Le Préservatif/Édition Garnier

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Œuvres complètes de VoltaireGarniertome 22 (p. 371-387).
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LE PRÉSERVATIF[1]

(1738)

I.

Il est juste de détromper le public quand il est à craindre qu’on ne l’abuse. On ne connaît que trop les guerres des auteurs. La plupart des journalistes qui s’érigent en arbitres font souvent eux-mêmes les plus violents actes d’hostilité. Je peux dire, par l’expérience que j’ai dans la littérature, qu’il se forme autant d’intrigues pour faire valoir ou pour détruire un livre, dont souvent personne ne se soucie, que pour obtenir un poste important.

On sait que le Journal des Savants de Paris, père de cette multitude de journaux, enfants très-souvent peu semblables à leur père, s’est assez préservé de la contagion des cabales.

Mais parmi les auteurs de ces petites gazettes volantes, qu’on débite tantôt sous le nom de Nouvelliste du Parnasse[2], tantôt sous le nom d’Observations[3], on ne trouve ni le même goût, ni la même science, ni la même équité. J’ai donc cru rendre quelque service aux amateurs des lettres, en rassemblant des bévues que j’ai trouvées dans plusieurs feuilles, intitulées Observations, que j’ai lues par hasard.

Nombre 200. Le faiseur d’observations dit qu’un grand prince[4] a condamné le genre comique larmoyant, dans la pièce de Don Sanche d’Aragon de Pierre Corneille, et assure que ce goût ne doit point subsister parmi nous après cette condamnation.

Il y a en cela trois fautes : la première, que le goût d’un prince ne suffit pas pour régler celui du public ; la seconde, que le Don Sanche d’Aragon de Pierre Corneille n’est point d’un genre comique attendrissant, et qui fasse verser des larmes, comme certaines scènes du Bourreau de soi-même de Térence[5], la scène très-tendre entre une mère et une fille dans Ésope à la cour[6], celle du Préjugé à la mode[7], de l’Enfant prodigue[8], etc. Don Sanche d’Aragon est une comédie héroïque, et non larmoyante, comme le dit l’Observateur. Ce fut la froideur, et non l’intérêt, qui la fit tomber : jamais une pièce intéressante ne tombe.

La troisième faute, et plus grande, est de s’ériger en juge d’un art qu’on ne connaît pas, et de dire avec hardiesse que ce qui a plu dans Paris et dans l’ancienne Rome n’a pas dû plaire. Des scènes attendrissantes ont toujours été bien reçues à la comédie, de tous les temps, parce que les actions des particuliers peuvent être touchantes aussi bien que ridicules, et on peut leur appliquer ce que dit Horace[9] :

Interdum tamen et vocem comœdia tollit.

II.

Dans la même feuille, l’auteur rapporte une longue critique sur un problème d’optique qu’il n’entend point ; on lui a fait accroire qu’il s’agissait dans ce problème de la trisection de l’angle, et il n’en est point du tout question. L’auteur que le critique reprend, sans le comprendre, est M. de Voltaire. J’ai lu soigneusement l’endroit en question dans la préface de l’édition de Londres des Éléments de Newton.

L’Observateur n’a point lu cet ouvrage, qu’il ose critiquer, car il reproche à M. de Voltaire d’avoir donné des règles pour partager un angle en trois avec le compas, et c’est de quoi M. de Voltaire n’a pas dit un mot dans ses Éléments. L’Observateur s’est fié en cela à un géomètre qui s’est moqué de lui ; il a cru que M. de Voltaire ne savait pas qu’on ne peut trouver la trisection de l’angle que par les sections coniques ou par l’algèbre ; il a rapporté de bonne foi, dans sa feuille, une critique qu’on lui a suggérée pour le faire donner dans le panneau : c’est un exemple pour ceux qui parlent de ce qu’ils ignorent[10].

III.

Je prends les feuilles de l’Observateur indifféremment à mesure qu’on me les prête à lire : je trouve une étrange bévue dans la lettre vingt-septième. « Brutus, dit-il, plus quaker que stoïcien, a des sentiments plus monstrueux qu’héroïques[11]. » Ne dirait-on pas, à ces paroles, que les quakers sont une secte d’hommes sanguinaires ? Cependant tout le monde sait qu’une des premières lois des quakers est de ne porter jamais d’armes offensives, sous quelque prétexte que ce soit, et de ne jamais repousser une injure. La méprise est aussi grande que s’il avait dit : « Le cruel Brutus, plus capucin que stoïcien. »

IV.

Nombre 199. En rendant compte d’une hypothèse de M. l’abbé de Molières, il dit que « ce physicien se conforme aux expériences de Newton ; par exemple, que les corps parcourent, en tombant, quinze pieds dans la première seconde, et qu’à des distances différentes du centre de la terre, le même mobile n’aurait pas le même degré de vitesse accélératrice ».

