois amis d’Alfred Jarry, Charles Henry-Hirsch, Louis Ulmann et moi, qui le pressions de nous montrer cette pièce dont il parlait toujours. Il fallut aller chez lui, boulevard Saint-Germain, pour la voir. Nous nous trouvâmes en présence de cahiers d’écolier un peu vieillis déjà, et d’une écriture manifestement identique à celle de Jarry, quoique un peu plus jeune. Tout cela était épars, brouillé, sans suite. Çà et là on remarquait quelques corrections, toujours de l’écriture de Jarry mais plus récente.

« Jarry ne voulut rien entendre pour mettre en ordre ces scènes, ces dialogues confus. Nous dûmes nous-mêmes nous mettre à la besogne et classer tout cela. Et voilà comment Ubu-Roi sortit des limbes.

« Puis, vint la période du langage Ubu. Jarry, qui paraissait au fond sans enthousiasme pour son œuvre, hésitait à parler comme ses figures. Puis il s’habitua et ce langage devint en lui comme une seconde nature. Telle est l’histoire exacte de la création d’Ubu-Roi. »

P. B. (Comœdia).
M. Charles Chassé répond à M. Paul Fort. Le Prince des Poètes, en défendant Jarry, défend tous les symbolistes.

En réponse à l’interview parue ici, dimanche dernier, M. Charles Chassé a publié un article dans le Figaro pour défendre sa thèse ; il répète d’ailleurs les arguments contenus dans la lettre que nous avons publiée : M. Paul Fort n’a pas dû expertiser l’écriture, ne soupçonnant pas la supercherie, sa mémoire a pu lui faire défaut, etc… L’article est complété par une lettre de M. Charles Morin adressée à M. Henry Bauer, le 17 décembre 1896, dans laquelle M. Charles M… se déclare avec son frère auteur d’Ubu, et aussi par une lettre de M. Henri M…, adressée à l’auteur des Sources d’Ubu-Roi, lettre qui n’apporte aucune preuve nouvelle, mais sur laquelle nous reviendrons tout à l’heure.

M. Paul Fort avait déjà pris connaissance de cet article quand nous nous sommes rendu chez lui. Il nous a dit avoir été quelque peu surpris de la manière dont M. Charles Chassé met en doute sa mémoire ou sa bonne foi. Voici d’ailleurs ce que le Prince des Poètes nous a dit à propos de ce qu’il appelle avec ironie « l’Histoire du Grand et du Petit Morin » ou « le Chassé-Croisé ».

— Je n’ai jamais prétendu avoir, jusqu’à un certain point, collaboré à Ubu-Roi, j’ai déclaré ceci dans la première interview : « Jarry ne voulut rien entendre pour mettre en ordre ces scènes, ces dialogues confus. Nous dûmes, nous-mêmes, nous mettre à la besogne et classer tout cela. » J’ai ensuite précisé dans quelle mesure nous avions travaillé : classement des scènes, indications typographiques. Ces dernières étaient indispensables, puisque je fus le premier à imprimer « Ubu ». Pour l’écriture, j’avais trouvé bon de ne pas répéter que le texte original et les premières rectifications étaient d’une écriture plus jeune. Cela me semblait tellement évident qu’un enfant de quinze ans n’a pas la même écriture qu’un homme de vingt-cinq ! Je le répète donc, puisqu’il plaît à M. Chassé de me l’entendre dire à nouveau. Mais j’affirme me souvenir assez exactement de l’aspect du manuscrit pour dire que c’était bien là l’écriture de Jarry. Et pourquoi ma mémoire serait-elle moins fidèle que celle de MM. Morin, qui ont pu rétablir le texte exact d’Ubu-Roi en marge d’une édition du Perhinderion, et cela en 1907 ou 1908 (les Sources d’Ubu-Roi, page 45), il faudrait une mémoire surprenante pour se souvenir, après plus de vingt ans, de différences aussi insignifiantes que celles signalées par M. Chassé. L’article de M. Chassé est fait dans une forme tendancieuse qui cherche à laisser croire que je m’attribue ce que je n’ai pas fait, ou à me prêter un rôle que je n’ai pas tenu.

Si l’on s’arrête à de semblables détails, je pourrais répondre par certaines irrégularités contenues dans le livre, car j’ai lu les Sources d’Ubu-Roi, quoi que l’auteur prétende, j’ai vu, entre autres choses, que M. Chassé n’a pu rencontrer que M. Ch. M…, que les renseignements fournis par M. Henri M… sont le résultat d’une correspondance ; cependant, M. Chassé écrit, à la page 70 : « C’est sur ces conclusions souriantes et bien objectives que j’ai quitté les frères M… », ce qui semble signifier qu’il avait rencontré MM. Ch. et H. M… !

