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Croyances et légendes du centre de la France/Tome 1/Livre 01/08

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CHAPITRE HUITIÈME

FÊTES DU SOLEIL ;
LA SAINT-JEAN ; — LA JÔNÉE ;
LES JEUX DE L’ÉTEUF ET DE LA SOLE ; — LES MICHELETS ;
SAINTE SOLANGE, ETC.

Ô soleil !…
Le jour où, séparant la nuit de la lumière,
L’Éternel te lança dans ta vaste carrière,
L’univers tout entier te reconnut pour roi ;
Et l’homme, en t’adorant, s’inclina devant toi…

(Lamartine, Hymne au soleil.)

Les peuples se réjouiront à la naissance de Jean.

(Évangile selon saint Luc, i, 14.)

Jean était une lampe ardente et brillante, et vous aviez voulu, pour un peu de temps, vous réjouir en sa lumière.

(Évangile selon saint Jean, v, 35.)

C’était la véritable lumière qui éclaire tous les hommes en venant au monde.

(Ibid., i,9.)


La jônee, ou joanée, ou jouannée, n’est autre chose que le feu de la Saint-Jean. L’on dit faire la jônée, allumer la jônée :

« Nous ferons la jônée de Saint-Jean en arrivant au bourg et nous ouvrirons gaiement la danse tous les deux. » (George Sand, les Maîtres sonneurs.)

Dans nos villages, la veille de la Saint-Jean (23 juin), à la tombée de la nuit, chaque famille fournit, selon ses facultés, un ou plusieurs fagots pour faire la jônée. On empile ces fagots au pied et le long d’une perche fichée en terre sur le lieu le plus éminent des environs ; et la jônée que l’on dresse ainsi, toujours autant que possible sur une élévation, rappelle « le père-feu des Gaulois allumé, le premier mai, sur la montagne de la guerre[1] » ; elle rappelle encore « le Bel tan, ou feu du dieu Bel, que les Celtes d’Irlande, selon M. A. Pictet, allumaient, à la même époque, sur les montagnes, en l’honneur du soleil[2]. » On trouve aussi dans un autre chant du Barzaz-Breiz, le passage suivant : « Au sommet des Montagnes noires, la veille de la fête du bon Jean, trente paysans étaient réunis autour du feu de joie du père… » Enfin, c’est toujours par suite de ces vieilles traditions que, dans certains cantons de la Suisse, le sommet des glaciers resplendit, chaque année, des feux de la Saint-Jean.

Dans les hameaux, c’est le vieillard le plus avancé en âge de l’endroit qui met le feu à la jônée ; dans les bourgs, c’est ordinairement à M. le curé ou à M. le maire que cet honneur est dévolu. — On sait qu’à Paris, encore dans la dernière moitié du dix-septième siècle, ce privilége appartenait au roi en personne qui, chaque année, se rendait sur la place de Grève et allumait le feu de la Saint-Jean, après en avoir fait trois fois le tours[3].

À peine les fagots commencent-ils à pétiller et à se tordre sous l’étreinte des flammes, que tous les assistants, jeunes et vieux, se prennent par la main et se mettent à danser des rondes autour de la jônée. Les jeunes filles surtout se livrent à cet exercice avec beaucoup d’entrain ; car elles savent qu’en dansant ainsi autour des neuf feux de la Saint-Jean, elles se marieront infailliblement dans l’année. — Les danseurs ne s’arrêtent que pour activer, au moyen de longues perches, l’ardeur du brasier et en faire jaillir des jets de flammes et d’étincelles.

Cette danse rapide et circulaire est un souvenir des lustrations par le feu en usage chez plusieurs peuples de l’antiquité. Les Grecs, entre autres, dont l’année commençait au solstice d’été, et qui célébraient la fête du soleil ou d’Apollon précisément à cette époque, croyaient qu’en certaines occasions, il suffisait de tourner autour du feu pour se purifier[4]. C’est pourquoi, chez eux, le cinquième jour de la naissance d’un enfant, la nourrice le prenait entre ses bras et courait plusieurs fois autour du foyer[5].

Tandis que la joyeuse farandole s’agite en chantant devant le feu de la jônée, les jeunes gens les plus lestes s’en détachent de temps à autre, et s’élancent à plusieurs reprises, et non sans danger, à travers les flammes de l’incendie. — On regarde cette formalité comme une sorte de purification qui chasse les maladies et qui doit porter bonheur à ceux qui l’accomplissent. Aussi les pères et les mères ont-ils soin, lorsque la flamme est tombée, de prendre les petits enfants dans leurs bras et de leur faire traverser le brasier de la jônée. En plusieurs pays, on le fait même franchir au bétail dans l’intérêt de sa conservation. Ces coutumes s’observent aussi dans quelques contrées de l’Allemagne où le feu de la Saint-Jean porte le nom de Rettungsfeuer (ignis salutaris), et on les retrouve encore en Galicie et en Ukraine, où les jônées sont désignées sous le nom de bains solaires (kupallo). Cette pratique était également connue des Hébreux, et Moïse la condamne comme impie. Le Lévitique[6] et le Deuteronome[7] disent positivement : — « Il ne se trouvera personne parmi vous qui fasse passer par le feu son fils ou sa fille. »