Il y a ici trois fautes. Newton n’a point trouvé par expérience que les corps tombent de quinze pieds dans la première seconde : c’est Huygens qui a déterminé cette chute dans ses beaux théorèmes sur le pendule, après que Galilée en eut donné une valeur approchée par des expériences directes, mais moins précises. Secondement, ce n’est qu’à des distances très-considérables et inaccessibles aux hommes que cette différence serait sensible. Troisièmement, cette différence de la force accélératrice à des distances différentes n’est fondée sur aucune expérience, mais sur une démonstration géométrique. Voilà les bévues où l’on s’expose quand on veut juger de ce qui n’est pas à notre portée.

Nombre 17. L’Observateur rapporte une ancienne dispute littéraire entre M. Dacier et le marquis de Sévigné, au sujet de ce passage d’Horace[12] :

Difficile est proprie communia dicere…

Il rapporte le factum ingénieux de M. de Sévigné : « Et pour M. Dacier, dit-il, il se défend en savant, et c’est tout dire : des expressions maussades et injurieuses font les ornements de son érudition. »

Il y a dans ce discours de l’Observateur trois fautes bien étranges.

Premièrement, il est faux que ce soit le caractère des savants du siècle de Louis XIV d’employer des injures pour toutes raisons.

Secondement, il est très-faux que M. Dacier en ait usé ainsi avec le marquis de Sévigné : il le comble de louanges, et il conclut son mémoire par lui demander son amitié ; apparemment que l’Observateur n’a pas lu cet écrit.

Troisièmement, il est indubitable que M. Dacier a raison pour le fond, et qu’il a très-bien traduit ce vers d’Horace :

Difficile est proprie communia dicere…

« Il est très-difficile de bien traiter des sujets d’invention… » Car si vous mettez sous les yeux du lecteur la phrase entière d’Horace, vous verrez que la fin explique le commencement.

Difficile est proprie communia dicere, tuque
Rectius Hiacum carmen deducis in actus,
Quam si proferres ignota, indictaque primus.

« Il est difficile de bien traiter un sujet d’invention, et vous composerez plus aisément une tragédie tirée de l’Iliade que de votre propre tête. »

Voilà qui fait un sens clair, et qui prouve que commune veut dire en cet endroit intactum, un sujet neuf.

Ainsi l’abbé Desfontaines n’a pas entendu Horace, n’a pas lu l’écrit de M. Dacier qu’il critique, et a tort dans tous les points.

VI.

Nombre 201, etc. Il dit que Cicéron est moins serré que Sénèque, et que Sénèque est plus verbeux. Peu importe, à la vérité, au public qu’on ait tort ou raison sur cette bagatelle ; mais les jeunes gens qui étudient seraient trompés s’ils croyaient que Sénèque exprime sa pensée en plus de mots que Cicéron : car c’est ce que signifie verbeux. Il n’y a personne qui ne sache que le défaut de Sénèque est d’être, au contraire, trop concis dans ses expressions.

VII.

Même nombre, « Si les Anglais, dit-il, continuent[13] d’encenser encore leur vide, et d’attribuer de merveilleuses propriétés au néant, etc. »

Qui a jamais dit que M. Newton ait encensé le vide ? Cette expression est très-mauvaise en tout sens. Il est faux que M. Newton ait attribué de merveilleuses propriétés au vide ; il a démontré que les corps, et non le vide, agissent à des distances immenses les uns sur les autres, dans un milieu non résistant. Il faudrait au moins se faire informer de l’état de la question avant que d’insulter de grands hommes dont on n’a lu ni pu lire les ouvrages.

VIII.

Nombre 187. Il se fait écrire une lettre par un Anglais pour se louer lui-méme, et il fait proposer dans cette lettre de faire une nouvelle édition d’un libelle de sa façon, intitulé Dictionnaire nèologique[14] : ce libelle est l’ouvrage auquel il donne le plus d’éloges dans sa gazette littéraire. Il est bon qu’on sache que ce Dictionnaire néologique est une satire dans laquelle on prend la peine inutile de relever des fautes connues de tout le monde, et de critiquer de très-belles choses à la faveur des mauvaises qu’on reprend. C’est un libelle où l’auteur veut faire passer sa fausse monnaie parmi la bonne qui n’est pas de lui. Je vais en donner quelques exemples.

M. de Fontenelle, dans ses Éloges des académiciens, livre plein d’esprit et de raison, et qui rend les sciences respectables, dit dans l’Éloge de M. de Varignon : « Nos journées passaient comme des moments, grâce à ces plaisirs qui ne sont pourtant pas compris dans ce qu’on appelle ordinairement les plaisirs. Nous parlions à nous quatre une bonne partie des différentes langues de l’empire des lettres, et tous les sujets de cette petite société se sont dispersés de là dans toutes les académies. »

Ailleurs il dit très à propos :

« N’est-il pas juste, en effet, que la science ait des ménagements pour l’ignorance, qui est son aînée, et qu’elle trouve toujours en possession ?