Mais je ne veux pas attacher d’importance à ces petites choses. Le débat soulevé par M. Chassé est beaucoup plus important, il ne tend à rien moins qu’à demander la revision de toute l’époque symboliste et des jugements portés sur les grands écrivains qui l’ont illustrée.

Je n’en veux pour preuve que deux lettres de M. Henri M…, celle citée dans les Sources d’Ubu-Roi (page 68) : « Croyez bien que ce ne fut pas pour nous une mince satisfaction que de voir patauger à fond les Catulle Mendès, Henri Bauer et autres princes de la critique du moment. Être seul à le savoir augmentait encore notre plaisir, et je partage assez l’avis de mon frère lorsqu’il vous dit que le succès d’Ubu-Roi donne la mesure de la bêtise d’une époque. » Et celle publiée par le Figaro, dont voici la conclusion : « J’étais parfaitement persuadé que l’insuccès serait complet et définitif. J’avais compté sans tous les facteurs dont vous avez exposé l’influence. Il est bien certain que tous les gens de goût et de bon sens vous seront reconnaissants d’avoir procédé très consciencieusement à cette petite lessive. »

Ainsi l’époque symboliste est une époque où la bêtise domine puisque Ubu a eu du succès. Il faut donc nier tout le symbolisme ou plus simplement reviser les valeurs, mais déjà les mauvais symbolistes ont disparu de la mémoire. Il nous faut donc nier ou tout au moins douter maintenant de Rimbaud, Verlaine, Mallarmé, Henri de Régnier, Jean Moréas, Albert Samain, Paul Claudel, Maurice Maeterlinck, Émile Verhaeren, Maurice Barrès, Rachilde, André Gide, Francis Jammes, Stuart Merrill, Vielé-Griffin, Fernand Gregh, Van Lerberghe, Louis Le Cardonnel, Paul Adam, Charles Guérin, etc… Il faudrait même douter de Jules Laforgue et Paul Valéry, dont l’influence est si directe sur la jeune poésie ; et que dire de Spire, Salmon, Apollinaire, car en réalité c’est au Symbolisme que M. Chassé s’attaque, et l’article du Figaro ne prouve rien d’autre.

Lettre adressée par Alfred Jarry à Catulle Mendès, le 15 décembre 1896, après la première représentation d’Ubu-roi au Théâtre de l’Œuvre, le 10 décembre 1896.

Lorsque Henry Bauer reçut la lettre où M. Ch. M… se disait avec son frère auteur d’Ubu, il dut sans aucun doute la montrer à Jarry, et ce dernier a, très certainement, donné des preuves que Ubu-Roi était son œuvre, sans quoi Bauer n’aurait pas continué à dire son admiration pour Jarry et il ne lui eût point conservé son amitié.

Non, je crois qu’en réalité M. Chassé veut attaquer le Symbolisme. J’espère que tous les poètes vont se lever. Et surtout qu’on ne vienne pas nous opposer le classique, nous aimons, nous admirons les classiques autant que n’importe qui. »

La lettre que nous reproduisons ci-dessus, adressée par Jarry à Catulle Mendès, montre que Jarry n’avait pas voulu faire d’Ubu un simple fantoche. On pourrait dire qu’il profitait du bruit fait autour de sa pièce pour atteindre la gloire et se ménager des sympathies. De l’avis de ceux qui l’ont approché ou ont compté parmi ses amis, cette hypothèse est peu probable. Il eût fallu qu’il s’observât continuellement et qu’il supportât la honte de devoir le succès à une œuvre dont il n’était pas l’auteur. En ce cas, eût-il osé envoyer de tels remerciements ?

La question semble devoir rester insoluble tant que le précieux manuscrit ne sera pas retrouvé.

Si cependant l’affaire Ubu prend l’aspect que suppose M. Paul Fort, peut-être allons-nous assister à nouveau aux grands combats littéraires d’autrefois.

Raymond Cogniat (Comœdia).

