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IRÈNE ET LES EUNUQUES

ardent qu’une matrone digne ou qu’une souveraine altière. Avant la fin des réponses, elle posait d’autres questions pressantes, hardies. Elle allait et venait, siégeait un instant sur le bord de la cathèdre, surgissait vaillante, pérorait, retombait rageuse et anéantie. Alors le pape dédierait au Franc la couronne impériale ? Plus une heure même n’était à perdre si l’on voulait que l’ennemi naturel des orthodoxes devînt leur porte-glaive. Elle désigna tout de suite un spathaire pour se rendre auprès de Karl. Elle serrait les mains de Bythométrès, le remerciait avec des épithètes douces. Même devinant le regret de cette âme héroïque, elle plongea ses regards généreux dans les yeux troublés de l’eunuque. Sans mot dire, elle s’offrit, douloureuse, aimante, sensible, éperdue, et se laissa baiser lentement les mains. Jean put tenir Irène palpitante contre sa poitrine. Elle baissa les paupières afin de l’imaginer jeune et désirable comme dans le jardin d’Athènes. Autour de lui qui frémissait, elle fut onduleuse, câline, très longuement. Leurs larmes se mêlèrent dans un baiser timide et délicieux.

Après le silence d’une triste songerie, Jean comprit que leur désir essentiel n’était pas de se chérir à la façon d’amants nigauds : il fallait parfaire l’œuvre née de leur communion mentale et ancienne. Le premier, il effaça d’un geste tout leur attendrissement, et recommença de traiter la question grave. Ils dissertèrent.

Byzance ne pouvait d’aucune manière s’opposer aux