« Malebranche fait un partage si net entre la raison et la foi, et assigne à chacune des objets si séparés, qu’elles ne peuvent plus avoir aucune occasion de se brouiller.

« On ne ferait pas tout ce que l’on peut, sans l’espérance de faire plus qu’on ne pourra.

« Il ne s’instruisait pas par une grande lecture, mais par une profonde méditation ; un peu de lecture jetait dans son esprit des germes de pensées que la méditation faisait ensuite éclore, et qui rapportaient au centuple. Il devinait, quand il en avait besoin, ce qu’il eût trouvé dans les livres ; et pour s’épargner la peine de les lire, il se les faisait lire.

« Il semblait ne plus voir par ses yeux, mais par sa raison seule. La persuasion artificielle de la philosophie, quoique formée par de longs circuits, égalait en lui la persuasion la plus naturelle et causée par les impressions les plus promptes et les plus vives : les autres croient ce qu’ils voient ; pour lui, ce qu’il croyait, il le voyait,

« M. de Varignon m’a fait l’honneur de me léguer tous ses papiers par son testement ; j’en rendrai au public le meilleur compte qu’il me sera possible… du reste, je promets de ne rien détourner à mon usage particulier des trésors que j’ai entre les mains, et je compte que j’en serai cru ; il faudrait un plus habile homme pour faire sur ce sujet quelque mauvaise action avec quelque espérance de succès. »

Ce sont là les morceaux qu’un écrivain tel que l’abbé Desfontaines ose essayer de tourner en ridicule. Le plus grand des ridicules est assurément d’en vouloir donner à ceux à qui on est si prodigieusement inférieur.

IX.

Dans ce même Dictionnaire nèologique il reprend génie conséquent, esprit conséquent : il ne sait pas que c’est une expression très-juste et très-usitée.

Il veut tourner en ridicule ce vers de feu M. de Lamotte, sous prétexte que dans Richelet le mot contemporain n’est pas féminin ;

D’une estime contemporaine
Mon cœur eût été plus jaloux ;
Mais, hélas ! elle est aussi vaine
Que celle qui vient après nous[15].

Il trouve impertinents ces deux vers très-sensés :

Et notre être même est un point
Que nous sentons sans connaissance[16].

Il ridiculise encore cette belle expression de M. Racine le fils[17], dans une épître didactique :

Les signes du plaisir, les couleurs de la joie[18].

Il ne voit pas que, dans cette expression, il y a à la fois de la vérité et de l’imagination, et que par conséquent elle est belle.

Il reprend le P. Catrou[19] d’avoir dit que les pourceaux paissent le gland, et il ajoute qu’ils paissent encore quelque chose qu’il ne peut pas dire. C’est ainsi qu’avec la plus basse des grossièretés il reprend une expression noble ; mais revenons aux Observations.

X.

Nombre 197. En faisant l’extrait d’une certaine harangue latine de M. Turretin, il se plaint de la disette des Mécènes, et de la malheureuse situation des savants ; et il répète cette plainte dans tous ses livres.

Il devrait savoir que jamais les sciences n’ont été plus encouragées en France. Le voyage au pôle et à l’équateur, entrepris à si grands frais ; les pensions données à M. de Réaumur, à M. de Voltaire, à nos meilleurs auteurs, et en dernier lieu à M. de Crébillon, en sont une preuve. Il est vrai qu’un homme qui n’a de mérite que celui de la satire est très-méprisé parmi nous, et est souvent puni au lieu d’être récompensé ; et cela est très-juste.

XI.

Nombre 185. Un homme de goût[20] avait trouvé peu de justesse dans cette phrase de l’Oraison funèbre de la reine d’Angleterre, par M. Bossuet : « L’Angleterre… plus agitée en sa terre et dans ses ports mêmes que l’Océan qui l’environne… » Il est clair qu’agitée en sa terre n’est pas une bonne expression ; il est clair que s’il y a de l’agitation, elle doit être dans les ports, comme au milieu des terres, et que cette phrase n’est pas digne de l’éloquent et admirable Bossuet.

L’Observateur se moque du goût de celui qui a repris avec raison cette phrase : ainsi l’Observateur se trompe, et quand il approuve et quand il condamne.

XII.

Nombre 202. En rendant compte du voyage de messieurs les académiciens au cercle polaire : « Vénus, dit-il, a été observée au méridien au-dessous du pôle. » Il ignore qu’une planète n’est ni au-dessus ni au-dessous du pôle, mais toujours dans le zodiaque, et tantôt septentrionale, tantôt méridionale. Il ne fallait pas changer les expressions de M. de Maupertuis, pour lui faire dire une telle absurdité. Quand on ignore les choses dont on parle, il faut copier mot à mot les gens du métier, ou se taire.

