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Le Pyrrhonisme de l’histoire/Édition Garnier/40

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Le Pyrrhonisme de l’histoireGarniertome 27 (p. 294-295).
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CHAPITRE XL.
du pape alexandre vi[1].

Le cardinal Bembo, Paul Jove, Tomasi, et enfin Guichardin, semblent croire que le pape Alexandre VI mourut du poison qu’il avait préparé, de concert avec son bâtard César Borgia, au cardinal Sant-Agnolo, au cardinal de Capoue, à celui de Modène, à plusieurs autres ; mais ces historiens ne l’assurent pas positivement. Tous les ennemis du saint-siége ont accrédité cette horrible anecdote. Je suis comme l’auteur de l’Essai sur les Mœurs[2] ; je n’en crois rien, et ma grande raison, c’est qu’elle n’est point du tout vraisemblable. Le pape et son bâtard étaient sans contredit les deux plus grands scélérats parmi les puissances de l’Europe ; mais ils n’étaient pas des fous.

Il est évident que l’empoisonnement d’une douzaine de cardinaux, à souper, aurait rendu le père et le fils si exécrables que rien n’aurait pu les sauver de la fureur du peuple romain et de l’Italie entière. Un tel crime n’aurait jamais pu être caché, quand même il n’aurait pas été puni par l’Italie conjurée ; il était d’ailleurs directement contraire aux vues de César Borgia. Le pape son père était sur le bord de son tombeau : Borgia avec sa brigue pouvait faire élire une de ses créatures ; est-ce un moyen pour gagner les cardinaux que d’en empoisonner douze ?

Enfin les registres de la maison d’Alexandre VI le font mourir d’une fièvre double tierce, poison assez dangereux pour un vieillard qui est dans sa soixante et treizième année.

  1. Voyez, page 208, le paragraphe VII des Droits des hommes.
  2. Tome XII, page 190.