Page:A. Belot - Les Stations de l’Amour.djvu/162

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tience j’attends votre retour, non pas tant pour vous connaître, car il me semble que nous avons déjà vécu ensemble, que pour vous prodiguer mes caresses et vous prouver tout mon amour. Je tremble de ne pas paraître digne de vous !

Je ne veux pas faire de fausse modestie, je sais bien que je suis jolie, bien faite, et que je le parais plus encore nue qu’habillée ; je sais aussi que je puis être aussi passionnée que Dora, aussi tendre et aussi aimable que Flora, en qui je trouve bien des ressemblances de goûts avec les miens, aussi gamine et aussi polissonne (avec l’âge en plus) que cette mignonne Maud… mais c’est de mon esprit, de mon caractère, de mes manières que je crains que vous ne soyez pas satisfait.

Pour vous plaire, pour passer ma vie auprès de vous, pour vieillir entre Cécile et vous, je me transformerai s’il le faut. Et pourtant quelque chose me dit que je ferai bien de rester telle que je suis et que vous m’aimerez ainsi.

Si ma destinée m’a réduite pendant quelque temps à la servitude (je ne parle pas de ma condition actuelle) que j’ai courageusement acceptée, elle n’a jamais été dans mes goûts, vous verrez que, soit comme maîtresse, soit comme amie, vous n’aurez pas à rougir de moi. Quant à Cécile, vous l’avez bien compris, n’est-ce pas ? ce n’est pas un simple caprice qui m’a entraînée vers elle. Si un désir impérieux et longtemps contenu m’a poussée dans ses bras, au risque de me faire jeter dans la rue, c’est un sentiment plus élevé et, si je ne crains pas de le dire, plus pur, qui m’a fait lui vouer ma vie. J’aime Cécile, avec toute la fureur de mes sens, mais je l’estime aussi, comme une sœur aînée aime une jeune sœur qui a besoin de protection et de guide.

Que vous ayez eu raison ou que vous ayez été imprudent en la laissant abandonnée à elle-même et maîtresse absolue de ses actions, cela ne me regarde pas, puisque vous avez

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