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Nécrologie de M. Félix Cadet

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Nécrologie de M. Félix Cadet
Revue pédagogique, second semestre 1888 (p. 91-92).

M. FÉLIX CADET.

M. Félix Cadet, inspecteur général de l’enseignement primaire, qui vient de mourir dans sa soixante-et-unième année, était né à Paris le 24 décembre 1827. Brillant élève du lycée Saint-Louis, où il fut le condisciple de Challemel-Lacour, de Lambert Thiboust, de M. l’évêque Perraud (de l’Académie française), il obtint en 1847, au concours général, classe de philosophie, un premier accessit en dissertation latine et le premier accessit en histoire naturelle. Il débuta dans l’enseignement public l’année suivante, comme régent au collège de Bédarieux (Hérault). Licencié ès lettres la même année, il enseigna l’histoire successivement à Ajaccio et à Soissons. Reçu agrégé des classes supérieures, il abandonna l’histoire pour la philosophie, qu’il professa à Mâcon, Moulins, Alger et Reims.

Pendant les vingt années de son professorat, il consacra ses loi sirs à des publications qui lui valurent bientôt les suffrages de l’Institut. La première en date fut une édition des Lettres choisies de Sénèque, suivie peu après des Opuscules philosophiques de Pascal. Un Lexique du style et de la langue de Corneille (1858) obtint de l’Académie française une mention honorable : c’était la « savante étude d’un esprit pénétrant », dit le rapporteur Villemain. Cinq ans plus tard ( 1863), l’Académie des sciences morales et politiques accorda à son tour une mention à un Examen du De officiis de Cicéron. Chargé à Reims du cours d’économie politique ouvert par la Société industrielle de cette ville, M. Cadet publia en 1866 un travail sur l’économiste Boisguillebert, qui fut couronné par l’Académie des sciences morales. Cette nouvelle direction donnée à ses études l’amena à écrire une Histoire de l’économie politique, publiée en 1869, et qui obtint les suffrages des hommes les plus compétents, en particulier de M. F. Passy.

Lorsque fut entreprise la grande ceuvre de réorganisation de notre enseignement primaire, M. Félix Cadet en devint un des collabora teurs les plus dévoués. Appelé en 1870 aux fonctions d’inspecteur primaire à Paris, il fit, à l’usage des élèves des cours de l’Hôtel de Ville, une série de leçons de pédagogie (1879-1882) dont la substance fut résumée par lui en un volume qu’on lira toujours avec fruit (Lettres sur la pédagogie, Ch. Delagrave, 1882). En 1882, M. Cadet fut nommé inspecteur général ; il continua à travailler, par d’utiles publications, à l’éducation de cette nouvelle génération d’instituteurs et d’institutrices dont la France avait besoin ; outre de nombreux articles dans les périodiques scolaires, on lui doit (en collaboration avec son gendre, M. le Dr Eug. Darin) quatre volumes de la Bibliothèque pédagogique publiée par la librairie Delagrave : Rollin, Traité des études, directions pédagogiques (1882) ; Pestalozzi, Comment Gertrude instruit ses enfants (1882) ; Madame de Maintenon, Choix de lettres, entretiens et instructions (1884) ; L’éducation à Port-Royal (1887) ; chacun de ces volumes est précédé d’une introduction remarquablement écrite.

M. F. Cadet venait de prendre sa retraite il y a quelques mois, et il continuait, au sein de diverses commissions, à apporter son actif concours aux travaux de ses anciens collègues, lorsque la mort est venue le frapper. Ses obsèques ont eu lieu à Viroflay, le 2 juillet, au milieu d’une grande affluence de fonctionnaires de l’instruction publique, de parents et d’amis. Sa mémoire vivra parmi ceux qui ont connu cet homme de bien, au caractère modeste et bienveillant, dont les talents ont été appréciés de ses pairs, de ses supérieurs et de ses élèves.