XIII.

Nombre 188. Il fait l’éloge d’une ancienne gazette intitulée le Nouvelliste du Parnasse, et il la compare modestement aux premiers Journaux des savants, parce qu’elle est de lui ; ce n’est pas la moins considérable de ses fautes.

XIV.

Nombre 200, tome XIV. Il proteste sur son honneur qu’il n’a point écrit contre les médecins de Paris ; mais en 1736, il protesta sur son honneur à M. l’abbé d’Olivet, dans une lettre lue publiquement à l’Académie française, qu’il n’avait point eu de part au libelle contre plusieurs membres de cette académie : cependant il fut convaincu, à la chambre de l’Arsenal, d’avoir vendu trois louis, au libraire Ribou, ce libelle qu’il avait désavoué sur son honneur ; il fut condamné, et n’obtint que très-difficilement sa grâce.

XV.

Nombre 190. Il dit, en parlant d’une épître sur l’Égalité des conditions, « qu’il y a des maux légers, et des maux insupportables dans la vie » ; on le sait bien. « Mais où est l’égalité des conditions ? » dit-il. Il n’a pas compris que les accidents de la vie ne sont pas des conditions. Une maladie incurable, ou bien le mépris et la haine du public, ne sont attachés à aucune condition ; mais dans tous les états on peut être méchant, méprisé, et misérable. Il dit, dans la même feuille, qu’après la mort du maréchal d’Ancre le peuple se repentit de sa barbarie, et lui rendit justice. C’est un fait absolument faux : le peuple ne donna aucun signe de repentir. Dans la même feuille il rapporte ces vers connus :

Le bonheur est le port où tendent les humains[21] ;
Les écueils sont fréquents, les vents sont incertains ;

Le ciel, pour aborder cette rive étrangère,
Accorde à tout mortel une barque légère.

« Si ce port du bonheur, dit-il, est une rive étrangère, le bonheur n’est donc plus dans moi. » C’est raisonner très-mal, car l’art du pilote est dans moi, et l’on n’est heureux qu’autant que l’on conduit sagement sa barque. Un médisant, un ingrat, un calomniateur, un homme qui a des mœurs infâmes, conduit sa barque très-mal, et son malheur est dans lui,

XVI.

Nombre 167. Je prends toujours ces feuilles sans ordre, et la suite de numéro est inutile, puisque cet ouvrage est sans aucune liaison. Voici une preuve de son bon goût. « On m’a envoyé, dit-il, depuis peu une très-belle ode. On y fait ainsi parler les déistes :

Ils ont dit : De mille chimères
Une absurde combinaison,
Un tissu de sombres mystères,
Ne tient pas devant la raison.
Tranquille au haut de l’empyrée,
Par cette interprète sacrée,
Dieu daigna se manifester.
Loin de nous tout dogme apocryphe ;
La raison, voilà le pontife,
L’apôtre qu’il faut écouter. »

Toute l’ode est dans ce style, et c’est là le style de l’Observateur, dans un gros recueil de vers de sa façon, qu’il a donné Incognito au public[22] ; mais il dit que c’est ainsi qu’il faut écrire.

XVII.

Nombre 171. C’est avec le même goût qu’il donne les vers suivants pour une belle traduction de ce vers d’Horace[23] :

… Versus inopes rerum, nugæque canoræ.

Cet emphatique et burlesque étalage
D’un faux sublime, enté sur l’assemblage
De ces grands mots, clinquant de l’oraison,
Enflés de vent, et vides de raison.

(J.-B. Rousseau, Épître au P. Brumoy.)

Nous n’avons guère de plus mauvais vers dans notre langue : figurez-vous ce que c’est qu’un « clinquant enflé de vent, étalage burlesque enté sur un assemblage ». Nous dirons en passant que ce style marotique, qui rassemble les expressions de tous les genres, est monstrueux quand il s’agit de parler sérieusement.

Ce jargon dans un conte est encor supportable ;
Mais le vrai veut un air, un ton plus respectable :
Le sage Despréaux laisse aux esprits mal faits
L’art de moraliser du ton de Rabelais.

Ces vers d’un de mes amis[24] sont un peu plus raisonnables, et doivent servir à faire voir le misérable abus du style marotique dans des ouvrages qui demandent une éloquence véritable.

XVIII.

Nombre 136. C’est avec le même goût, la même intelligence, qu’il blâme Horace d’une chose qu’Horace n’a jamais pensée.

« Horace a eu tort, dit-il, de s’exprimer ainsi, en parlant du siècle d’Auguste :

Venimus ad summum fortunæ ; pingimus atque
Psallimus, et luctamur Achivis doctius unctis
[25] ? »

Le sens de ces vers est : « Nous sommes donc à ce compte supérieurs en tout ; la peinture, la musique, la lutte, sont donc plus perfectionnées chez nous que chez les Grecs : qui osera le dire ? » Tous les bons traducteurs d’Horace ont rendu ainsi ces vers, et il est impossible qu’ils aient un autre sens.

