Cham - Albums du Charivari/Cham au Salon de 1863

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Journal le Charivari (1p. 73--).


CHAM

DE 1863
— Mon Dieu ! mon Dieu ! plus que trois jours
pour l’Exposition et je n’ai pas encore trouvé le
sujet de mon tableau !


MAISON MARTINET
172, rue de rivoli, et rue vivienne, 41

— Factionnaire, je viens de leur remettre mon tableau ; vous aurez soin, s’il vous plaît, de ne pas le laisser ressortir.

— Comment, messieurs, vous refusez son pauvre tableau ?

— Oui, ce n’est pas de la peinture de maître.

— Monsieur, c’est moi qui suis son domestique et je n’y ai pas touché !

— Mais il n’est pas terminé, ce tableau !

— Non, messieurs, mais le peintre m’a chargé de vous remettre la palette et sa boîte à couleurs, pour que vous terminiez ça à votre idée !

Un peintre ayant l’idée de confier son tableau à un gentleman rider qui se charge de franchir l’obstacle du jury.

— Inutile de vous représenter avec cette statue ; on vous a dit qu’elle était trop nue !

— Mais, mochieu, je viens de lui mettre une veste !

État alarmant dans lequel se sont trouvés plusieurs membres du jury après être restés quelques instants sous l’influence de la peinture de M. Courbet.

— Allons, messieurs, un peu de courage ! il ne reste plus que deux cents batailles de Solférino à examiner, puis nous passerons aux batailles de Magenta.

— Ah ! mon Dieu ! pourvu qu’ils n’aient pas pensé au Mexique !

— Mochieu Courbet, ch’sommes bien content ; je me sentirons plus à notre aise chez vous ! Paraît que vous venez d’avoir une veste… ça fait que nous aurons chacun la nôtre !

M. Proudhon travaillant désormais aux tableaux antireligieux de M. Courbet.

— Comment, monsieur, on a refusé le portrait que vous avez fait de moi ?

— Madame, on a trouvé que votre embonpoint insultait dans ce moment à la misère des ouvriers cotonniers qui n’ont rien à manger !

Le Charivari propose que M. Crockett soit nommé désormais du jury de peinture pour juger les animaux de Mêne, Cain et Frémiet.
Le Charivari propose que tout membre du jury appelé à juger un tableau d’animaux soit mis en face du modèle, afin qu’il soit bien à même de savoir ce qui peut y manquer.
Le Charivari propose que tout membre du jury atteint et convaincu d’avoir refusé un bon tableau soit condamné à le porter un an pendu au cou.

— Ayez pitié de six pauvres aveugles, s’il vous plaît !

Si M. Offenbach a obtenu un succès avec deux aveugles, jugez de celui que va remporter le peintre ci-dessus avec six.

Quoique très-bien ficelé, un monsieur se tient au fond de sa barque, M. Gérôme lui ayant dit qu’il n’était pas assez bien mis pour se faire voir. (Autre farce de cet artiste !)

— Mes tableaux de chiens, où sont-ils ? Je ne les vois pas !

— Excusez, monsieur Jadin, on se sera trompé, on les a envoyés à l’exposition du jardin d’Acclimatation.

Absorbées dans le chant du choral de Luther, des jeunes filles ne s’aperçoivent pas qu’elles vont emmêler leurs bras au point de ne plus pouvoir ensuite les débrouiller.

Si elles marchent dans la même voie que M. Charles Marchal, elles sont dans la bonne.

Néron consulte sa mère au sujet de son nouveau bas élastique.
Ce que M. Courbet sait faire d’une jolie femme, — car nous parierions que la dame qui a posé pour ce portrait est très-jolie.
Renard mourant inconsolable de s’être laissé forcer par un cheval qui avait des jambes en manches de veste.

Nota. Ce tableau a été exécuté par le jeune Toto Courbet, âgé de trois ans, fils de M. Gustave Courbet, le fameux peintre.

Un petit serin, trompé par la forme d’une lampe antique, se pose dessus et éteint la mèche au grand désespoir de deux dames qui allaient s’en servir pour descendre à la cave.
Le soleil ayant perdu un de ses rayons le retrouve dans le tableau de M. Comte : Louis XI chassant des rats.
Un cavalier saisit son pistolet pour échapper à la surveillance de son cheval qui a constamment l’œil sur lui. M. Yvon abuse peut-être de la nouvelle liberté de la boucherie mais avec du talent on se fait tout pardonner.
Ne reconnaissant aucunement la figure du roi Louis XIV, Molière se doute que M. Gérôme lui a fait une farce. En effet, il se trouve souper avec un affreux Auvergnat qui garde chon chapeau chur sa tête pour manger cha choupe.
Un chien venant de manger son maître néglige sa canne et son chapeau, dans la crainte de se charger l’estomac.
Ne sachant pas au juste où se trouve la bouche de son enfant, une jeune mère lui donne à boire par le front. Des bœufs s’empressent de bien brouter, afin de prendre du corps et de ne plus être tout en tête.
Air de : la Colonne.