Je recite un paragraphe de l’article de Paul Souday à propos de la réédition d’Ubu-Roi par Fasquelle, et la malicieuse douceur du critique du Temps fait plus pour la cause de son auteur que n’importe quelle violente diatribe : « On conçoit que si ce chef-d’œuvre n’est pas d’Alfred Jarry, l’auteur véritable ait enfin résolu de se faire connaître et de revendiquer sa place parmi les génies, à côté, ou peut-être même un peu au-dessus, d’Aristophane, de Rabelais, de Shakespeare et de Molière. C’est bien tentant. » Il était moins tentant de se mesurer avec la foule hurlante de la première représentation. Et plus loin, Paul Souday ajoute : « … la recherche des sources, plagiats et faux états civils, est en général une spécialité universitaire… donc, M. Charles Chassé[1] déclare qu’Ubu-Roi n’est pas d’Alfred Jarry, mais des frères Charles et Henri M… dont il a promis de ne pas publier le nom en toutes lettres ; mais on l’a donné ailleurs au cours des polémiques provoquées par l’incident ; et ce nom est Morin. » Nous sommes en présence d’un professeur, d’un homme sérieux qui tient à faire la lumière sur un prétendu plagiat et qui ne fait pas toute la lumière, qui ne dit rien d’essentiel, publie une plaquette, ma foi fort luxueusement éditée, pour nous expliquer une mystification qui nous mystifie de plus en plus puisqu’il ne nous apporte ni les noms propres ni les preuves palpables, c’est-à-dire le vrai manuscrit écrit par le ou les véritables auteurs. Pour le simple public, c’est au moins curieux comme explication. J’admets parfaitement que M. Charles Chassé puisse avoir eu un certain plaisir à écouter les récits des amis de collège de Jarry, mais je ne saisis pas bien l’importance de sa brochure en face du présumé plagiat, quand il avoue ne rien savoir de plus que ce qu’on lui raconte sous le couvert d’un épais manteau. Il a toujours été entendu, et Jarry le disait lui-même, que tout un collège avait collaboré au travestissement d’un pauvre brave homme de professeur en un monstre de baudruche gonflé de toutes les inepties que des enfants sans pitié pouvaient lui avoir soufflé. Jarry ne s’est jamais caché d’avoir érigé en bouc émissaire le malheureux père Hébé ou Hébert (Dieu garde son âme si ça peut le consoler de ses déboires terrestres !). Qu’il prenne la suite des plaisanteries du collège en question et qu’il accepte tous les documents apportés par les anciens ou les nouveaux camarades, il ne l’a jamais nié, il a même parlé des frères Morin. Mais une pièce comme celle d’Ubu-Roi, malgré son apparent décousu, ne se fait pas toute seule, la loi du théâtre étant, justement, d’enchaîner. Or, c’est dans les dessins du texte de M. Charles Chassé que je vois nettement la différence qu’il peut y avoir entre les fantaisies, d’ailleurs très drôles, de deux… futurs officiers d’artillerie et celles d’un homme de génie (je maintiens le mot parce que le génie consiste à faire unique l’image que n’importe qui se trace d’un individu ou du ridicule de cet individu). On n’a qu’à confronter les pères Hébé ou Hébert de Messieurs Morin avec le dessin d’Alfred Jarry donné dans un article de Comœdia comme véritable portrait du père Ubu, et on comprendra ce que je veux dire.

Ce n’est pas moi qui m’attache à prouver le contraire de ce que veut prouver la brochure de M. Chassé, c’est tout simplement le bon sens, ce qu’on appelle, en matière juridique, la recherche de la preuve légale ; quant à la preuve dite morale, j’espère que l’on ne se soucie pas d’elle, étant donnée l’étrange manière dont les frères Morin ont tourné la difficulté : « Croyez bien que ce ne fut pas pour nous une mince satisfaction que de voir patauger à fond les Catulle Mendès, Henri Bauer et autres princes de la critique du moment. Être seul à le savoir augmentait encore notre plaisir et je partage assez l’avis de mon frère lorsqu’il vous dit que le succès d’Ubu-Roi donne la mesure de la bêtise d’une époque. » Oh ! oh ! L’époque symboliste, une époque de la bêtise littéraire !…

Alors, Messieurs, nous allons essayer d’élargir le débat. Nous avons quelquefois, nous, les critiques, un certain respect pour ce qu’on appelle, à toutes les époques : ces cochons de payants ! Mais nous ne les convions pas à juger nos personnels plaisirs parce que nous savons très bien qu’ils ne peuvent point se placer à notre point de vue, qui est celui de la question d’art pur. Il est clair que le monstre Ubu, né de Jarry ou de la collaboration du couple Jarry-Morin, est une création unique dans l’histoire de tous les Guignols humains ou inhumains. MM. Morin ont, paraît-il, écrit à Bauer la veille de la représentation d’Ubu-Roi pour l’informer d’une méprise possible. Or, comme le dit Paul Souday : « À qui persuadera-t-on que Bauer, le bouillant Don Quichotte de la critique, n’eût pas publiquement exécuté Jarry, ce qui ne l’obligeait pas à nommer les Morin, s’il eût tenu ce Jarry pour un plagiaire ? »

Et d’une !

