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Les Gaietés du Conservatoire/15

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Libr. Ch. Delagrave (p. 74-76).
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Chacun sait depuis longtemps qu’

 

Il y a des gens qui se disent Espagnols,
Et qui ne sont pas du tout des Espagnols…

 

Ce qu’on sait moins, c’est qu’il y a beaucoup de gens qui se vantent d’être élèves du Conservatoire sans avoir le moindre droit à ce titre envié.

C’est ainsi qu’il faut considérer une bonne vieille dame, que j’ai connue il y a bien des années, et qui faisait un cours élémentaire de piano pour les enfants de six à douze ans. Elle m’avait prié, la pauvre femme, de visiter son cours tous les mois, pensant sans doute que ma figure, arrivant ainsi à des intervalles réguliers, produirait sur ses élèves l’effet qu’un épouvantail produit sur les moineaux, les terroriserait et les rendrait plus dociles.

Dès la première séance, il me fut impossible de lui cacher que toutes ses élèves, sans exception, possédaient un même défaut, fort rare, mais capital ; toutes jouaient outrageusement faux, ce que je n’avais jusqu’alors jamais observé au même degré dans aucun des cours élémentaires assez nombreux que j’avais l’occasion de visiter en ce temps-là.

— « C’est parce qu’elles sont jeunes », me dit-elle en souriant doucement, et je dus me contenter de cette explication.

Le deuxième mois, c’était absolument la même chose, peut-être encore pire.

J’étais très embarrassé ; la dame était âgée, moi j’étais jeune, mais je me souvenais bien que même quand j’étais tout petit on me faisait jouer les notes justes, et non pas celles d’à côté.

Je pris le taureau par les cornes. J’attendis que tout le monde fût parti, mamans et élèves, et j’obligeai la pauvre dame à me raconter par le détail ses procédés d’enseignement, ainsi que ce qu’avaient été ses propres études.

C’est alors que j’appris, parmi beaucoup d’autres choses, qu’elle évitait avant tout d’employer les éditions « faciles et sans octaves », parce que cela blessait horriblement l’amour-propre des parents ; qu’elle faisait toujours travailler à l’élève le morceau désiré par la maman, mais qu’elle avait aussi bien soin de dire : « Quand il y a une octave, vous ferez une septième !!! »

Quant à elle personnellement, si elle n’était pas absolument élève du Conservatoire, c’était tout comme, car « elle avait conduit pendant plus de trois ans la nièce d’une de ses amies à un cours LeCouppey ! »