Horace n’a point eu tort de dire, comme le prétend le sieur Desfontaines, que les Romains l’emportaient sur les Grecs : car il dit expressément le contraire. Si quelqu’un, par exemple, disait : Ce mauvais critique est un Despréaux, un Pétau, un Varron, ne devrait-on pas voir qu’il parlerait ironiquement ?

XIX.

Dans le même nombre, par un autre excès d’ignorance, il dit que les peintres n’étaient que des barbouilleurs du temps d’Horace, et il le dit sans aucune preuve. Nous avons des statues de ce temps-là faites par des Romains : leur beauté prouve que l’art du dessin était très-connu, et on sait que la peinture est toujours en honneur quand la sculpture est perfectionnée, car ce sont deux branches de l’art du dessin.

XX.

C’est avec la même justesse d’esprit que louant, nombre 73, un satirique de nos jours, il fait un long éloge de trois épîtres[26], écrites dans un style barbare, et pleines de choses communes dites longuement.

Quel lecteur peut supporter, par exemple, que Rousseau traduise en onze vers, et quels vers ! cette seule ligne d’Horace[27] ?

 
Omne tulit punctum qui miscuit ulile dulci.
Quel auteur donc peut fixer leurs génies ?
Celui-là seul qui, formant le projet
De réunir et l’un et l’autre objet,
Sait rendre à tous l’utile délectable,
Et l’attrayant utile et profitable.
Voilà le centre et l’immuable point
Où toute ligne aboutit et se joint.
Or, ce grand but, ce point mathématique,
C’est le vrai seul, le vrai qui nous l’indique ;
Tout, hors de lui, n’est que futilité,
Et tout en lui devient sublimité[28].

Despréaux a dit : Le vrai seul est aimable[29] ; qui peut souffrir qu’on allonge ainsi cette vieille pensée ?

Dans ton histoire est un sublime essai
Où tout est beau parce que tout est vrai.
Non d’un vrai sec et crûment historique[30].

C’est insulter au public que d’oser prodiguer de l’encens à de si mauvais vers.

XXI.

Je tombe dans le moment sur le nombre 139. « L’idée de M. Mairan, dit-il, est imitée du système de M. Newton sur la lumière. » Il faut lui apprendre que jamais Newton n’a fait de système sur la lumière. Il a donné un recueil d’expériences et de démonstrations mathématiques, sans autre ordre que celui dans lequel il a fait ses expériences : parler de ses découvertes comme d’un système, c’est comme si on disait le système d’Euclide.

XXII.

Dans le même nombre, après avoir fait si mal le physicien avec Newton, il fait le musicien avec Rameau, et il accuse son livre[31] d’être inutile, parce qu’il est vrai : il voudrait que M. Rameau eût plus de goût, et il l’insinue souvent ; il devait se souvenir de la fable d’un certain animal pesant et à longues oreilles, qui se plaignait du peu d’harmonie du rossignol.

XXIII.

« Il s’est transporté, dit-il (nombre 147), dans une maison où il a vu agir une pompe qui élève cent mille muids d’eau par jour à la hauteur de cent trente pieds, avec peu d’efforts et de dépenses. »

Il est bon qu’il sache que quand on voit ainsi, on est très-peu propre à faire voir aux autres. S’il avait la moindre connaissance des mécaniques, il aurait su que le produit de la force par la vitesse, ou par l’espace parcouru, est toujours égal au produit de la résistance par la vitesse ou par l’espace parcouru ; que pour élever à cent trente pieds cent mille muids d’eau par jour, il faudrait à chaque seconde élever le poids d’environ cent quarante-huit livres ; que la force d’un homme, pour élever des fardeaux, n’est estimée que vingt-cinq livres, et celle d’un cheval cent septante-cinq ; que le chemin ou la vitesse de ces fardeaux est de trois pieds par seconde dans la main des hommes ou avec le pas des chevaux ; qu’enfin, suivant ce calcul, en allouant encore très-peu de chose pour les frottements, il faudrait la force de quinze cents hommes, ou de deux cent quinze chevaux, par seconde, pour faire réussir cette machine. On ne peut que louer l’effort d’un bon citoyen qui cherche à rendre service à l’État par des machines nouvelles ; mais on ne peut que rire d’un journaliste qui fait le savant, et qui dit de telles sottises.

XXIV.