Cette espèce de régénération, de baptême par le feu, était l’un des principaux rites religieux parmi les nations qui adoraient le soleil. Les Chananéens, aux superstitions desquels Moïse fait ici allusion, ainsi que les Phéniciens, les Carthaginois, etc., professaient le sabéisme ou culte du feu, et le dieu qu’ils nommaient Bel, Belus, Baal ou Moloch, n’était pas autre chose que le soleil. On a vu que les Gaulois, nos ancêtres, sous des appellations analogues (Bel, Belenus), rendaient également un culte à cet astre. Ils lui attribuaient, — chose à noter, — le pouvoir d’éloigner les maladies[8]. Enfin, en Écosse, où la religion de Baal persista si longtemps, le baptême du feu n’a pas cessé d’exister. Les montagnards de ce pays sont encore dans l’usage de mettre leurs enfants dans un sac avec des fragments de pain et de fromage et d’exposer le tout aux flammes[9].

Les coutumes écossaise et berrichonne, quant à ce qui concerne la suspension des enfants au-dessus des brasiers, peuvent aussi être considérées comme un souvenir ou une imitation, plus ou moins atténuée, des barbares sacrifices que l’on offrait, chez certains peuples, à Baal ou à Moloch, dont les statues d’airain, à tête de taureau et à poitrine d’homme, contenaient plusieurs cavités, où l’on enfermait, dans les unes, des enfants ; dans les autres, de la farine, des singes, des brebis, etc., que dévoraient d’immenses bûchers allumés aux pieds des idoles[10]. Affreux holocaustes que l’on retrouve encore, chez les Gaulois, dans ces victimes humaines qu’ils brûlaient toutes vives, après les avoir emprisonnées dans des mannequins d’osier ; imitant, en cela, les Hindous, leurs aïeux, qui, eux aussi, sacrifiaient des hommes à leur déesse Cali, surnommée l’horrible[11]. — Au reste, des usages semblables s’observent dans le nouveau comme dans l’ancien monde ; car, de temps immémorial, toutes les peuplades sauvages de l’Amérique ont sacrifié une partie de leurs enfants à quelques-unes de leurs divinités.

Par la suite, les peuples dont la civilisation avait adouci les mœurs, remplacèrent ces atroces exécutions par des sacrifices où l’on ne livrait plus aux bûchers que des animaux vivants. Il en fut ainsi chez les Sabéens dans la solennité qu’ils consacraient à leur déesse Baaltis ou Beltha (la lune) ; il en était de même chez les Grecs, lors de la fête d’Apollon et de Diane, qui se célébrait au mois de mai[12].

Quant aux Français, ils substituèrent aux sauvages hécatombes de leurs pères des auto-da-fé de chats et de renards. À Paris, à Metz, et dans quelques autres villes de France, on plaçait sur le bûcher de la jônée un sac de toile ou une grande cage renfermant une vingtaine de chats et quelquefois des renards, que l’on brûlait tout vifs. Un approvisionneur patenté était chargé, à Paris, de fournir ces malheureux quadrupèdes, car on lit dans le budget de cette ville pour l’année 1573, l’article suivant : — « À Lucas-Pommereulx, l’un des commissaires des quais de la ville, cent sols parisis, pour avoir fourni durant trois années tous les chats qu’il fallait audit feu, comme de coutume ; même pour avoir fourni, il y a un an, où le roi assista, un renard pour donner plaisir à Sa Majesté, et pour avoir fourni un grand sac de toile où étaient lesdits chats. » — Cet usage exista jusque dans les premières années du siècle de Louis XIV. — Ne serait-ce pas comme ennemis du soleil ou de la lumière que les chats et même les renards, animaux de proie nocturnes, étaient sacrifiés en cette circonstance ?

Quoi qu’il en soit, une coutume semblable existait chez les Hindous. D’après les Védas, dans quelques-uns des sacrifices que ces peuples offraient au soleil, « on n’immolait pas moins de 609 espèces d’animaux domestiques et sauvages, et ces animaux étaient également emprisonnés dans des cages, des filets ou des coffres[13]. »

Mais revenons en Berry.

Dans quelques-uns de nos villages, les enfants allument de longues gaules sèches au feu de la jônée, et s’amusent, en courant çà et là, à tracer dans l’air des orbes étincelants. On serait tenté de croire qu’ils simulent ainsi le disque du soleil, et que cet usage n’est pas sans analogie avec celui des Poitevins, qui consiste à promener dans la campagne, la veille de la Saint-Jean, une roue dont la circonférence est garnie de paille enflammée.

Lorsque la jaunée est éteinte, chacun des assistants, avant de se retirer, recueille religieusement quelques-uns des camichons (tisons ou charbons) du feu de joie. Ces camichons ou camochons, trempés dans l’eau bénite[14], ont la propriété de préserver la maison de toute espèce de malheur et particulièrement du feu de la foudre. — À propos de ces camichons, nous remarquerons que Sauval, qui nous a transmis le détail des frais faits par la ville de Paris, à l’occasion de la jônée qui fut célébrée sur la place de Grève en 1573, parle d’une sorte de friandise appelée camichon, qui fut servie à Charles IX dans la collation que lui donna l’Hôtel de Ville, à l’issue du feu de la Saint-Jean. Or cette sucrerie était, selon toute probabilité, un bonbon de circonstance qui faisait allusion aux camichons de la jônée.

