Page:Œuvres de Spinoza, trad. Appuhn, tome I.djvu/554

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gination. Ce deviennent pour lui des propriétés du corps seulement ; comme telles il est possible de les concevoir clairement, c’est-à-dire mécaniquement et cela suffit pour établir (dans la cinquième partie de l’Ethique) la domination de l’entendement sur la nature.

b) Le sens appelé commun, sensus quem vacant communem correspond, autant que j’en puis juger, à ce qu’on désignait naguère par le mot de sensorium.

§ 46. La connaissance par la cause est la véritable science ; mais par cause il ne faut entendre ni une essence spécifique, comme fait Aristote, ni un concours de circonstances comme dans la science dite expérimentale. Dans un cas comme dans l’autre, le passage de la cause à l’effet (la déduction de l’effet) ne pourrait se faire par un mouvement spontané de la pensée, car la cause ne contiendrait pas réellement l’effet. La véritable déduction va de l’essence singulière aux propriétés et, j’ajoute, à l’existence, en priant le lecteur de vouloir bien lire la note concernant le paragraphe 57 ; elle est, elle doit devenir une libre production par l’esprit ; car on observera que pour Spinoza l’automatisme dont il parle ici est la liberté même, l’absence de toute détermination imposée du dehors.

§ 47. Les textes à rapprocher de la fin du paragraphe, où sont indiquées les erreurs qu’engendre la confusion de l’entendement avec l’imagination, sont avant tout la Lettre 12, dite lettre sur l’Infini, en second lieu, les passages où il est traité de l’indivisibilité de la substance étendue : Court Traité, I, chapitre ii, §§ 18-22 ; Ethique, I, proposition 13 avec le corollaire, proposition 15 scolie. Lettre 35. Voir aussi la note explicative se rapportant au passage visé du Court Traité.

§ 49. Ce passage est un de ceux où la pensée de Spinoza s’exprime le plus heureusement et le plus complètement.

Sa formule lui est évidemment inspirée par la confiance qu’il a dans l’idée claire ; l’ordre déductif ou géométrique, auquel il pense, est à ses yeux le seul véritable parce qu’il est le seul intelligible. Observons toutefois que, même si l’on croyait le réel inintelligible en son fond et qu’en conséquence l’on ne considérât point l’ordre déductif comme étant le seul et le plus vrai, la formule de Spinoza ne cesserait pas d’être applicable à la philosophie, pourvu qu’on n’admit pas dans l’esprit d’hétérogénéité radicale. A moins qu’il n’y ait deux façons de penser ou d’être conscient, qui non seulement soient irréductibles l’une à