Au nombre 52, l’auteur des Observations s’avise de parler de guerre ; il a l’insolence de dire que feu M. le maréchal de Tallard gagna la bataille de Spire contre toutes les règles, par une méprise, et parce qu’il avait la vue courte, circonstance, dit-il, qu’il savait depuis longtemps. Il faut apprendre à cet homme, ci-devant jésuite et curé, ce que c’est que la bataille de Spire. Voici ce qu’en dit, dans une de ses lettres, un des meilleurs lieutenants-généraux qu’ait eus la France :

« M. le maréchal de Tallard ayant assiégé Landau, M, le prince de Hesse et M. de Nassau-Neubourg, à la tête de l’armée des alliés, forcèrent plusieurs marches pour secourir la ville. Je marchais cependant pour joindre l’armée du siège, et il était à craindre que les alliés, se portant entre M. de Tallard et moi, ne lui coupassent les vivres. La situation était embarrassante ; les ennemis n’avaient plus que deux marches à faire pour attaquer M. de Tallard : il prit sa résolution sur-le-champ ; il m’envoie dire de marcher en toute diligence avec ma cavalerie vers le Spireback, que les ennemis passaient, et il fait lui-même deux marches forcées pour aller attaquer ceux qui comptaient le surprendre. Un espion, auquel il donna mille écus, l’instruisit de l’état de l’armée ennemie ; je le joignis avec deux mille chevaux, mon infanterie suivait. Nous arrivâmes au Spireback dans le temps que les généraux alliés étaient à table. Leur armée se rangea en bataille avec beaucoup de confusion, et nous fondîmes sur eux pendant qu’ils se formaient, quoique toutes nos troupes ne fussent pas arrivées. Je n’ai jamais vu tant de célérité dans l’exécution : les ennemis firent un feu très-vif, et obligèrent même M, de Puignon de reculer à leur droite ; mais M. le maréchal fit charger, la baïonnette au bout du fusil : méthode excellente, et qui nous réussit presque toujours ; alors les ennemis ne firent plus aucune résistance. »

Eh bien ! monsieur le journaliste, est-ce là gagner une bataille par méprise ? M. de Feuquières, ennemi personnel de M. de Tallard, a pu le dire[32] ; il a fait par envie ce que vous faites par ignorance.

XXV.

L’Observateur, nombre 69, parle de vers comme de guerre et de philosopbie ; il critique ce vers de M. Gresset[33].

 
Au sein des mers, dans une île enchantée.

« Le sein de la mer, dit-il, ne peut s’entendre de sa surface » ; il devrait au moins savoir qu’en poésie on dit : Au sein des mers, au lieu au milieu des mers ; au sein de la France, au lieu d’au milieu de la France ; au sein des beaux-arts dont on médit ; au sein de la bassesse, de l’envie, de l’ignorance, de l’avarice, etc.

XXVI.

Nombre 8. On m’apporte dans le moment cette feuille ; elle est curieuse, et mérite une attention singulière. Voici comme il parle d’un livre intitulé le Petit Philosophe :

« J’en ai trop dit pour vous faire mépriser un livre qui dégrade également l’esprit et la probité de l’auteur ; … c’est un tissu de sophismes libertins, forgés à plaisir pour détruire les principes de la morale, de la politique, et de la religion… Comment pourrait-on être séduit par un écrivain qui franchit toutes sortes de bornes, et qui avoue, d’un air cavalier, qu’il n’a étudié que dans les cafés et dans les cabarets[34] ? »

Ne croirait-on pas sur cet exposé que cet ouvrage, intitulé le Petit Philosophe, ou Alciphron, est la production de quelque coquin enfermé dans un hôpital pour ses mauvaises mœurs ? On sera bien surpris quand on saura que c’est un livre saint, rempli des plus forts arguments contre les libertins, composé par M. l’évêque de Cloyne, ci-devant missionnaire en Amérique[35]. Celui qui a fait cet infâme portrait de ce saint livre fait bien voir par là qu’il n’a lu aucun des livres dont il a la hardiesse de parler.

XXVII.

Ayant lu dans ces Observations plusieurs traits contre M. de Voltaire, et une lettre qu’il se vante que M. de Voltaire lui a écrites[36], j’ai pris la liberté d’écrire moi-même à M. de Voltaire sans le connaître : voici ce qu’il m’a répondu :

[37]« Je ne connais l’abbé Guyot-Desfontaines que parce que M. Thiriot l’amena chez moi en 1724, comme un homme qui avait été ci-devant jésuite, et qui, par conséquent, était un homme d’étude ; je le reçus avec amitié, comme je reçois tous ceux qui cultivent les lettres. Je fus étonné au bout de quinze jours de recevoir une lettre de lui, datée de Bicêtre, où il venait d’être renfermé. J’appris qu’il avait été mis trois mois auparavant au Châtelet pour le même crime dont il était accusé, et qu’on lui faisait son procès dans les formes. J’étais alors assez heureux pour avoir quelques amis très-puissants que la mort m’a enlevés. Je courus à Fontainebleau, tout malade que j’étais, me jeter à leurs pieds ; je pressai, je sollicitai de toutes parts ; enfin j’obtins son élargissement, et la discontinuation du procès où il s’agissait de sa vie : je lui fis avoir la permission d’aller à la campagne chez M. le président de Bernières, mon ami. Il y alla avec M. Thiriot. Savez-vous ce qu’il y fit ? un libelle contre moi. Il le montra même à M. Thiriot, qui l’obligea de le jeter dans le feu ; il me demanda pardon, en me disant que le libelle était fait un peu avant la date de Bicêtre. J’eus la faiblesse de lui pardonner, et cette faiblesse m’a valu en lui un ennemi mortel, qui m’a écrit des lettres anonymes, et qui a envoyé vingt libelles en Hollande contre moi. Voilà, monsieur, une partie des choses que je peux vous dire sur son compte, etc. »

