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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Tragiquement, Constantin annonce au peuple :

— L’Arménienne a fait couler le sang !

Alors Irène pose la main sur l’épaule de Marie toujours agenouillée :

— Ma fille, tu fais couler le sang des hommes.

— L’Augusta perpétue la guerre…, reproche Jean.

— On nous tue ici… râle un vieillard étranglé… Les scholaires tuent…

Mille cris de femmes percent le tumulte :

— Ah ! ne m’arrache pas le sein, brute sarrasine… sauve-toi… Par ici… ah !… Il m’étrangle, le candidat !… Arrière ! arrière !… Théos ! je suis chaude de sang.

Et sous la coupole qu’élèvent deux étages d’arcades circulaires, sous les yeux en lapis des Évangélistes immortalisés dans les hautes mosaïques, sous les lampes suspendues au milieu des couronnes d’or, contre les piliers trapus de l’ambon, dans les recoins obscurs des bas côtés, autour des colonnes du narthex, la mêlée s’enlace. Les femmes s’enroulent dans leurs voiles de couleurs en poussant des cris d’orfraies. Les candidats blancs bondissent, pointent, égorgent. Le glaive et la lance dorée balafrent. Les casques émergent des remous humains, des rixes, des corps-à-corps, des mouvements acharnés. Les soldats frappent, insultent, empoignent.

— Halte !… Halte !… commande Nicéphore.

À bout d’angoisses, prête à tous les aveux, Marie se redresse :