Il est bien généralement reconnu que les feux de la Saint-Jean sont un reste du culte que tous les peuples du monde ont tour à tour rendu au feu ou au soleil. Cet astre étant la source de la lumière et de la chaleur, c’est-à*dire le principe de toute existence, il fut presque partout le représentant par excellence de l’Être suprême. — C’est si bien en l’honneur du soleil que tous ces feux sont allumés, qu’en Ukraine, tandis que la jeunesse danse autour des jônées, les vieillards, postés sur les hauteurs, guettent les premières lueurs de l’aube, et appellent le soleil en frappant leurs faux les unes contre les autres.

On sait que les Perses ainsi que les Égyptiens allumaient, à minuit, au moment du solstice, des feux sacrés. Ce culte a persisté jusqu’à nos jours chez plusieurs nations de l’Orient. Les Gaulois l’avaient sans doute apporté de l’Asie, leur berceau. Peut-être encore le tenaient-ils des Phéniciens qui, dans leurs courses fréquentes à travers le monde alors connu, semblent avoir autant cherché à propager leurs théogonies qu’à étendre leurs relations commerciales. Ce qui rendrait vraisemblable cette dernière hypothèse, ce sont les nombreux rapports qu’un savant genevois, M. Adolphe Pictet, a découverts entre le druidisme et le cabirisme, religion de la Phénicie.

Quoi qu’il en soit, la fête de la jônée, comme tant d’autres de nos usages, a dû primitivement prendre naissance dans l’Inde, d’où elle s’est répandue par toute la terre. Les populations de l’Hindoustan, dans leur fête du Feu, appelée en tamoul Nezoupyson tirounaï, suivent encore aujourd’hui les principaux rites qui s’observent, chez nous, lors de la célébration de la jônée : immense brasier autour duquel danse la foule, et par-dessus les charbons duquel elle saute, en portant des enfants dans ses bras ; débris de l’incendie pieusement recueillis par les assistants, etc., etc. ; tous ces détails signalent aussi bien la solennité hindoue que la solennité berrichonne[15].

Quant à l’étymologie de nos termes,[16] et joanée, elle se trouve expliquée d’une manière très-satisfaisante dans les lignes suivantes : — « Le concours des deux fêtes de Saint-Jean (24 juin et 27 décembre) avec les solstices, a quelque chose de mystérieux par la conformité de ce nom avec celui de Janus, qui, chez les Romains, présidait aux équinoxes comme aux solstices, et dont les Saliens prononçaient le nom Janès, les Grecs Johannes, les Hébreux Johnan,  etc.[17]. » — C’est ainsi que la haille, ou jônée des habitants des Landes, rappelle encore le nom que portait le soleil chez les Grecs : hêlios. — Mais ce qui démontre jusqu’à la dernière évidence que Jean, Janus et le soleil ne font qu’un, c’est un passage de Macrobe[18] où il est dit que, chez les Romains des premiers siècles, le soleil s’appelait Janus et la lune Jana ; c’est encore, et surtout, cette déclaration de saint Jean l’évangéliste, lorsqu’il parle de son homonyme Jean le Précurseur : « Jean était la véritable lumière qui éclaire tous les hommes en venant au monde… Jean était une lampe ardente et brillante,… etc. »

Nous avons observé dans quelques hameaux de la commune de Lacs, près la Châtre, une autre coutume dont on doit sans doute encore faire remonter l’origine au temps où florissait le culte du soleil. — Tous les ans, aux approches de l’équinoxe du printemps, les jeunes filles de la campagne vont cueillir dans les prés une grande quantité de fleurs de primevère[19], dont elles composent de grosses pelotes dorées qu’elles s’amusent à lancer dans les airs. De très-vieilles personnes nous ont assuré que cet exercice était anciennement accompagné d’un chant bizarre et presque inintelligible, où les mots : grand soulé ! p’tit soulé ! (grand soleil ! petit soleil !) revenaient à plusieurs reprises et en manière de refrain.

Ce divertissement des jeunes filles de la commune de Lacs n’est pas sans analogie avec l’ancien jeu de l’éteuf, autrefois en usage sur quelques points de notre province, et dans lequel des jeunes gens se jetaient, se renvoyaient et parfois se disputaient de grosses balles couvertes de velours. Le jour de la Pentecôte, on se livrait à un amusement de cette espèce à Palluau[20], ainsi qu’à la Chapelle-d’Angillon[21]. À Quantilly, c’était le jour du Saint-Sacrement ou de la fête du Soleil (solstice d’été !) — On sait que l’on désigne encore le saint sacrement sous le nom de Soleil.

L’Église avait aussi, en Berry, ses fêtes solaires : — « Le jeu de la Sole, dit M. Raynal[22], avait lieu jadis, dans le diocèse, aux fêtes de saint Ursin et de saint Jean l’évangéliste (27 et 29 décembre, — solstice d’hiver !)… À Bourges, la sole ou cheole[23], soule ou soulette était un ballon gonflé d’air : c’était

surtout le divertissement des gens d’Église. » — C’est ainsi que, dans l’église de Troyes, après none, l’évêque et les chanoines jouaient d’abord solennellement à la toupie, ensuite à la paume, et se renvoyaient alternativement la balle[24].