Je ne crois pas qu’une pareille lettre ait besoin de commentaire, aussi je n’en ferai point.

XXVIII.

On m’apporte le nombre 58. Le satirique auteur essaye d’avilir la Mèrope du marquis Maffei. Cette tragédie a sans doute des défauts, mais ce n’est pas ceux que le satirique lui reproche. Il traduit gentile aspetto, aspect aimable, par jolie figure ; genitori innocenti, les auteurs vertueux de mes jours, par mes parents gens de bien ; ben complesso, taille avantageuse, par bonne complexion. Ainsi, dans une traduction que ce critique fit en français[38] d’un ouvrage anglais de M. de Voltaire, il prit le mot cake, qui signifie gâteau, pour le géant Cacus… Il est plaisant, il faut l’avouer, qu’un pareil homme s’avise de juger les autres.

XXIX.

Voici les expressions qu’on m’a fait voir dans ses feuilles :

« La fréquence fastidieuse d’un clinquant métaphysique. »

« Les rustiques contempteurs qui méprisent les Révolutions de Pologne, le second Gulliver, le Nouvelliste du Parnasse, etc. »

« Un sage militaire enchanté d’un auteur connu par les admirables saillies d’une délicate inintelligibilité. »

« Une hypocrisie corporifiée par la grâce. »

« La nouvelle faculté d’un esprit paradoxal, érigée dans le beau monde. »

« Un savoyard qui décrotte des lambeaux de métaphysique, »

« La vérité habilement distillée par un avocat général, qui en tire l’essence du problématique judiciaire. »

Je n’en copierai pas davantage ; je me contenterai de demander s’il sied bien à l’auteur de ce galimatias plein de bassesse d’insulter au style de M. de Marivaux, et à tant d’autres ?

XXX.

Je crains de fatiguer le public par les citations d’un ouvrage dont les feuilles sont oubliées à mesure qu’elles paraissent. Je crois que le peu que j’ai dit servira de préservatif. Je continuerai si la chose est nécessaire ; j’avertis, en attendant, que le même auteur donne sous main, depuis quelque temps, une autre brochure intitulée Réflexions sur les ouvrages de littérature. On dit qu’il combat souvent dans cette feuille ce qu’il a dit dans les Observations. Cela fait souvenir de gens d’une profession à peu près semblable qui font semblant de se battre pour ameuter les passants. N’est-il pas déplorable de voir un tel brigandage dans les lettres ?

FIN DU PRESERVATIF.
  1. La première édition de cet ouvrage a paru sous le nom de M. le chevalier de Mouhy. (K.) — Je n’ai pu trouver d’édition portant le nom de Mouhy. Mais Mouhy fut l’éditeur du Préservatif, qui fut publié en novembre 1738.

    On voit, par une lettre de Voltaire à d’Argental, du 2 avril 1739, qu’une gravure avec une inscription était jointe au Préservatif (voyez, dans la Correspondance, la note sur cette lettre.) Voici les titres des écrits qui parurent à l’occasion de ce pamphlet :

    I. La Voltairomanie, ou Lettre d’un jeune avocat en forme de mémoire, en réponse au libelle du sieur de Voltaire, intitulé le Préservatif, in-12 de quarante-huit pages, daté du 12 décembre 1738. La Voltairomanie est de Desfontaines, à qui Voltaire voulait intenter un procès criminel (voyez sa lettre à d’Argental, du 9 janvier 1739) ; mais on étouffa cette affaire, dit l’abbé Irailh, dans ses Querelles littéraires, tome II. Voyez, plus loin, le Mémoire du sieur de Voltaire.

    II. Le Médiateur, lettre à M. le marquis de ***, in-12 de vingt-quatre pages, daté du 10 janvier 1739.

    III. Jugement désintéressé du démêlé qui s’est élevé entre M. de Voltaire et l’abbé Desfont., in-12 de dix-huit pages. Une édition qui doit avoir été faite clandestinement porte en faux-titre : Combat de M. de Voltaire contre M. l’abbé Desfontaines. (B.)