Ah ! qu’on est fier d’être Autrichien
Quand on regarde l’exposition !

Un tigre dévore son petit plutôt que de toucher à des bourgeois qui lui ont été recommandés par M. Gustave Doré.
LES LUNDIS DE M. HÉLIOGABALE.
Voulant s’en tenir à un petit cercle d’amis, Héliogabale s’arrange de façon à en faire manger la moitié.
En proie à une abominable colique et cherchant un endroit écarté, César trouve que son armée est passablement indiscrète de le suivre ainsi.
Portrait de M. Dupin ! à force de le peindre tous les ans on finira peut-être par le faire ressemblant. Séduite par un récureur d’égouts une vestale descend lui demander quelles sont ses intentions.
Une enfant tellement bien élevée que ses pieds n’en touchent plus par terre. Chien de chasse heureux et fier que ses pattes soient faites exactement comme les jambes et les pieds de son maître.
Officier français remerciant un mandarin chinois pour l’empressement avec lequel il vient faire acte de soumission.
L’enfant s’étant mis tout nu, la mère, par un sentiment de juste pudeur, le place dans une machine en bois qui le cache à tous les yeux.
Une jeune fille mange le bras de sa maman pour voir si ses parents sont bons. Jeune veuve pleurant son mari qui était rôtisseur.
N’aurait-elle rien à se rebrocher ? (pensée d’un Allemand.)
Un peintre ayant eu l’excellente idée de faire placer son tableau au-dessus de la buvette, on est bien forcé de le voir en buvant.
Un malheureux paysan fouille partout avec sa pioche dans l’espoir de retrouver l’autre moitié de sa tête que M. Millet lui a cachée quelque part.
On ne s’expliquerait pas pourquoi cet enfant s’est mis tout nu si en regardant dans le fond du tableau on ne découvrait que c’est une manie de famille.
Vénus met sa ceinture pour ne pas s’enrhumer.
Le grand Condé revient de la bataille de Senef pour demander à Louis XIV l’autorisation de jouer le rôle de Chabannais dans les Chevaliers du Pince-Nez.
Cyclopes craignant de montrer leurs figures ; chacun comprend la pudeur à sa manière.
LE REPOS, PAR M. PUVIS DE CHAVANNES.
Chaque personnage a eu soin de ne pas prendre une pose fatigante, afin de bien se reposer.
Louis XIII refuse d’aller à quatre pattes comme toute sa cour, dans la crainte de casser ses bretelles.
Anacréon ayant le tort de dîner en plein vent à une époque où les moineaux vont chez le marchand de vin.
De crainte qu’on ne salisse les escaliers Cléopâtre fait monter Marc Antoine par la fenêtre, afin de ne pas avoir de raisons avec son portier.
Charles-Quint surprend la duchesse d’Estampes en train de ramasser des bouts de cigares : histoire de faire un petit commerce.
La chanson.
J’engage les mamans à ne pas la laisser chanter à leurs filles, elle me paraît un peu décolletée.

— Excusez-moi, madame, mais je suis tellement pressé par l’Exposition qui va prochainement s’ouvrir que je n’ai pas le temps de m’habiller.

— Mais j’avais payé pour mon portrait avec les mains !

— Oui, madame, mais cette année les mains ont moins de succès que les pieds.

— Catherine, qu’est-ce vous avez à venir ainsi me réveiller à quatre heures du matin ?

— Madame, c’est le peintre qui fait dire que madame aille tout de suite chez lui pour qu’il ait le temps de finir son portrait pour l’Exposition !

— Je ne serai pas refusé ! j’aurai les sympathies du jury : j’ai fait porter mon tableau par un Polonais.

— Et moi le mien par un ouvrier cotonnier.

Caton casse son cordon de sonnette en sonnant le matin pour qu’on lui apporte son journal. Figure à secret s’ouvrant avec une clef, exécutée par un peintre, aidé des conseils d’un habile serrurier.
PORTRAIT DE FRANC-PICARD.
Vous pouvez considérer la tête comme étant à droite ou à gauche, ceci est facultatif ; de même pour la queue, le peintre n’ayant pas voulu fatiguer l’attention du public.
ÉPISODE DU TABLEAU 1802.
Un chien de chasse laisse faire son ouvrage par des racines d’arbre qui ont emprunté la forme canine pour la circonstance.