Dans quelques-uns de nos anciens archiprêtrés, la sole consistait en un large disque ou palet de bôis, qu’un homme vigoureux lançait le plus loin possible, et que se disputaient ceux qui couraient la sole. Celui d’entre eux qui parvenait à s’en emparer le premier gagnait l’enjeu qui avait été préalablement déposé entre les mains de l’un des spectateurs. — Dans le diocèse de Troyes, on disait courir la futaine au lieu de courir la sole, et l’endroit où on la courait s’appelait le chemin de la futaine, parce que le prix à remporter n’était autre chose qu’une aune de futaine que l’on délivrait au vainqueur[25].

Les curés de nos pays finirent, vers les dernières années du dix-septième siècle, par abolir la course de la sole, à cause des accidents auxquels elle donnait lieu ; cependant ce jeu existait encore, assure-t-on, il n’y a pas longtemps, à Lunery, dans le Cher.

Il est bien évident que toutes ces dénominations : cheole, sole, soûle, soulette, ne désignent pas autre chose que le soleil, et que ces jeux, ainsi que celui de l’éteuf, ont la même origine que la soule des Bretons et la chaulle des Normands. — « La soule, dit Émile Souvestre, est un dernier vestige du culte que les Celtes rendaient au soleil. Ce ballon, par sa forme sphérique, représentait l’astre du jour ; on le jetait en l’air comme pour le faire toucher à cet astre, et lorsqu’il retombait, on se le disputait ainsi qu’un objet sacré[26]. » — Ce divertissement était autrefois répandu partout le royaume. En 1493, le prévôt de Paris défend « à tous les varlets de jouer au jeu de la soule parmy les rues[27]. »

Il y a bien longtemps, il existait à la Châtre, ainsi que par toute la France, un usage dont les populations de nos pays n’ont gardé aucun souvenir, mais que l’on peut encore considérer comme un reflet du sabéisme. Nous voulons parler de l’antique pèlerinage de Saint-Michel-sur-Mer.

On sait que le Mont-Saint-Michel en Normandie portait, dans le principe, le nom de Mont-Belen, ou de Montagne du soleil[28], et que, sous l’ère gauloise, il y florissait un collége de druidesses vers lesquelles on était dans l’habitude de députer des jeunes gens pour en obtenir, en retour du plus tendre des hommages, des flèches merveilleuses qui, lancées contre les nuages, avaient la propriété d’apaiser les tempêtes[29].


Lors de l’établissement du christianisme en ces lieux, Belen, le splendide Heol gaulois, dut naturellement être remplacé par l’hôte le plus brillant du nouvel Olympe, par l’archange saint Michel, le prince du ciel, le vainqueur par excellence du prince des ténèbres ; mais ce changement de divinité ne semble point avoir interrompu les excursions au rocher de Belen.

Les traditions suivantes établissent d’évidents rapports entre les représentants des deux cultes qui, l’un après l’autre, consacrèrent le rocher neustrien : — « Lorsque la guerre devait éclater entre la France et l’Angleterre, saint Michel illuminait, durant la nuit, la campanille de son temple d’une clarté plus resplendissante que la lumière du jour, et qui s’épanchait sur tous les lieux environnants. Cette illumination miraculeuse était nommée par le peuple : le feu Saint-Michel… Dans des temps plus paisibles, on a remarqué souvent aussi, pendant la nuit, des lumières moins frappantes que celles du feu Saint-Michel, mais d’un éclat tout céleste, qui remplissaient l’intérieur du temple. Parfois, il en sortait des mélodies ravissantes[30]… » — Ces mélodies ravissantes rappellent que le Dieu de la lumière, chez les anciens, était aussi le Dieu de l’harmonie. — Remarquez encore que saint Michel s’illustra, ainsi qu’Apollon, par la défaite d’un dragon.

Au moyen âge et beaucoup plus tard, on appelait Miquelots, Michelots, Michelats, Michelets, les jeunes pèlerins qui faisaient ou qui avaient fait le voyage de Saint-Michel-sur-Mer. Rabelais, dans sa Pantagruéline prognostication, les mentionne ainsi : « Il descendra grant abundance de micquelotz des montaignes de Savoye et de Auvergne… »

Leurs troupes innombrables affluaient vers la falaise neustrienne de tous les points de la France et même des pays étrangers. Ainsi se trouvaient renouvelées ces poétiques théories ou députations de jeunes gens qui, dans la classique antiquité, accouraient, elles aussi, des contrées les plus lointaines, aux belles fêtes solaires de la Grèce[31] ; ainsi la jeunesse française marchait, par tradition, sur les traces de ces hyperboréens, ses pères, qui, au rapport d’Hérodote[32], vinrent du fond de la Gaule, en pèlerinage au temple de Délos. — «  Cette belle divinité du soleil, qui prima si longtemps en Grèce, dont elle causa, en partie, la grandeur, appartenait si bien au génie de la Gaule, que c’était à la Gaule que remontait la gloire de l’avoir donnée à la Grèce[33]. »

Or, voici ce que raconte des Michelets de la Châtre une vieille histoire manuscrite de Notre-Dame de Vaudouan[34].