Maintenant, logiquement, où réside le sadique plaisir de ces Messieurs (il y a sadisme dès que sensation de mal faire, de nuire), puisqu’ils avaient enfin déclaré la vérité ? Un Bauer, un Mendès, tout en faisant un assez triste sort à la pièce d’Ubu-Roi en tant que pièce, ne constataient qu’une chose absolument évidente : c’est qu’un nouveau type de Guignol venait de naître, et celui-là ne naissait pas de la bêtise d’une époque ni de l’incompréhension d’une élite, il sortait tout vivant de la cervelle des potaches…, car la vérité sort quelquefois de la bouche, de la plume ou du crayon des enfants. Les grandes personnes ne sont nullement des imbéciles quand elles reconnaissent ou subissent le frisson que la vérité promène comme un fer rouge sur les intelligences même bornées.

Et de deux !

En troisième lieu, les Morin, que nous pourrions peut-être, si nous étions le palotin Jarry, renvoyer à leurs propres pièces, nous paraissent, de plus en plus, en qualité d’officiers d’artillerie, avoir éprouvé une frousse intense de leur enfant né, ou mort-né, un peu bien encombrant, puisqu’ils ont attendu si longtemps l’occasion de lever le voile de l’anonymat. C’est à la réédition de cet Ubu-Roi de Fasquelle, précédée d’une préface que Jarry eût reniée de toutes ses forces, car il aurait tout de suite compris qu’il était bien inutile d’en appeler à Shakespeare, à Rabelais ou à Molière à propos de son fantoche. Je l’entends même murmurer entre ses dents : « Ils nous font trop d’honneur : il nous suffît bien d’être nous ! » Si les Morin n’attachaient aucune importance à leur production, ils devaient continuer à se taire, en ayant fait le don absolu à leur camarade de collège, ou, réclamant, ils devaient prouver, jusqu’au dernier argument, leurs droits d’auteurs. Quant à risquer le procès d’une époque un peu plus fertile en génie de toutes sortes que celle-ci et surtout moins intéressée dans la question de phynance, ce n’est point de leur ressort. Ils ont certainement fait noblement la guerre et c’est là que le fantôme d’Ubu-Roi a dû prendre, pour eux, les proportions gigantesques d’une sombre prophétie. Il y a des mythes qui grandissent avec les époques, et la bêtise du mythe Ubu nous écrase à présent de toute sa sinistre et cynique majesté.

Et en dernier lieu, moi aussi je vais m’offrir le sadique plaisir de leur dire, ou de lui dire (s’il n’en reste plus qu’un et que ce puisse être celui-là) que, moi, je sais ce qui a empêché la vérité de sortir de l’ombre… au moins avant la mort de l’auteur présumé. Non seulement je connais cet intime dessous, mais j’en ai eu les preuves, absolument comme M. Charles Chassé[2], par de très intéressants racontars, que j’ai peut-être eu le tort d’écouter ; mais, moi, beaucoup plus fort qu’eux, ou que lui, en sadisme littéraire : je ne parlerai pas.

  1. Les Sources d’Ubu-Roi, par Charles Chassé, H. Floury.
  2. D’une lettre qui m’est adressée par M. le professeur Charles Chassé, je tiens à extraire ce paragraphe qui tendrait à prouver qu’Alfred Jarry aimait, en effet, à mystifier les gens : « En avril 1923, dans la Grande Revue, un article de moi intitulé : D’Ubu-Roi au Douanier Rousseau, où je montrais comment Jarry avait inventé le Douanier et où je citais la plaidoirie de Me Guilhermet pour Rousseau, Guilhermet y disait : « Jarry a fait deux chefs-d’œuvre : Ubu-Roi et Rousseau. C’est lui qui avait trouvé Rousseau et alors, avec un certain nombre de littérateurs, de journalistes, on a imposé Rousseau à l’opinion publique. »
    Aujourd’hui les journalistes reprennent volontiers la mystification, mais, plus naïfs, ils ont le ton sérieux que leur donnent les marchands de tableaux, créateurs de fausses gloires :
    « Henri Rousseau le Douanier, par Philippe Soupault (aux Éditions des Quatre-Chemins). — Il n’est pas surprenant que M. Philippe Soupault, auteur d’une étude sur Apollinaire, se soit intéressé au douanier Rousseau. Son intérêt, en tout cas, s’est transformé en admiration, en affection même. « C’est le plus grand « peintre du xixe siècle », nous affirme-t-il. Ne cherchons pas à établir s’il a raison ou tort de pousser un tel cri d’enthousiasme. Un fait reste : il a consacré une biographie intelligente et émue à l’étonnant primitif qui s’était égaré parmi nous et qu’Alfred Jarry avait eu le grand mérite de découvrir.
    « L’ouvrage contient 40 planches qui reproduisent excellemment les œuvres les plus significatives. » (De l’Intran.)