  2. Le Nouvelliste du Parnasse, ou Réflexions sur les ouvrages nouveaux, ouvrage auquel coopérait l’abbé Granet, fut commencé en 1731, et arrêté par le ministère public à la quatrième feuille du quatrième volume (15 mars 1732). Une réimpression de 1734 a deux volumes in-12.
  3. Les Observations sur les écrits modernes furent commencées en 1735. Le privilége fut retiré par arrêt du conseil du 6 septembre 1743. La collection forme trente-trois volumes et trois feuilles. Les collaborateurs de Desfontaines furent l’abbé Granet, Mairault, l’abbé d’Estrées, Fréron, etc.
  4. Le grand Condé.
  5. Heautontimorumenos, comédie de Térence.
  6. Comédie de Boursault.
  7. De La Chaussée.
  8. De Voltaire lui-même, qui ne donnait pas le Préservatif comme son ouvrage.
  9. Art poétique, 93.
  10. Les diamètres apparents des objets sont comme les cordes des angles sous lesquels ils sont vus, et non comme ces angles à une distance triple. Les diamètres apparents, et par conséquent les cordes des angles, sont trois fois plus petits ; mais l’angle n’est point partagé en trois. Comme en général dans les expériences ou dans les raisonnements que font les physiciens sur cet objet, ils considèrent de petits angles, et qu’alors on peut substituer, sans erreur sensible, le rapport des angles à celui des cordes, on dit ordinairement que la grandeur apparente des objets est proportionnelle à l’angle sous lequel ils sont vus. C’est une mauvaise plaisanterie d’un géomètre sur cette manière de parler, inexacte en elle-même mais généralement reçue, que l’abbé Desfontaines, qui était fort ignorant, a prise pour une critique sérieuse. (K.)
  11. Il s’agit du Brutus de la Mort de César. Voyez tome Ier du Théâtre.
  12. Art poétique, 128.
  13. Le texte des Observations porte : « Si les Anglais, secondés de M. de V., continuent. »
  14. Le Dictionnaire néologique, à l’usage des beaux esprits du siècle, 1726, in-12, a eu beaucoup d’éditions. Desfontaines, dans la Voltairomanie, page 17, ne reconnaît que les deux premières éditions. On croit que le fond de l’ouvrage est de J.-J. Bel, conseiller au parlement de Bordeaux, mort en 1738.
  15. Lamotte, la Réputation, ode, 41-44.
  16. Id., livre IV, fable xvii.
  17. Voltaire n’était pas encore mal avec Louis Racine.
  18. Ce vers se trouve dans la Première épître sur l’âme des bêtes ; et ce n’est pas la seule différence que présente la version qu’on en lit page 73 et suivantes du tome VI de la Continuation des mémoires de littérature et d’Histoire, par le P. Desmolets.
  19. Jésuite. Fondateur du Journal de Trévoux (1659-1737).
  20. L’abbé Leroy, auteur de la Lettre d’un provincial à un ami, sur le discours (latin) de M. Crevier, 1738.
  21. Voyez, tome IX, les variantes du premier des Discours sur l’Homme.
  22. Les Poésies sacrées, traduites ou imitées des psaumes, 1717, in-12 ; 1718, in-12, ne portent pas le nom de l’auteur sur le frontispice ; mais l’épître dédicatoire est signée Desfontaines-Guyot, prêtre. La strophe qu’on vient de lire n’en fait point partie.
  23. Art poétique, 322.
  24. Voltaire lui-même (septième Discours sur l’Homme, variantes, voyez tome IX), qui n’avouait pas être l’auteur du Préservatif.
  25. Horace, livre II, épitre i, vers 32-33.
  26. Les trois épîtres de J.-B. Rousseau, qui sont le sujet de l’Utile Examen, imprimé ci-dessus, page 233.
  27. Art poétique, 343.
  28. Rousseau, Êpitre à Rollin, 34-44.
  29. Épitre IX, vers 43.
  30. Rousseau, Épitre à Rollin, 51-53.
  31. Génération harmonique, 1737.
  32. Dans ses Mémoires et Maximes militaires, 1737.
  33. Épître à ma muse, vers 222.
  34. Ce n’est pas tout à fait le texte des Observations ; il y a : « que dans les cercles, les cafés et les tavernes ? »
  35. Joncourt a traduit en français l’ouvrage de Berkeley, sous le titre de : Alciphron, ou le Petit Philosophe, 1734, deux volumes in-12.
  36. Voyez, dans la Correspondance, le fragment de lettre du 7 septembre 1735.
  37. Cette lettre parait être celle que Voltaire dit avoir adressée à Maffei en 1736 ; voyez plus loin le Mémoire du sieur de Voltaire, et dans la Correspondance, la lettre à Thieriot, du 24 novembre 1738.
  38. L’Essai sur la poésie épique ; voyez, tome VIII, page 302, et dans la Correspondance, la lettre du 20 septembre 1736.