Tous les ans, lorsque venait la fin de septembre, les jeunes gens de métier, les fils d’artisans, se réunissaient en grand nombre à la Châtre, pour entreprendre le lointain pèlerinage de Saint-Michel-en-Mer. Au jour indiqué, le clergé de l’église paroissiale de Saint-Germain les conduisait processionnellement jusque sur la paroisse de Montgivray, près d’une ferme appelée la Varenne. Là, il bénissait une dernière fois l’intéressante caravane, et nos jeunes Miquelots, « saultans avecques leurs bourdons », comme dit Rabelais[35], se mettaient joyeusement en route. Lorsque les provisions dont on s’était pourvu à la partie venaient à faire défaut, ces pauvres enfants recouraient à la charité publique, et ils excellaient, dit-on, à la provoquer par leur habileté à prendre une mine hypocrite et nécessiteuse,

Moitié gueusant, moitié maraudant, ils atteignaient enfin le but de leur voyage, non sans s’être attiré, sur la route, bon nombre de malédictions. Aussi disait-on proverbialement alors en France, que les grands gueux allaient à Saint-Jacquesen-Galicé, et que les petits allaient à Saint-Michel-en-Mer.

À leur retour, nos Michelets berrichons s’arrêtaient à Montgivray et y passaient la nuit. Le lendemain, le clergé de la Châtre venait les y chercher avec le même cérémonial qu’au départ, et les conduisait immédiatement à la chapelle de Vaudouan, en les faisant passer, à la Châtre, par le faubourg de la Grand-Font[36], où, sans doute, s’accomplissait, près de la fontaine du même nom, quelque pieuse cérémonie.

Arrivé à Vaudouan, on y célébrait une messe d’actions de grâces durant laquelle les jeunes pèlerins offraient à la Reine des anges une couronne d’argent, qu’ils ne manquaient jamais de rapporter de leur lointaine excursion. Cette gracieuse offrande se répétait si exactement et depuis tant d’années, que malgré les pillages auxquels la chapelle avait été plus d’une fois en butte, le nombre des couronnes données à la Vierge, montait, du temps du chroniqueur Villebanois, à plus de deux cents. À l’époque où M. Bourdeau de Fontenay écrivait, un demi-siècle plus tard, en 1731, une autre Histoire de Vaudouan, les couronnes d’argent s’étaient changées en couronnes de plomb ; ce qui semble dénoter un refroidissement dans la dévotion de nos jeunes Michelets. — « On aperçoit encore dans la chapelle, dit M. Bourdeau, quelques banderoles de coquillages avec des couronnes de plomb que les jeunes gens de ce pays, à leur retour du pèlerinage de Saint-Michel, offrent à la très sainte Vierge, en actions de grâces de ce qu’elle les a préservés d’accident pendant leur voyage. »

Au reste, la dévotion au Mont-Saint-Michel était telle, dans certaines provinces, qu’il n’y a pas très-longtemps encore, un jeune homme du département d’Ille-et-Vilaine n’aurait pas osé demander une fille en mariage s’il n’avait auparavant fait au moins un voyage à ce lieu vénéré[37].

Nous croyons encore entrevoir les traces du culte solaire dans le plus célèbre de nos pèlerinages berrichons, celui de Sainte-Solange, la patronne du Berry[38].

Nous allons déduire le plus succinctement possible les raisons et les faits sur lesquels nous basons nos conjectures.

Notre savant compatriote, le père Labbe[39], avoue que l’on ne sait à quelle époque vivait cette sainte, d’origine berrichonne ; par conséquent, il est impossible d’assigner un commencement aux honneurs que lui rendent en foule les habitants du Berry et ceux des provinces environnantes, et il est permis de croire que sa personnalité est plus ou moins historique.

Le nom si harmonieux de Solange ne doit pas signifier autre chose que solis angelus, solis genius, et nous suivons, en cela, l’exemple des Gaulois, qui appelaient Apollon ou le dieu Bel « l’ange de la lumière[40]. » Cette personnification féminine du soleil n’a du reste rien d’insolite, car on sait que, chez les Indiens et les anciennes populations germaniques, le soleil était représenté par une déesse et la lune par un dieu. Les poëmes scandinaves de l’Edda appellent le soleil : la lumineuse fiancée du ciel, et cet astre porte encore aujourd’hui, chez les Suédois, un nom féminin[41]. Il en est de même en Pologne ; dans un chant des paysans lithuaniens, il est dit :

Menou (la lune) épousa Saülée (le soleil),
Au premier printemps.
Saülée se leva de grand matin,
Menou se sépara d’elle… etc.[42].

D’un autre côté, cette reine des cieux à laquelle sacrifiaient les Hébreux idolâtres, et dont parle le prophète Jérémie (XLIV, 19), n’était autre que le soleil[43]. — Ainsi s’expliquent encore les ex voto pro salute à la déesse Sulis, qui, en Angleterre, jouait le rôle du soleil[44]. Enfin, cet astre, divinisé par les anciens Aztèques, était considéré comme le premier principe de toutes choses, et passait, au Mexique, pour la grand’mère de la famille humaine. — Ajoutons que les termes la sole, la soûle, la soulette, etc., dont nous avons parlé plus haut (p. 83 et 84), se traduisant par le soleil, il est évident qu’à une époque assez rapprochée, le soleil, même en France, était connu sous un nom féminin.

La fête de sainte Solange tombe le 10 mai, c’est-à-dire précisément dans le mois qui était sous la protection d’Apollon.

Maintenant, si nous feuilletons sa légendes[45], nous verrons que Solange était une humble bergère du val de Villemont, près de Bourges, ce qui nous rappellera qu’Apollon,

Sous un habit grossier, simple berger d’Admète,
À vécu sous le chaume et porté la houlette.
(Desaintange.)

et que le même dieu, au rapport d’Homère, a gardé les troupeaux

de Laomédon, sur le mont Ida. Nous y verrons aussi que la sainte, ainsi que le dieu, guérissait les malades ; nous y verrons de plus, — et cette circonstance est singuliérement significative, — qu’une étoile a brillé au-dessus de la tête de Solange, tant qu’elle a été de ce monde, le jour comme la nuit. Or cette étoile peut-elle être autre chose

que l’image du soleil ?

Enfin, pour compléter ces ressemblances, nous allons citer un fait fort remarquable, qui, ce nous semble, doit suffire pour confirmer nos présomptions.

Le jour de la fête de sainte Solange, on distribue, on vend aux pèlerins une espèce de bouquet artificiel d’une composition tout à fait particulière et qui caractérise d’autant mieux cette solennité, que l’on ne voit rien de semblable, lors de nos grandes assemblées religieuses de la Trinité, à Cluis, de la Pentecôte, à Gargilesse, et de Vaudouan, près la Châtre. Ce bouquet, si connu par tout le pays, sous le nom de bouquet de sainte Solange, consiste en une sorte de branche de laurier, chargée d’une infinité de fleurs et de rubans parmi lesquels rayonnent de tout petits miroirs et de nombreux globules métalliques de grosseur inégale. Eh bien, ce rameau symbolique, véritablement renouvelé des Grecs, figurait autrefois dans la fête des rameaux de laurier que l’on célébrait tous les ans, en Béotie, en l’honneur d’Apollon Isménien. Le récit que l’abbé Barthélémy nous a laissé de cette pompe solennelle[46] explique parfaitement le sens allégorique du bouquet de sainte Solange : — « Le ministre d’Apollon, dit cet écrivain, était suivi d’un chœur de jeunes filles qui tenaient des rameaux et qui chantaient des hymnes. Un jeune homme de ses parents le précédait, portant dans ses mains une longue branche d’olivier couverte de fleurs et de feuilles de laurier ; elle était terminée par un globe de bronze qui représentait le soleil. À ce globe on avait suspendu plusieurs petites boules de même métal, pour désigner d’autres astres, et trois cent soixante-cinq bandelettes teintes en pourpre, qui marquaient les jours de l’année ; enfin, la lune était figurée par un globe moindre que le premier et placé au-dessous. Comme la fête était en l’honneur d’Apollon ou du soleil, on avait voulu représenter par un pareil trophée la prééminence de cet astre sur tous les autres. » — Un usage qui a beaucoup de rapport avec celui que nous venons de citer, existe encore aujourd’hui dans quelques-unes de nos villes de l’Est : — « Nous voyons, chaque année, dit M. Désiré Monnier[47], lors de l’intéressante cérémonie du dimanche des Rameaux, les enfants accourir à l’église, portant avec pompe leur branche de buis ou de tout autre arbre vert, ornée de rubans et chargée de belles pommes. »

À leur retour de la fête, les pèlerins de Sainte-Solange arborent triomphalement à leur chapeau le bouquet consacré ; c’est ainsi que les membres de la théorie pythique que les Delphiens envoyaient, chaque année, dans le mois de thargélion (mai), aux fêtes d’Apollon qui se célébraient en Thessalie, ne manquaient jamais d’en rapporter le rameau purificateur, qui consistait également en une branche de laurier[48].

Notons encore, à l’appui de la précédente assertion, que dans la commune de Neuvy-sur-Baranjon, qui fait partie, ainsi que celle de Sainte-Solange, de l’arrondissement de Bourges, on aurait trouvé en 1861, parmi de nombreuses ruines gallo-romaines, une énorme brique sur laquelle se lit le nom de Belenus[49].

C’est encore à l’influence mystérieuse du 24 juin, de ce grand jour où le soleil, dans toute sa gloire, atteint le point culminant de sa puissance, qu’il faut attribuer les innombrables merveilles qui s’accomplissent dans la matinée de la Saint-Jean.

À ce moment de l’année, une foule de plantes, en tout autre temps insignifiantes et inefficaces, acquièrent des propriétés miraculeuses ; les vertus des simples sont exaltées[50] ; la rosée des prés, recueillie et transportée sur les terrains les plus ingrats, leur communique une longue fécondité.

Enfin, si, au matin de ce beau jour, vous puisez, avant tous vos voisins, à la fontaine de votre village, vous y trouvez, pour toute l’année, une source inépuisable de bonheur. — Par la même raison, il faut se garder, le matin de la Saint-Jean, ainsi que le matin de toute autre belle fête, telle que Noël, Pâques,  etc., de donner du feu aux personnes qui viennent en chercher à votre foyer, car elles emporteraient toutes les bonnes chances de votre maison[51].

Mais la plus surprenante de toutes ces merveilles est assurément celle-ci : — Une jeune fille est-elle désireuse de connaître celui de ses nombreux amoureux qui deviendra son époux, elle n’a qu’à se pencher, aux rayons naissants de l’aurore, sur le limpide cristal de la première source venue, elle y verra aussitôt se refléter, près de sa propre image, la figure souriante de son heureux futur.

C’est cette gracieuse croyance qui a fait dire à un poëte de notre pays :

Et toi, ne sais-tu pas, jeune fille aux yeux bleus,
Qu’aux naissantes clartés du jour miraculeux,

La vierge dont le cœur reçoit de purs hommages,
Peut au cristal des eaux voir monter deux images.
(H. de la Touche[52], la Vallée aux loups, Prologue.)

En terminant cette revue de nos principales fêtes populaires, nous appliquerons à nos solennités berrichonnes les plus importantes, la réflexion que Dupuis, l’auteur de l’Origine de tous les cultes, fait à propos des plus remarquables solennités du christianisme : c’est qu’elles sont « liées aux grandes époques de la nature et au système céleste. Partout on retrouve les fêtes solsticiales et équinoxiales, etc., etc. »

  1. Voy. le chant des séries du Barzaz-Breiz, p. 9, du t. I.
  2. Ibid.
  3. Voy. la Muse historique de Jean Loret.
  4. Harpocrationis Lexicon in Amphridomia.
  5. Hesychii Milesii Opuscula ; — Platon, in Theat.
  6. XVIII 21.
  7. xviii, 10 ; — Jérémie, xxxii, 35 ; et Ézéchiel, xx, 26, parlent aussi de cet usage.
  8. César, Commentaires ; — Guigniaut, Religions de l’antiquité.
  9. Michelet, Origines du droit français.
  10. Voy., sur ces sacrifices abominables, les articles Baal et Moloch dans l’Esprit de la Gaule de Jean Reynaud.
  11. Voy., dans le Kalica Pourana, le chapitre intitulé en sanscrit Rudhiradhyaya, c’est-à-dire le chapitre sanglant.
  12. Fêtes et courtisanes de la Grèce, liv. II.
  13. Daniélo, Histoire et tableau de l’univers, t. III. p. 368.
  14. Ceci rappelle que l’eau lustrale, chez les Grecs, se faisait en plongeant dans de l’eau ordinaire un tison calciné provenant du bûcher sur lequel on avait brûlé la victime. (Euripide, in Herc. fur., v. 928 ; — Athénée, liv. IX, ch. 18.)
  15. Inde française.
  16. jônée
  17. Mémoires de l’Académie celtique, 1828, t. II, p. 78.
  18. Saturnal., I, 9.
  19. Primula veris, la première-née du soleil, pour ainsi dire. — La primevère était comptée au nombre des six plantes merveilleuses que Koridwen (la fée blanche), espèce de Cybèle gauloise, faisait bouillir dans sa chaudière. (Voy. de la Villemarqué, Barzaz-Breiz, t. I, p. 19.) — Ces six plantes étaient la primevère, le sélage ou herbe d’or, la jusquiame ou herbe apollinaire, le samolus, la verveine et le trèfle. Les magiques vertus de ces divers végétaux se trouvaient concentrées dans le gui, la plante par excellence. À notre connaissance, trois de ces herbes passent encore, en Berry, pour avoir de puissantes propriétés ; ce sont la verveine, le trèfle (à quatre feuilles) et le sélage, qui paraît n’être autre chose que la sabine, arbuste qui, après le buis, occupe, dans la plupart de nos rustiques vergers, la seconde place d’honneur. — Voy. dans Pline, liv. XXIV, ch. 62, quelles singulières précautions l’on prenait pour cueillir le sélage.
  20. Voy., plus loin, à la table alphabétique : Recarrelage.
  21. Bouchel, Bibliothèque du droit français, au mot Quintaine ; — M. Raynal, Hist. du Berry, t. II, p. 209.
  22. Hist. du Berry, t. III, p. 190.
  23. Voy. le mot cheolare dans le Glossaire de du Cange. — Heol, en celtique, comme hêlios, en grec, signifie soleil ; c’est ainsi que le Bel ou Belen gaulois, est le même que le Bel ou Baal chaldéen et phénicien.
  24. Courtalon, Topographie historique de Troyes, la cathédrale, p. 571 ; — Alexis Monteil, Histoire des Français, t. I, p. 407.
  25. Voy., dans le Mercure de France du mois de mars 1735, la Lettre écrite d’Auxerre à un curieux de la ville de Bourges sur quelques usages des peuples du Berry.
  26. Les Derniers Bretons.
  27. Alexis Monteil, Hist. des Français. t. II, p. 259 et 528.
  28. Noual de la Houssaye, Voyage au Mont-Saint-Michel, p. 82 et suiv.
  29. Voy., pour plus de détails, Strabon, liv. IV ; — Pomponius Mela, liv. IV ; — Pelloutier, Hist. des Celtes, liv. IV, note 208 ; — Deric, Introd. à l’hist. ecclés. de la Bretagne, p. 312 et 313 ; — Marchangy, Tristan, t. II, p. 240 et suiv.
  30. Mlle Amélie Bosquet, d’après un manuscrit de Jean Huynes. — Voy. la p. 368 de la Normandie romanesque et merveilleuse.
  31. Hérodote, 1. VI, ch. 27.
  32. Liv. IV, ch. 35.
  33. Jean Reynaud, l’Esprit de la Gaule, p. 109 et 110.
  34. Ce manuscrit a été composé en 1679, par un M. Villebanois. — La chapelle de Notre-Dame de Vaudouan (Vallis Dianæ) est dédiée à la Vierge. Située sur la paroisse de Briantes, à cinq ou six kilomètres, au sud de la Châtre, cette chapelle est, après Sainte-Solange, le but du plus important pèlerinage du Berry. Sa célébrité était autrefois considérable. Il y a deux siècles à peine, en un temps de désastre public, la ville entière de Châteauroux s’achemina, pieds nus, le cierge au poing, criant miséricorde, vers cet humble sanctuaire. Enfin, un roi de France, Louis XIII, se voyant en danger de mort, envoya trois des plus brillants seigneurs de sa cour intercéder pour lui auprès de la Vierge des champs. (Voy. les différentes Histoires de Notre-Dame de Vaudouan, publiées à la Châtre, à Bourges et même à Paris.) — Le manuscrit Villebanois nous transmet les détails suivants sur l’une des restaurations dont fut autrefois l’objet l’image de Notre-Dame de Vaudouan. C’est, à notre sens, un curieux tableau des mœurs naïves du vieux temps. — En 1625, Louis Gillet, sculpteur et peintre habile de la ville de Troyes, en Champagne, se trouvant à la Châtre, on saisit avec empressement cette occasion pour faire repeindre la statue de la Vierge. Cette opération, à laquelle toute la ville prit le plus vif intérêt, eut lieu en la maison du nommé Sacrotaire, « sise sur la place du marché et, de présent (1679), possédée par maître Antoine Pajot, notaire royal. » Bertrand Gillet, marchand, frère du peintre et qui l’hébergeait, se chargea d’aller à Vaudouan querir l’image de Marie, et l’apporta à la Châtre dans une hotte. Après que Louis Gillet l’eut rajeunie, on l’orna de nouveaux atours, et « elle fut portée voir et vénérer, ajoute le vieux légendaire, par toutes les maisons principales dudit la Châtre, dévotement curieuses. »
  35. Gargantua, liv. I, ch : XXXVIII.
  36. La fontaine de la Grand-Font, qui donne son nom à ce faubourg, abrite, sous sa voûte, construite en forme de chapelle, une image de la Vierge, devant laquelle on fait brûler des chandelles pour la délivrance des femmes en travail d’enfant. (Voy. les Esquisses pittoresques de l’Indre, p. 83.)
  37. Mémoires de l’Académie royale des antiquaires, t. IV, année 1823.
  38. Voy., pour plus de détails sur cette sainte et sur ce pèlerinage, l’Histoire du Berry de M. Raynal ; t. I, p. 311 et suiv., et les Pieuses légendes du Berry de M. Just Veillat.
  39. Le jésuite Philippe Labbe, né à Bourges en 1607, mort en 1667. — « Savant infatigable, dit M. Raynal, il a publié de nombreux ouvrages d’érudition et notamment la grande Collection des conciles. » (Hist. du Berry, t. III, p. 464.)
  40. Jean Reynaud, l’Esprit de la Gaule, p. 109.
  41. Les Eddas, traduction de Mlle R. du Pujet, p. 116.
  42. A. Chodzko, Contes des paysans et des pâtres slaves, {pg|380}}.
  43. Voy. plus haut, p. 7.
  44. M. Alfred Maury, Croyances et Légendes de l’antiquité, p. 244.
  45. Il existe plusieurs biographies de sainte Solange ; l’une des plus remarquables a été publiée à Bourges, en 1828, par l’abbé Oudoul.
  46. Voyage du jeune Anacharsis en Grèce, ch. xxxiv.
  47. Traditions populaires comparées, p. 166.
  48. Élien, Histor. var., III, 1.
  49. Voy. Noviodunim Biturigum…, par M. H. Boyer. — Paris, Aug. Aubry.
  50. Les Gaulois croyaient que Bel faisait naître les plantes médicinales. — À Cluis (Indre), on cueille toujours la fleur de sureau le jour de la Saint-Jean.
  51. Voy., sur quelques autres merveilleux effets de la Saint-Jean, à la table alphabétique : Caillebotiers ; — Trèfle à quatre feuilles.
  52. Hyacinthe-Joseph-Alexandre Thabaud de la Touche, auteur de Clément XIV et Carlo Bertinazzi et de beaucoup d’autres ouvrages en prose ou en vers, qu’il signa toujours H. de la Touche, est né à la Châtre, rue Bellefont, le 4 février 1785, et mort à Aulnay près Paris, en mars 1851. — Thabaud de la Touche fut l’un des hommes les plus spirituels et peut-être le plus attrayant causeur de son époque. — Remarquons, en passant, à l’honneur de la bonhomie berrichonne, que la Touche a été longtemps, rédacteur en chef du Figaro, qui ne passe pas pour le moins malin des journaux chez la nation que l’on est convenu d’appeler la plus spirituelle du monde.